C’est une idée qui est apparue il y a quelques années déjà mais ce n’est que récemment qu’elle a été confirmée par des études statistiques: les enfants de l’ère du numérique ont des quotients intellectuels (QI) inférieurs à ceux de leurs parents. Ces résultats sont détaillés dans un livre intitulé La fabrique du crétin digital dont je recommande vivement la lecture.
C’est la première fois sans doute dans l’Histoire de l'humanité que le QI baisse. Jusqu’à présent, c’était le contraire: il augmentait de génération en génération –on appelle cela l’effet Flynn, du nom d’un psychologue américain.
Le QI est influencé par la nutrition (manger du poisson aide à phosphorer…), la scolarité, le système de santé, la qualité de l’environnement, toutes choses qui avaient tendance à s’améliorer constamment. Mais même en dépit de cette amélioration, l’effet Flynn est en train de disparaître. On l’a constaté en Finlande (le pays de Nokia), au Danemark, en Norvège, aux Pays-Bas, en France, etc.
Selon le neuro-scientifique Michel Desmurget, auteur du livre en question, l’explication est simple: c’est la faute des… écrans. Télévision, PC, tablette, smartphone, il est impossible de construire le système cognitif des humains au seul moyen des écrans. Même l’interactivité offerte par le numérique ne résout pas le problème. Lorsque l’utilisation de la télévision ou des jeux vidéo augmente, le QI et le développement cognitif diminuent.
Pourquoi? Il faut savoir que l’intelligence se développe grâce à plusieurs facteurs: la langue (sa richesse, sa souplesse…), la mémoire et la concentration, ainsi que la culture au sens large: toutes les connaissances qui nous servent à comprendre le monde, à l’ordonner– les Grecs anciens diraient: à transformer le chaos en cosmos (monde ordonné).
Des enfants qui passent tout leur temps devant des écrans n’acquièrent pas la langue dans l’environnement familial. Or c’est dans cet environnement que les mots et les émotions se mêlent intimement, ce qui conduit à une compréhension intime du monde à l’aide du langage.
D’autre part, regarder un clip musical ou un film ou une série, c’est une occupation passive, à la différence de la lecture où l’on doit faire l’effort d’imaginer les personnages et les scènes, de les compléter, de comprendre les allusions, etc. La passivité face à un écran entraîne une sous-stimulation intellectuelle. Le cerveau ne peut développer tout son potentiel.
De plus, un mode de vie trop sédentaire (on est “scotché“ devant l’écran), a une influence négative sur la maturation du cerveau.
Bref, c’est le contraire qu’il faudrait faire. La lecture, la pratique de la musique et de l’art, le sport, les promenades et la méditation sont les seuls moyens d’enrayer ce déclin du QI. Pour Desmurget, la règle est simple: pas d’écran pour les enfants jusqu’à 6 ans; ensuite, pas plus de 60 minutes par jour. Et surtout: des promenades dans la nature; l’art, la musique, le sport; la conversation dans la cellule familiale.
A moins que ça n’arrange certains d’avoir des enfants moins intelligents qu’eux? Ça faciliterait leur emprise sur eux… Mais je n’y crois pas. Même Einstein aurait sans doute accepté d’avoir un rejeton plus intelligent que lui. (Les travaux du génial Albert ayant conduit à la bombe atomique, on ne peut qu’être effrayé par l’idée d’un Einstein junior encore plus fort que son papa…)
Mais bon, blague à part, la leçon est claire: emmenez l’enfant au musée, à la forêt, au stade ou au concert. Et mettez-lui un livre plutôt qu’une tablette entre les mains.
Tous les écrivains du monde vous en seront reconnaissants…