Les chiffres, pour inquiétants qu’ils soient, sont déjà connus depuis l’étude présentée, en octobre dernier, par le CESE. Le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, vient de les confirmer encore une fois dans sa réponse à une question écrite qui lui a été soumise par des parlementaires. Ainsi, comme le souligne le ministre cité par le quotidien Al Akhbar dans son édition du lundi 19 décembre, 48,9% des Marocains âgés de plus de 15 ans connaissent, ou ont déjà connu, des signes de troubles mentaux et psychiques.
Selon le ministre, 26% des Marocains ont également souffert de dépression. D'après les données exposées par le ministre dans sa réponse, il ressort que 9% des Marocains souffrent, de même, d’anxiété au cours de leur vie, tandis que 5,6% souffrent de troubles mentaux et 1% de schizophrénie. D’après le ministre, ces troubles présentent un coût extrêmement important, que ce soit sur le plan économique ou social. Ils conduisent également, dans la plupart des cas, à une stigmatisation sociale qui pourrait même devenir une forme de ségrégation. Ce qui limite considérablement les chances d’accès des personnes concernées aux soins.
Pour ne rien arranger, le Maroc souffre d’un manque flagrant en personnel médical spécialisé. Le pays compte, en effet, moins d’un psychiatre pour 100.000 habitants, alors que la moyenne mondiale est de 1,7/100.000 habitants et la moyenne européenne atteint 9,7. Pour ce qui est des assistantes sociales, le secteur public n'en compte que 14, alors que le cadre légal censé régir l’exercice du métier de spécialiste en psychologie est inexistant.
Il est donc clair que les ressources humaines spécialisées en santé mentale ne sont pas suffisantes pour répondre aux besoins des personnes en souffrance, alors même que les chiffres officiels montrent des taux de prévalence importants pour les troubles mentaux et psychologiques.
En termes d’infrastructures dans le domaine, poursuit le quotidien, le Maroc dispose d'à peine 6,43 lits pour 100.000 habitants, contre une moyenne mondiale de 13,3 lits et une moyenne européenne de 47,3 lits. Concrètement, le Maroc compte 25 cliniques psychiatriques intégrées dans les hôpitaux publics, avec un total de 825 lits, 11 hôpitaux spécialisés, universitaires et publics, avec 1.341 lits, et 3 services sanitaires universitaires chargés du traitement des troubles de l'addiction et comptant à peine 46 lits.
Partant de là, le ministère s’efforce de compenser ce manque par des mesures et des procédures importantes, en intégrant la santé mentale dans les hôpitaux publics et les établissements de soins de santé primaires. Il a été décidé, entre autres, de revoir la procédure de la mise en dépôt judiciaire. Le département de la santé planche également sur un plan stratégique national multisectoriel dédié aux maladies mentales et psychiques. Ce projet verra le jour en 2023 et sera initié en partenariat avec l’Agence française du développement. Il portera sur la période 2023-2030.