Décidément, l’AFP ne cessera jamais de nous étonner et sa capacité à tordre le cou à certains «faits» pour nuire à l’image du Maroc est, disons-le, indépassable. Véritable tête de pont de certaines parties en France hostiles au Royaume, l’agence d’information démontre une fois encore toute l’étendue de son talent et de son mépris des règles qu’elle affirme respecter à la seule fin de verser son fiel sur le Maroc.
La démonstration de ce parti pris nous est venue, mardi 7 juin, du bureau de l’AFP à Madrid qui ne rate pas une occasion pour associer le logiciel espion Pegasus au Maroc. «Espagne: une ex-ministre accuse Rabat d'avoir procédé à des "écoutes"», titre ainsi l’AFP. Il s’agit du titre de la dépêche, donc l’élément le plus important dans la hiérarchie des faits relatés. Ce titre ne souffre d’aucune nuance, aucune réserve. Il est non seulement affirmatif, mais aussi péremptoire. Il attribue à Arancha Gonzalez Laya des propos qui ne souffrent d’aucune ambiguïté.
Et pourtant, ce titre ne correspond pas aux faits. C’est une interprétation, tendancieuse, de l’agencier de l’AFP. Ce dernier s’est basé sur un entretien accordé par l’ancienne ministre des Affaires étrangères espagnole Arancha Gonzalez Laya au quotidien El Periódico de España pour construire sa dépêche.
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«Tout a été utilisé durant cette crise. (…) Et quand je dis tout, c'est tout: des écoutes, des plaintes, des campagnes, et notamment des campagnes de presse», a effectivement dit l’ancienne chef de la diplomatie espagnole. Mais là où l’AFP se trompe méchamment, c’est qu’Arancha Gonzalez Laya n’a, à aucun moment, cité le Maroc.
Même face à l’insistance du journaliste d’El Periódico voulant savoir si elle a fait l’objet d’écoutes, l’ancienne cheffe de la diplomatie espagnole est restée évasive. «Les téléphones des responsables gouvernementaux sont soumis à une procédure pour assurer leur protection et aussi pour enquêter sur les violations de leur intégrité et je crois qu’il faut adresser cette question à qui de droit et non à moi», a-t-elle déclaré en substance.
Dès lors, comment est-ce qu’une agence aussi importante que l’AFP peut titrer sur des propos qui ne sont pas sortis de la bouche de l’ancienne ministre? Comment appeler cette façon de faire? Se projeter dans le cerveau de l’intéressée? Faire de l’exégèse? Dans tous les cas, nous sommes, là, vraiment éloignés de la mission d’informer.
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D’ailleurs, Arancha Gonzalez Laya affirme dans cet entretien que la crise qui a opposé le Maroc à l’Espagne «est un chapitre qui appartient au passé». Mais l’AFP n’en a cure et veut absolument voir la main du Maroc dans tout ce qui ressemble de près ou de loin au scandale de l’espionnage des téléphones qui secoue l’Espagne. Cette agence (placée sous la tutelle du ministère français des Affaires étrangères), relaie très probablement certaines parties en France qui digèrent mal le réchauffement des relations entre le Maroc et l’Espagne et le fait que ces deux pays voisins sont tournés vers une relation du XXIe siècle.
L’appui franc apporté par Madrid au plan d’autonomie du Sahara sous souveraineté du Maroc est qualifié, dans cette même dépêche, de «revirement soudain». «Mettant fin à des décennies de neutralité de l'Espagne, le gouvernement espagnol reconnaît désormais publiquement le plan d'autonomie proposé par Rabat pour cette ancienne colonie espagnole comme la base "la plus sérieuse, réaliste et crédible" pour résoudre ce "différend"», regrette insidieusement l’AFP.
D’ailleurs, pour donner une idée du parti pris de l’AFP dans le traitement de ce dossier, il convient de souligner le caractère sélectif des informations relayées. Quand un ministre espagnol de l’Intérieur, de surcroît en exercice, prend ses distances avec les accusations contre le Maroc, l’AFP regarde ailleurs. Le ministre espagnol de l'Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, a affirmé le lundi dernier à des médias espagnols que les spéculations de certains médias qui pointent le Maroc dans l’affaire Pegasus étaient «inappropriées» et «injustifiées». Et il a ajouté que le Royaume du Maroc était un «partenaire stratégique et absolument loyal». Il n’existe aucune trace des propos du ministre de l’Intérieur espagnol dans le fil de l'AFP. Pourquoi? Parce que les propos de Fernando Grande-Marlaska sont à rebours de la ligne éditoriale biaisée de cette agence de presse.