Aïd Al Adha a ceci de particulier: il réunit les familles. Le cholestérol est de la fête, le diabète et l’hypertension artérielle aussi. Qu’importe. C’est l’occasion de discuter, de commenter le dernier discours de Sa Majesté. Chacun va de son analyse, propose des solutions pour lutter contre le chômage des jeunes, pour alphabétiser les 35% de la population qui n’ont pas eu la chance d’aller à l’école. Ce ne sont pas les sujets qui manquent. Cependant, presque tout le monde tombe d’accord sur un point: à quoi sert le parlement? Certes il vote les lois, pas toutes. Il débat, pose des questions aux ministres. Mais pourquoi cela n’intéresse-t-il pas les Marocains?
A mon avis, le très haut taux d’abstention aux élections législatives aboutit à une assemblée qui ne représente pas tous les Marocains. Pour remédier à cela, il n’y a qu’une solution: rendre le vote obligatoire tout en assainissant l’éthique durant la campagne électorale (l’achat des votes).
L’actuel gouvernement semble frappé d’immobilisme. En tout cas c’est ainsi qu’il est perçu par beaucoup de citoyens. En attendant de régler la question du vote, on devrait laisser les politiques faire de la politique et désigner aux postes clés des personnalités n’appartenant à aucun courant idéologique, autrement dit des gens compétents, des technocrates dont le but est de relever le niveau de la croissance et de lutter scientifiquement contre les disparités et les inégalités sociales. Il faut laisser le champ libre aux gens sérieux, disposés à travailler.
En même temps on décide de faire une pause. Ainsi, le report de la date des prochaines élections législatives sera nécessaire, car le Maroc aura besoin d’une assemblée d’élus qui auraient un minimum d’instruction. En attendant les résultats d’un vaste programme d’alphabétisation, des technocrates seront au travail.
Il est inadmissible de laisser l’éducation dans son état actuel (je sais je me répète). C’est la base de tout et aucun pays ne peut se payer le luxe d’avoir un niveau d’instruction aussi lamentable. Il est urgent de mettre en chantier les réformes déjà proposées par plusieurs commissions et de former un bataillon d’enseignants dont ce ministère a besoin. Les former, c’est-à-dire leur donner les moyens scientifiques et pédagogiques pour bien faire leur travail.
Ce sera le chantier le plus important.
Pendant que les ministres technocrates travaillent à redresser la situation, que faire des partis politiques? Ils devraient aussi se remettre en question et ne pas perdre de vue la tâche qui leur incombe: travailler pour édifier une démocratie véritable et un Etat de droit incontestable. Pour cela, il serait impératif de ne plus mêler la religion à la politique. L’islam est dans les cœurs et dans les lieux de prière, pas dans les meetings politiques. Le PJD devrait revoir ses ambitions et tout faire pour le développement économique et culturel et lutter pour une justice juste, dégagée de toute corruption. Si ce parti ne révise pas sa base idéologique, il lui sera difficile de rejoindre la scène politique de la modernité.
On sait que le PJD est un parti populaire, bien organisé, bien structuré. Il a un certain nombre de points de convergence avec la Frères musulmans. Avec ses 55.000 associations dans le pays et hors du pays, il est capable de mobiliser des centaines de milliers de citoyens. Qu’il les mobilise pour la lutte contre la corruption, contre le gaspillage, contre le laisser-aller, contre les incompétences, contre la maltraitance de l’environnement. Depuis qu’il est au gouvernement, il n’a pas réussi à nettoyer le pays du fléau de la corruption ni à le doter d’une justice juste et d’un système de santé qui réponde aux exigences du peuple. C’est pour cela qu’on peut douter de sa volonté de travailler sérieusement au redressement économique du pays.
Le pays a besoin de cerveaux qui travaillent. L’islam est dans le cœur de la majorité des citoyens. Pas besoin d’un parti politique qui s’en sert pour atteindre le pouvoir au point de gêner le système monarchique.
Si le parti islamique est en vogue, c’est à cause de l’incompétence des autres partis politiques qui n’ont pas su trouver les mots pour s’adresser au peuple. En fait, pour s’en sortir, il faut que toutes les bonnes volontés se mettent au travail. Vaste programme? Oui, mais il faut bien commencer.