Casablanca: au cœur du quartier Palmiers, un jardin promis au calme devient un cauchemar

Le jardin Bonnat Square situé sur le boulevard du 9 Avril, dans le quartier Palmiers, à Casablanca. (Le360)

Au cœur du quartier Palmiers à Casablanca, les habitants de résidences de très haut standing vivent un quotidien empoisonné. Le jardin Bonnat Square, jadis conçu comme un écrin de verdure, est devenu le repaire de bandes bruyantes et agressives. Face aux retards de réhabilitation, les riverains demandent des mesures urgentes, quitte à fermer le lieu.

Le 26/08/2025 à 08h50

Vivre face à un jardin au centre de Casablanca, c’était la promesse du luxe et du calme. Mais pour les résidences du quartier Palmiers situées à proximité immédiate du jardin public Bonnat Square, sur le joli boulevard du 9 Avril, le rêve s’est mué en cauchemar.

Régulièrement, les bancs et les arbres de ce petit jardin laissé à l’abandon accueillent des groupes de voyous qui boivent, fument de la drogue et se battent. Les rires gras se muent vite en hurlements, les querelles dégénèrent en pugilats.

Les familles assistent, depuis leurs balcons, à ce spectacle indigne. Notamment l’une des résidences, récemment livrée, se trouve derrière ce jardin et son portail d’entrée est situé à quelques mètres de l’espace de verdure devenu dangereux pour les habitants. La seule façon pour les résidents d’entrer ou de sortir de l’immeuble est de longer le jardin dégradé, en voiture ou à pied, sur une centaine de mètres. Femmes vivant seules dans le bâtiment, enfants envoyés pour les courses, visiteurs de passage sont contraints de passer dans la zone inhospitalière.

Beaucoup désormais, ne sortent plus après 18 heures, et une majorité a renoncé à utiliser le portail de l’immeuble et préfère faire le tour du pâté de maisons pour entrer par le garage, comme des voleurs, évitant ainsi les regards hostiles et le risque d’agression.

Un habitant témoigne: «Plusieurs fois, nous avons été réveillés à 2 ou 3 heures du matin, par la sonnette du visiophone, et c’étaient des individus louches, complètement éméchés, qui criaient et insultaient.»

Les riverains sollicitent régulièrement la police, parfois même pour des interventions d’urgence face à des scènes de violence nocturnes observées depuis leurs balcons. Les forces de l’ordre effectuent des rondes et se montrent attentives, mais cela ne suffit pas à apaiser durablement la situation. Les groupes reviennent, chaque soir ou presque, comme si de rien n’était.

De même les forces de l’ordre interviennent régulièrement dans une villa abandonnée, classée patrimoine historique, située non loin du jardin, sur la rue Ahmed Ennaciri, où chaque nuit une faune de sans-abris, parfois jusqu’à une dizaine, dont des jeunes femmes et leurs bébés, escaladent le mur et squattent le jardin jusqu’au lendemain.

Une commune paralysée par les chantiers

Alertée à plusieurs reprises, la commune reconnaît le problème et assure sa bonne volonté. Mais elle se retranche derrière les travaux en cours: un grand hôtel et une école supérieure internationale sont en construction dans l’entourage immédiat du jardin Bonnat Square. Pour les autorités locales, il faut attendre la livraison de ces projets pour engager la réhabilitation de Bonnat Square. Des visites techniques ont eu lieu et un plan de mise à niveau du jardin existe bel et bien, reconnaissent les habitants, mais ils ne conçoivent pas de devoir patienter deux ou trois ans, dans les meilleurs délais, dans de telles conditions.

Face à l’attente imposée par la commune, les habitants demandent des solutions rapides: soit une réhabilitation immédiate, soit, à défaut, une fermeture provisoire du jardin par une clôture en grille. «Mieux vaut un espace fermé qu’un terrain livré au désordre», plaide un résident.

Désormais, Bonnat Square fait tache. Ce jardin, qui n’est plus entretenu depuis plusieurs années, devait magnifier le quartier. Il tombe actuellement en ruines: allées sales, arbres abandonnés, mobilier abîmé. Au lieu d’une oasis urbaine, les habitants se retrouvent avec une zone grise où le désordre prospère.

Par Nisrine Zaoui
Le 26/08/2025 à 08h50