Pourquoi le Maroc doit davantage miser sur la collecte des eaux pluviales

La ville d’Errachidia sous la pluie.

Le Maroc est confronté à un défi majeur: la gestion de ses ressources en eau. Les épisodes de sécheresse se multiplient, mettant à mal ses réserves hydriques. C’est pourquoi le Royaume a décidé de miser sur une solution ancestrale et pourtant d’une modernité redoutable: la collecte des eaux pluviales.

Le 13/11/2024 à 13h03

Le Maroc met les bouchées doubles pour développer les infrastructures de collecte des eaux de pluie à travers tout le territoire. Des schémas directeurs seront bientôt élaborés pour définir des actions concrètes, telles que la réalisation de travaux de conservation des sols, la collecte des eaux pluviales et la construction d’infrastructures de stockage. Pour accélérer la mise en œuvre de ces projets, de nombreux marchés publics ont été récemment lancés.

La collecte des eaux pluviales n’est pas une nouveauté au Maroc. Depuis des siècles, les populations rurales ont su tirer parti de ce précieux liquide en construisant des citernes et des puits. Aujourd’hui, ces pratiques sont modernisées et étendues à l’ensemble du territoire, nous explique Amine Benjelloun, hydrogéologue.

Les avantages de cette pratique sont multiples. Tout d’abord, elle permet d’alléger la pression sur les ressources en eau souterraines, souvent surexploitées. «En captant l’eau de pluie pour des usages non potables, comme l’irrigation, le nettoyage et les usages sanitaires, on diminue la demande sur les sources d’eau potable, ce qui aide à préserver les réserves d’eau pour les usages essentiels, comme la consommation humaine et les besoins domestiques de base», fait savoir notre interlocuteur.

Elle permet également de constituer une réserve en capturant l’eau lors des saisons humides. «Cette eau peut ensuite être utilisée durant les périodes de faibles précipitations, offrant ainsi une ressource fiable pour les cultures, l’élevage et d’autres activités locales», note l’hydrogéologue. De plus, l’infiltration des eaux pluviales dans les nappes souterraines permet de reconstituer les aquifères, souvent surexploités dans les régions agricoles.

«En captant l’eau directement sur les toits ou dans des réservoirs, on diminue le volume d’eau qui ruisselle et provoque des inondations en zones urbaines. Cela présente un double avantage,en limitant à la fois l’érosion des sols et la pollution des cours d’eau par les eaux de ruissellement, souvent chargées de polluants provenant des surfaces imperméables comme les routes et les trottoirs. De surcroît, l’eau ainsi collectée fournit une source précieuse pour l’irrigation, permettant aux agriculteurs de maintenir leurs cultures même lors de faibles précipitations», ajoute Amine Benjelloun.

Ce qui entrave la généralisation de cette pratique

La collecte des eaux pluviales au Maroc fait cependant face à plusieurs obstacles. Les coûts élevés de mise en place et de rénovation des infrastructures freinent la généralisation de cette pratique. La construction de systèmes de captation, de réservoirs de stockage et de dispositifs de distribution nécessite des investissements considérables, déplore l’expert.

Le changement climatique reste aussi un défi de taille, car il rend la pluviométrie de plus en plus imprévisible. «Les variations des précipitations compliquent les prévisions et réduisent parfois la disponibilité de l’eau pour les systèmes de collecte. Ce contexte exige donc des solutions flexibles et adaptées aux réalités locales, pour que la collecte des eaux pluviales reste une solution viable face à la pénurie d’eau», estime l’hydrogéologue.

Malgré ces défis, cette pratique représente une option pour renforcer la sécurité hydrique du pays. «Elle contribue à optimiser la gestion des ressources en eau, à réduire la pression sur les sources conventionnelles et à soutenir les activités économiques locales, notamment l’agriculture», résume Amine Benjelloun.

Par Hajar Kharroubi
Le 13/11/2024 à 13h03