Dans l'un des douars de la commune rurale de Zeghanghane (province de Nador), la misère et la détresse de ces femmes, qui assuraient quotidiennement un travail physiquement pénible pour faire vivre leur famille, est clairement visible.
Des centaines de "femmes-mulets" de la région de l'Oriental, dont le travail à la fois informel et pénible consistait à transporter sur leur dos des dizaines de kilos de marchandises de contrebande en provenance des deux présides occupés de Sebta et Melilla se sont en effet retrouvées, depuis la fermeture des frontières, à la fin de l'année 2019, sans plus aucune source de revenus. Une situation très dure à vivre, qui s'est ensuite aggravée, à cause du contexte de la pandémie du coronavirus, dont le premier cas a été déclaré le 2 mars 2020, au Maroc.
Interrogée par Le360, Soumia déclare avoir, du jour au lendemain, été privée de ses revenus journaliers qui lui permettaient, une fois la traversée de la frontière accomplie, et sa lourde marchandise déposée chez le contrebandier qui la rémunérait, de nourrir ses cinq enfants.
«Je gagnais entre 100 et 200 dirhams par jour. Mais depuis la fermeture des frontières avec Sebta et Melilia, je me suis retrouvée, ainsi que ma famille dont je suis l’unique soutien, sans le moindre sou. J’ai bénéficié de l’aide de l'Etat à deux reprises au cours de cette période de crise sanitaire, mais cela reste insuffisant, àç cause du nombre d'enfants que j’ai à nourrir», explique-t-elle.
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L’annonce de la création par le Conseil de la région de l’Oriental d’un fonds de soutien aux femmes en situation difficile a fait naître bien des espoirs parmi ces femmes, qui souhaitent que cette aide leur soit octroyée le plus tôt possible.
Fatima, qui a été elle aussi "femme-mûlet", apporte elle aussi son témoignage. Elle explique, pour Le360, qu'elle s'est vue contrainte de charger son propre fils, handicapé, de vendre des sacs en plastique, pourtant interdits par la loi, dans un souk qui se tient toutes les semaines dans l'un des douars de Zeghanghane, afin d'apporter quelques maigres revenus à sa famille.
D’autres femmes que Le360 a rencontrées racontent elles aussi à quel point leur vie est devenue difficile après la fermeture des frontières d'avec les deux présides, suivie de la crise sanitaire et de ses conséquences. Ces femmes que la vie n'avait déjà pas épargnées, à cause de la pénibilité d'un travail informel qui profitait à d'autres, ont toutes leur propre et dure histoire, et en commun une même et unique misère.
En plus de l'aide de ce fonds de soutien, que s'apprête à débloquer l'Etat pour ces femmes, d’un budget de 8 millions de dirhams, elles se sont vues promettre d'être ultérieurement embauchées dans des unités industrielles. Leur famille et elles attendent, pour l'heure, la concrétisation de ces promesses, et se nourrissent d'espoir.