Vidéo. Reportage: La promenade de la mosquée Hassan II, un acte manqué ?

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Sur le groupe facebook "Save Casablanca", les citadins n’en finissent plus d’épingler les problèmes qui pullulent dans leur ville. Une grogne générale qui enfle, à mesure que les projets sortent de terre sans pour autant correspondre aux maquettes initiales, ni, surtout, aux budgets alloués.

Le 11/01/2020 à 16h20

Sur la promenade qui jouxte la Mosquée Hassan II, on avait promis monts et merveilles aux Casablancais férus de ballades le long de la côte.

En admirant la maquette du projet de cette nouvelle corniche, les citadins désireux d’occuper leur temps libre imaginaient déjà un joli tableau plein de promesses.

Confié au cabinet québécois Lemay et à la société marocaine Géodata, le projet d’aménagement de la promenade maritime de la Mosquée Hassan II devait être finalisé initialement en avril 2018.

Il ne le sera qu’en juillet 2019, tout du moins c’est ce qu’a laissé penser le fait que les barrières encerclant le projet avaient été retirées. La foule de promeneurs a donc investit l’endroit, sans pour autant que celui-ci fasse l’objet d’une inauguration officielle, ni que le projet (livré ?) ressemble aux maquettes. Pour rappel, voici ce qui était promis.

Encore des mots, toujours des mots, les mêmes mots

Un concept inspiré du jardin islamique classique à étages, proposant une véritable procession de la ville vers la mer, scénarisée par une promenade du citoyen au travers d’une série d’aménagements disposés en strates paysagères.

S’inscrivant dans une approche de développement durable, le projet devait accueillir également un système de tramway électrique, une piste cyclable et un système de traitement des eaux grises grâce à des jardins biofiltrants.

Organisé en trois pôles, festif, balnéaire et naturel, le projet promettait des espaces de détente, des promenades et des aires sportives en plein air, des kiosques, des sanitaires publics ainsi que des espaces de jeux pour enfants.

Conçue pour être une plateforme d’échange et un lieu de rencontre pour tous les Casablancais, la Promenade maritime de la Mosquée Hassan II, entendait s’inscrire dans une approche de cohésion sociale, d’épanouissement des citoyens et de valorisation de l’attractivité touristique.

La première phase du projet annonçait une finalisation en avril 2018. Une seconde phase, en attente de libération du foncier, prévoyait quant à elle la construction d’un parking en ouvrage de 1000 places.

Sur le site de Casa Aménagement, Maitre d’ouvrage délégué, le programme semble pourtant presque réalisé et se décline en plusieurs points :

  • Aménager la séquence sur 1,5 km et environ 13 Hectares : baladoir large, dégagé en bordure d’océan jusqu’à la pointe d’El Hank;
  • Travailler le lien piéton avec les parvis de la Mosquée Hassan II;
  • Aménager des espaces ombragés avec une palette végétale adaptée au site et nécessitant un entretien réduit ;
  • Créer des espaces de jeux pour enfants et des espaces sportifs ;
  • Intégrer des parcours pour joggeurs, promeneurs, cycles ;
  • Créer des espaces de repos, des points de rencontre ;
  • Créer des kiosques, des sanitaires publics.

Sauf qu’en réalité, nous sommes bien loin de ce qu’on s’attendait à avoir pour une enveloppe budgétaire totale de 200 Millions de dirhams.

Le ras-le-bol des Casablancais

Certes on peut s’y promener, mais pour se reposer à l’ombre, il faudra repasser. Les sortes d’abri installés ne protègent ni du soleil ni de la pluie. Au mieux, les enfants peuvent s’en servir pour jouer au cochon pendu en s’accrochant aux barres de fer.

Pour les envies pressantes, on a le choix entre se retenir ou faire ses besoins au vu et au su de tous, comme c’est d’ailleurs devenu une habitude dans tout Casablanca, devenue une pissotière à ciel ouvert faute de toilettes publiques.

Pour ceux qui imaginaient s’installer à un kiosque pour manger un morceau, boire un café ou s’offrir un rafraichissement, ce n’est pas encore le moment. Les installations prévues à cet effet sont toujours désespérément vides.

Mais le pire dans tout cela, en admettant qu’une seconde phase sera bel et bien réalisée, c’est que les matériaux utilisés sont d’ores et déjà en train de dépérir.

Les câbles métalliques qui longent la corniche, sensés assurer la sécurité des promeneurs, sont en train de rouiller quand ils ne sont pas déjà cassés.

Sur le groupe Facebook Save Casablanca, habitué à épingler la mauvaise gestion de la ville, les photos et les commentaires incendiaires pullulent, interpellant la société de développement local Casa Aménagement et les autorités de la ville.

Le mauvais choix des matériaux, visiblement inadaptés à un environnement salin, laisse libre cours à la corrosion. Quid du suivi et du contrôle des travaux en cours de réalisation? La question se pose.

"Alerte avant qu' il ne soit trop tard" écrit ce Casablancais sur la page de Save Casablanca.

"Les petits détails que certains peuvent considérer comme insignifiants peuvent être la cause du début de la ruine du projet de la corniche de la mosquée Hassan II, qui a été réalisée pour des millions."

Postant des images de trous de rouille dans la balustrade qui longe la mer, celui-ci déclare "nous savons tous que la rouille se propage dans le fer comme le cancer dans le corps humain." Et d’interpeller les responsables en leur demandant "de traiter ces petits trous avant de tout perdre."

Chaque membre du groupe y va de son expertise dans les commentaires qui suivent. 

"Il faut un traitement anti-rouille" annonce l’un. "Pourquoi n’ont-ils pas galvanisé le fer?" demande l’autre. "Non la galvanisation n’est pas suffisante en bord de mer. Il aurait fallu de l’Inox 316" rétorque un autre.

Et tous d’un commun accord de fustiger le responsable du cahier des charges, l'ingénieur et la division technique et de s’interroger sur les véritables bénéficiaires de ce marché public.

Un autre post sur le même groupe s’illustre du même type de photographies, pointant du doigt la rouille qui s’installe tranquillement sur les matériaux. Et de dénoncer à son tour "le service manquant, la fraude et le mépris de la vie du citoyen" en prenant pour exemple le cas d’un enfant qui pourrait se blesser et, au contact de cette rouille, contracter le tétanos.

Du côté du site web de Casa Aménagement, on stipule que le projet est achevé. Ah bon? Pas de 2e phase ?

Par Zineb Ibnouzahir
Le 11/01/2020 à 16h20