L'éclairage de Adnan Debbarh. L’inflation mondiale et l’État social au secours de la compétitivité

Adnan Debbarh. . khalil Essalak / Le360

ChroniqueLes tensions inflationnistes que connaît le monde vont encore durer. Les experts du Fonds Monétaire International qui avaient prédit un retour à la normal en juin 2022, ont repoussé ce délai de six mois.

Le 06/12/2021 à 16h01

La reprise de la demande mondiale qui est à son deuxième semestre s’est trouvée confrontée à une économie désorganisée par la pandémie Covid-19. A la clé, des approvisionnements rares et chers en matières premières, en produits alimentaires et manufacturés, avec des coûts de transport exorbitants.

Sommes-nous en présence d’une tendance lourde qui impactera l’avenir de l’économie monde?

L’économie marocaine qui importe une partie de ses besoins a vu, à l’instar d’autres pays, les prix de certains produits connaître une augmentation. Bien que le taux d’inflation national demeure acceptable, autour de 2%, le ressenti des augmentations commence à susciter de la grogne auprès des couches les plus précaires de la population.

Le maintien du pouvoir d’achat impose aux responsables gouvernementaux le choix entre deux politiques distributives: augmenter les salaires ou assurer des services publics (santé, école, transport) de qualité, gratuits ou à prix modérés. Pour se conformer à l’esprit de l’Etat social, c’est ce deuxième choix qui devrait être privilégié. Celui-ci offre l’avantage d’une amélioration progressive de l’indice de développement humain et une meilleure préparation aux mutations mondiales à venir. 

Dans la nouvelle cartographie des zones industrielles qui se dessine après la pandémie Covid-19 à travers le monde, la Chine cède du terrain. De moins en moins compétitive, trop loin, trop risquée, trop dominante, des salaires de plus en plus chers, elle est une des sources de l’inflation mondiale et la principale «perdante» des relocalisations industrielles projetées par les donneurs d’ordres européens et américains.

Ce mouvement de balancier, le départ de la plupart des industries vers la Chine et le début de retour de certaines d’entre elles pour des motifs de sécurité et de compétitivité, n’aura duré qu’une vingtaine d’années.

Le Maroc devrait profiter de cette nouvelle donne pour reprendre du terrain dans le domaine industriel en faisant valoir ses atouts. Lui qui a perdu des PME industrielles par milliers, incapables de résister à la déferlante des produits chinois, qui s’est retrouvé incapable de créer un tissu industriel moderne et diversifié susceptible de subvenir aux besoins de la population.

Rappelons quelques-uns de ses atouts.

Dans un monde qui va connaître dans les prochaines années un renchérissement des produits manufacturés pour les raisons rappelées plus haut, l’économie marocaine, si elle réussit à maintenir des salaires nominaux compétitifs tout en améliorant la qualité des ressources humaines, grâce à la disponibilité de services sociaux de qualité, pourra redoubler d’attractivité. Ajoutons deux autres avantages qui pèsent dorénavant fortement dans la balance en sus des classiques (stabilité politique, environnement des affaires, proximité des marchés, attractivité des territoires, système financier moderne, bonne logistique), à savoir nos bonnes performances en matière de production des énergies renouvelables et notre aptitude vérifiée à lutter contre les pandémies.

Ces atouts à disposition permettent de favoriser la création d’un tissu industriel compétitif pouvant se substituer, en partie, aux importations et le lancement d’autres écosystèmes exportateurs.

L’Etat providence chez les scandinaves, l’Etat social chez les allemands, n’a jamais été un frein à la compétitivité, bien au contraire, en formant et sécurisant les ressources humaines, il a grandement contribué au développement de ces contrées.

Par Adnan Debbarh
Le 06/12/2021 à 16h01