Il aura suffi d’une sévère mise en garde de l’Union européenne pour que toute la fanfaronnade algérienne contre l’Espagne retombe. D'un coup sec et immédiatement. Ce vendredi 10 juin, l’UE a en effet mis en garde l’Algérie contre les conséquences des restrictions commerciales qu’elle a imposées à l’Espagne, la menaçant de mesures de rétorsion.
La réaction de l’UE est intervenue après qu’Alger a suspendu mercredi un «traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération» conclu en 2002 avec l’Espagne, ce pays ayant confirmé, le jour même et par la voix de son président du gouvernement, Pedro Sanchez, que son changement de position sur le Sahara et son soutien à la proposition d’autonomie des Provinces du Sud étaient irrévocables.
Dans un communiqué commun, ce sont ainsi deux hauts commissaires européens qui ont apporté la réponse à l’attitude algérienne: le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell et le vice-président de la commission en charge du Commerce, Valdis Dombrovskis.
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Pour eux, la décision est «extrêmement préoccupante». «Nous évaluons les implications des actions algériennes», notamment l’instruction donnée aux institutions financières «d’arrêter les transactions entre les deux pays, qui semble être en violation de l’accord d’association UE-Algérie, en particulier dans le domaine du commerce et de l’investissement», ont-ils précisé dans un communiqué relayé par l’AFP (Agence France-Presse).
Josep Borrell et Valdis Dombrovskis n’y vont pas de main morte s’agissant des conséquences de l’acte algérien. L’UE «est prête à s’opposer à tout type de mesures coercitives appliquées à l’encontre d’un Etat membre», ont-ils menacé, rappelant que la politique commerciale est une compétence exclusive de l’Union.
La première réaction de la junte à ces propos a émané de la mission de l’Algérie auprès de l’Union européenne. Et elle a été sous forme d’un lamentable rétropédalage. A commencer par la négation totale de toute restriction commerciale algérienne sur les produits espagnols, pourtant annoncée et suivie d’effets. L’Association des banques et établissements financiers algériens a annoncé, dans une note diffusée, le 8 juin, à grande échelle dans les médias algériens, le gel des domiciliations bancaires des opérations de commerce extérieur de et vers l’Espagne. Ce qui veut dire qu’il n’y aura ni exportations ni importations de produits avec l’Espagne.
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Compte tenu du fait qu’il n’existe aucune banque privée en Algérie, c’est donc un groupement de banques étatiques qui a pris cette décision de geler les opérations financières avec l’Espagne. D’ailleurs, la presse algérienne ne s’y est pas trompée. Un média comme TSA s’interroge dans un article «Comment les importateurs algériens comptent remplacer l’Espagne?».
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Quand le régime algérien prend ses distances avec la note du groupement des banques algériennes en affirmant que «la prétendue mesure d’arrêt par le gouvernement des transactions courantes avec un partenaire européen, elle n’existe en fait que dans l’esprit de ceux qui la revendiquent et de ceux qui se sont empressés de la stigmatiser», il donne un aperçu de la gouvernance chaotique et de l’amateurisme des responsables algériens.
Pire, et s'agissant en l'occurrence du gaz, «l’Algérie a déjà fait savoir, par la voix la plus autorisée, celle du président de la République, qu’elle continuera à honorer tous ses engagements pris dans ce contexte, à charge pour les entreprises commerciales concernées d’assumer l’ensemble de leurs engagements contractuels», lit-on dans le communiqué algérien. Comme si nul ne savait que les contrats gaziers sont sur la durée et qu’il faut qu’ils arrivent à terme avant d’être rompus.
On ne peut mieux se faire seppuku en matière de politique étrangère. Pitoyable, ce dernier rétropédalage donne de nouveau la mesure d’un régime qui navigue à vue. «L’Algérie nouvelle» du duo Tebboune-Chengriha est devenue la risée du monde. Le spectacle n’en est que plus désolant. Aujourd’hui, l’Espagne, et derrière elle toute l’Union européenne, sont aux premières loges.