C’est durant le deuxième mandat de l’ancien président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz, qu’un groupe d’amitié mauritano-sahraoui a été créé, en juin 2015, au sein du Parlement mauritanien. Cette création avait à l’époque suscité une suspicion puisque le président de groupe, Habib OuldDiah, député d’une circonscription du Sud-Est mauritanien, Monguel, n’avait aucune affinité avec l’ensemble tribal de la région nord de la Mauritanie où se recrutent en général les quelques soutiens du Polisario.
Ce groupe parlementaire est apparemment resté inactif depuis plus de 5 ans, et vient donc d’être dépoussiéré pour faire semblant sinon de venir de naître, du moins de démarrer enfin son activité. Le moment choisi n’est pas anodin: celui de la crise qui sourd entre la Mauritanie et le Polisario à cause de la fermeture par ce dernier du passage d’El Guerguerat, qui constitue le cœur battant d’une bonne partie de l’économie mauritanienne.
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C’est un membre du Polisario, Ahmed Aleyyine, prétendu chargé des «Diasporas du sud», qui vient d’arriver à Nouakchott, officiellement pour présenter les condoléances du Polisario aux membres du l’Union des forces du progrès (UFP), parti de gauche (ex-marxiste), connu pour son soutien au Polisario, même du temps où ce dernier s’attaquait militairement à la Mauritanie (1975-1978). Ces condoléances font suite au décès, le mois dernier dans un hôpital de Tizi Ouzou, de Mohamed El Mustapha Ould Bedreddine, le «Timonier» (comme Mao Zedong) pour les intimes, ex-numéro 2 de l’UFP.
Or ce membre du Polisario était en fait venu pour demander aux trois députés de ce parti (au sein d’un Parlement qui compte 157 élus) de saisir l’occasion de sa présence à Nouakchott pour l’aider à redorer le blason du Polisario en réactivant le groupe d’amitié mauritano-sahraoui, en stand-by à l’Assemblée nationale mauritanienne, et en nommant à sa tête un nouveau président, puisque l’ancien s’est désisté.
Pour rappel, à la mi-octobre, un groupe parlementaire mauritano-marocain a été créé, en présence de l’ambassadeur du Maroc à Nouakchott. Immédiatement après, l’Algérie a exigé la création d’un groupe semblable avec la Mauritanie, également mis sur pied en présence de l’ambassadeur algérien à Nouakchott. Selon le règlement de l’Assemblée nationale mauritanienne, toute réunion d’un groupe parlementaire doit se faire en présence d’un vice-président de l’Assemblée nationale et du ministre chargé des relations avec le Parlement. C’est donc cette entourloupe qui a été utilisée par l’émissaire du Polisario, avant que certains médias mauritaniens avisés ne la mettent à nu.
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Ainsi, selon certains sites, l’information diffusée sur l’activité de ce groupe parlementaire a été sciemment déformée en vue d’induire en erreur l’opinion et faire croire que les Mauritaniens ne nourrissent aucun ressentiment contre le Polisario et ne sont nullement affectés par la crise qu’il a créée à la frontière maroco-mauritanienne.
Pourtant, l’Assemblée nationale mauritanienne a bien déployé un écriteau lors de cette réunion, où il est clairement mentionné qu’il s’agit du «démarrage» des activités, et non pas de la création d’un nouveau groupe parlementaire. Mais l’effet de propagande recherché a fonctionné, puisque plusieurs médias ont été momentanément bernés.
Création ou réactivation, il n’en demeure pas moins que l’exhibition de ce groupe parlementaire d’amitié avec le Polisario est d’autant plus incongrue, que Brahim Ghali vient d’adresser des menaces à peine voilées à la Mauritanie. Pour le chef du Polisario, «la Mauritanie doit rapidement bouger et faire pression sur la France et les Nations unies pour résoudre la crise actuelle. Sinon, en cas de déclenchement des hostilités à ses frontières, toute la région sera certes impactée, mais c’est la Mauritanie qui en paiera le plus lourd tribut». Une menace que l’armée mauritanienne semble avoir prise au sérieux puisqu’un déploiement d’unités militaires à proximité de la zone tampon vient d’être opéré sous la supervision du chef d’état-major adjoint des armées.