Depuis quelques jours, à l’instigation des représentations diplomatique et consulaire algériennes en France, les médias porte-voix du régime au pouvoir en Algérie appellent tambour battant les ressortissants de leur pays à participer à une manifestation à Paris.
Organisé à l’occasion de la célébration de la signature des accords d’Evian, le 19 mars 1962, ce rassemblement a officiellement pour but de dénoncer «l’offensive politico-médiatique menée quasi quotidiennement contre l’Algérie et son peuple pour les déstabiliser», rapporte la presse officielle en citant le communiqué des organisateurs, qui disent «refuser toute ingérence étrangère».
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Jusque-là rien de bien nouveau, compte tenu des tensions qui crispent les relations entre l’Algérie et la France et de la panique que sèment dans les cercles du pouvoir à Alger des journalistes et des militants algériens installés en France, actifs sur les réseaux sociaux, et qui ont une audience plus large que les médias de propagande du régime. Mais ce qui était supposé être un rassemblement à la gloire du duo Tebboune-Chengriha était en réalité une manifestation quasi-officielle du régime algérien, organisée en France, pour insulter les Marocains et leur souverain. Cette manifestation, organisée par le «Collectif unitaire franco-algérien», s’est déroulée ce dimanche place du Colonel Fabien, à Paris.
En effet, alors qu’on aurait pu s’attendre à des appels à l’unité de l’Algérie dans le cadre de cette manifestation pro-régime, et alors que le communiqué des organisateurs précisait que les Algériens sont «un peuple attaché à la culture de la paix et l’amitié entre les peuples», c’est à une démonstration de haine anti-marocaine que se sont livrés les quelque cinq cents manifestants.
Au milieu des drapeaux algériens brandis par la foule et du traditionnel slogan algérien «one, two, three, viva l’Algérie» scandé par les manifestants, se sont invités des drapeaux du Polisario mais aussi des pancartes caricaturant le roi Mohammed VI, tantôt brandis par les manifestants, tantôt piétinés au sol.
Des manifestants algériens brandissent des drapeaux de leur pays lors du rassemblement organisé le 19 mars 2023, Place du Colonel Fabien à Paris.. DR
Les slogans anti-marocains ont par ailleurs donné le ton de cette manifestation, qui, à défaut d’être pro-algérienne, était surtout anti-marocaine, car c’est aux cris de «dites à la France que nous ne sommes pas des Mrarkas» que ces ressortissants ont exprimé leur attachement à leur mère patrie. Pourquoi ont-ils tant besoin de rappeler une évidence? C’est la question qui se pose face à cette étrange affirmation de soi par la négation.
On est aussi en droit de se demander pourquoi le Maroc s’est invité dans une manifestation «patriotique» algérienne? Pourquoi l’Algérie, pour défendre ses intérêts en France, a-t-elle besoin de se créer un ennemi marocain? Vraisemblablement parce que la haine à l’encontre du Maroc est le seul ciment qui fait encore tenir debout l’édifice bancal bâti par la junte militaire au pouvoir. Ou encore parce que plutôt que de régler ses comptes directement avec la France, la junte militaire préfère la disculper de ses «torts» en les attribuant au Maroc, un prétendu ennemi qui a décidément bon dos.