Un Maroc inclusif et solidaire, qu’est-ce que ça veut dire?

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ChroniqueNous avons un système qui produit des miraculés qui, au sommet de leur réussite, crient «après moi le déluge», et fonctionnent sur le mode de «sauve qui peut».

Le 01/01/2022 à 09h02

En étant optimiste, je retiens de cette année 2021 qu’elle fut celle du rapport de développement. C'est-à-dire qu’à un moment donné, le Maroc, à son plus haut niveau, s’est dit: «Voyons, qu’est-ce qui ne va pas? Et comment y remédier ?».

2021 est l’année où le rapport a été publié comme un pavé dans la mare. L’idée n’est pas de le lire et de le ranger dans les armoires aux oubliettes qui nous servent de bibliothèques. Il faut au contraire en faire un outil d’accompagnement dans la vie de tous les jours, comme une clé USB. Et, pour cela, il faut le «zipper», le plier et l’essorer, pour ne plus garder que l’essentiel, le «suc», la moelle, la substance première, l’ADN, qui peut être une idée ou une phrase, voire un mot.

Avec mon optimisme à toute épreuve, je retiens l’idée que le développement passe par un Maroc inclusif et solidaire. C’est-à-dire avec des gens non exclus du système, et qui n’ont pas peur d’être jetés à la rue s’ils souffrent d’une rage de dents. 

Je retiens surtout, et par-dessus, un mot ou plutôt trois: confiance, confiance et encore confiance!

Le problème du Maroc, comme d’autres pays du Sud, c’est qu’il génère des exclus. Beaucoup trop d’exclus. Et le plus naturellement. Son système de fonctionnement est formaté d’une telle manière que, chaque année, pour ne pas dire chaque jour, il met des populations entières sur la touche.

Pas de couverture sociale, pas d’école, pas d’hôpital, la rue et rien que les rigueurs de la rue. C'est-à-dire la jungle. Notre système, depuis l’indépendance, est non inclusif et non solidaire.

Il y a des progrès et des réalisations qui ont été faites, nous n’allons pas noircir tout le tableau. Nous avons construit des autoroutes, nous avons développé un système bancaire performant, notre administration est en bonne voie de modernisation.

Mais nous ne sommes pas capables de faire accoucher une femme enceinte dans un douar. De garantir l’accès à l’école pour tout le monde. De valoriser des métiers fondamentaux comme l’enseignant, le soignant, le petit fonctionnaire. D’humaniser nos tribunaux, nos commissariats de police, nos arrondissements urbains. De désenclaver nos campagnes. De donner un vrai plan d’aménagement à nos villes. D’installer pour de bon l’idée que la loi est la même pour tous, et que tous les Marocains naissent égaux.

Nous avons un système qui produit des miraculés qui, au sommet de leur réussite, crient «après moi le déluge», et fonctionnent sur le mode de «sauve qui peut». Nous avons produit des individus qui, même lorsqu’ils réussissent, ont toujours cette peur du lendemain qui les prend aux tripes. Peur pour leurs biens, leur sécurité, leurs droits, etc.

Comment voulez-vous qu’ils fassent confiance à leur prochain, à l’Etat et à ses institutions, ses représentants? Comment pouvez-vous les empêcher d’envoyer leurs gosses à l’étranger, pour réussir leur formation et surtout pour respirer le vent de la liberté… Et pour obtenir une nationalité européenne ou américaine, considérée comme un bouclier de protection contre…

Vous connaissez la suite, n’est-ce pas?

Par Karim Boukhari
Le 01/01/2022 à 09h02