Maroc–Chine: un tournant stratégique sur le Sahara?

Nasser Bourita et son homologue chinois Wang Yi, le 19 septembre 2025 à Pékin.

Revue de presseLa visite du ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita à Pékin confirme la dynamique d’une diplomatie marocaine tournée vers la diversification des soutiens internationaux à la marocanité du Sahara. Au-delà des gestes symboliques, le Royaume cherche à traduire ses liens avec la Chine en appui politique. Cet article, est une revue de presse, tirée du quotidien Al Ahdath Al Maghribia.

Le 21/09/2025 à 18h22

Pas à pas, le Royaume consolide sa place sur l’échiquier international, notamment s’agissant du Sahara.

En multipliant les partenariats stratégiques, des États-Unis à plusieurs pays de l’Union européenne, en passant par un dialogue renouvelé avec la Russie, Rabat mise sur la diversification comme levier de puissance.

La récente visite du ministre Nasser Bourita à Pékin (19-20 septembre 2025) s’inscrit dans ce mouvement, indique le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans son édition de ce lundi 22 septembre.

Dans ce sens, cette étape est destinée à institutionnaliser le dialogue stratégique entre les deux pays, par la signature d’un mémorandum et la création d’un mécanisme de dialogue permanent.

Sur le fond, cette intensification des relations sino-marocaines n’est pas nouvelle, a-t-on lu.

La «mise à niveau» stratégique a été amorcée durant la visite royale de 2016, puis renforcée lors de l’étape marocaine du président chinois en 2024.

Ces rendez-vous de haut niveau ont posé les bases d’un partenariat politique et économique qui dépasse aujourd’hui les seuls accords commerciaux et englobe la coordination diplomatique.

Les mots employés lors des entretiens entre Bourita et son homologue chinois (solidarité, confiance, respect mutuel) traduisent une volonté explicite de bâtir une relation d’égal à égal et de diversifier les domaines de coopération: politique, économique, culturel et humain.

Le communiqué conjoint insiste d’ailleurs sur l’ouverture à de nouvelles formes de coordination multilatérale, marque d’un partenariat désormais structuré, écrit Al Ahdath Al Maghribia.

Autre enjeu majeur: la question du Sahara. Le dossier, longtemps marqué par une prudence chinoise, connaît ces derniers mois des signes d’évolution.

Plusieurs indicateurs, comme l’exclusion des représentants du Polisario des principaux forums sino-africains, le ton des déclarations officielles à l’occasion des rencontres multilatérales, ainsi que des analyses stratégiques internationales, alimentent l’hypothèse d’un rééquilibrage progressif de la position de Pékin en faveur de la solution d’autonomie sous souveraineté marocaine.

Pourquoi ce glissement? Plusieurs facteurs convergent, explique le quotidien.

D’un côté, Rabat offre à Pékin un terrain d’investissements attractif (infrastructures, industrie, logistique) et un accès stratégique à l’Europe et à l’Afrique de l’Ouest.

De l’autre, la Chine, attentive à ses intérêts économiques et à sa politique d’influence en Afrique, semble privilégier des partenariats stables et compatibles avec ses projets régionaux.

À cela, s’ajoutent des gestes diplomatiques concrets, là encore les exclusions ciblées des plateaux diplomatiques pan-africains pour les mouvements séparatistes, qui témoignent d’une posture plus lisible et moins permissive envers la milice séparatiste et ses soutiens, notamment l’Algérie.

Le Royaume, lui, continue de jouer la carte d’une diplomatie multilatérale active: en rappelant son attachement au principe de non-ingérence et à la centralité de l’ONU pour la résolution pacifique des conflits, et cherche à faire valoir l’idée que toute normalisation politique passe par la reconnaissance d’une réalité factuelle, l’intégrité territoriale sous un cadre d’autonomie, comme condition d’un partenariat durable.

Ce positionnement, martelé au plus haut niveau, est présenté par le Royaume comme le préalable à tout approfondissement des relations bilatérales.

En filigrane, la diplomatie marocaine mise sur la combinaison d’intérêts: traduire en avantages économiques l’alignement politique, capitaliser sur la multiplication des soutiens occidentaux acquis récemment, et transformer ces gains en nouveaux relais diplomatiques à Pékin et Moscou.

Si ces tendances se confirment, la donne régionale, et la conduite du dossier sahraoui au Conseil de sécurité de l’ONU, pourrait connaître un rééquilibrage significatif, dans les toutes prochaines semaines.

Par La Rédaction
Le 21/09/2025 à 18h22