Mais, il se trouve que notre classe politique ne l’entend pas de cette oreille, et les articles 17 et 18 de notre Constitution sont restés, pour ainsi dire, peu loquaces sur la question.
Mais, en faisant ce constat amer, on pourrait croire qu’il ne s’agit là que de quelques milliers de personnes concernées, là où en réalité, il est question de pas moins de 5,1 millions de Marocaines et de Marocains privés d’un droit élémentaire que la Constitution leur garantit pourtant.
Ni le gouvernement de Benkirane, ni celui d’El Otmani, encore moins celui d’Akhannouch, n’ont jugé utile de donner vie à ces deux articles.
La raison? À en croire nos responsables, il s’agirait avant tout d’un problème logistique et technique, mais aussi de coûts. Pourtant, en 2011, les Marocains du monde ont pu voter durant le référendum pour la nouvelle Constitution. Comme quoi, lorsque la volonté politique est là, l’intendance finit toujours par suivre.
Ainsi, quelle serait la vraie raison d’un tel blocage?
La réponse est très simple: la peur de l’inconnu.
Car les mécanismes qui régissent les élections au Maroc sont connus de tous les acteurs politiques. Si vous avez de bons orateurs, un beau discours, des réseaux et de l’argent, vous pouvez avoir plus au moins la garantie de gagner, ou du moins, de faire un score honorable. De plus, en capitalisant sur un taux d’analphabétisme de 30% et sur un échec catastrophique de notre système éducatif, pas besoin d’être Jules César ou Malcolm X pour pouvoir manipuler les émotions et la colère des gens.
En revanche, concernant les MDM, la réalité est tout autre. Car 33,5% d’entre eux ont fait des études supérieures, et la majorité a grandi ou a longtemps vécu dans des États de droits et des démocraties libérales. Venir ainsi les manipuler avec un discours mielleux et creux ne risque pas d’aboutir à grand-chose.
«En adoptant une posture conservatrice face à cette perspective, notre classe politique préfère s’abriter derrière les mécanismes bien rodés en interne, plutôt que de s’aventurer à intégrer ce vote exogène, vu comme une boîte de Pandore qu’il vaut mieux ne pas ouvrir.»
— Rachid Achachi
Autre élément, personne ne sait exactement comment ils vont voter. Car il n’y pas de précédents, ni d’études ou de sondages suffisamment fiables pour pouvoir se faire une idée sur la question. Certains craignent qu’ils votent majoritairement islamiste, d’autres craignent qu’ils votent à gauche ou à droite. D’autant plus qu’ils sont imperméables à l’influence des notables «Al a’yan» et aux billets bleus.
Ainsi, une sorte de consensus implicite semble régner au sein de notre classe politique. Cette dernière, en adoptant une posture conservatrice face à cette perspective, préfère s’abriter derrière les mécanismes bien rodés en interne, plutôt que de s’aventurer à intégrer ce vote exogène, vu comme une boîte de Pandore qu’il vaut mieux ne pas ouvrir.
Certains politiciens sont allés même plus loin, comme en témoigne la proposition de loi déposée puis retirée par le PJD, visant à interdire aux binationaux, c‘est-à-dire aux MDM, d’accéder à des postes ministériels.
Cette manipulation du PJD n’avait, en réalité, pour dessein, que de susciter la polémique en discréditant certains ministres de la majorité gouvernementale. Ainsi, dans une perspective purement électoraliste, le parti de la lampe n’a eu aucune gêne à instrumentaliser 5 millions de Marocains, en menaçant littéralement de les priver d’un droit constitutionnel.
Une manœuvre qui s’oppose aussi bien au lien d’égalité, de solidarité et d’amour qui nous lie à nos frères et sœurs résidant à l’étranger, qu’à celui qui les lie à notre Patrie et à notre Roi.
Mais par-delà cette question de vote et de participation électorale, laquelle, j’espère, sera réglée avant les législatives de 2026, il me semble important de mettre rapidement l’accent sur un autre aspect de la question, qui va au-delà du simple fait de mettre un bulletin dans l’urne. Car beaucoup de MDM rêvent de pouvoir un jour rentrer au pays afin de participer pleinement à son développement.
Mais plusieurs obstacles semblent se dresser devant eux. L’avis du Conseil économique, social et environnemental fait ressortir cinq principaux problèmes mis en avant par les MDM:
- Corruption, abus d’influence et clientélisme;
- Complexité et lourdeur des services administratifs;
- Manque de visibilité des opportunités;
- Accès limité à l’information;
- Lenteur du système judiciaire.
Mais, qui a dit que cette participation au développement de notre pays devait se limiter au seul aspect économique? Et pourquoi ne pas la penser également sur le terrain politique?
Car, si leurs votes aux législatives apportent un vent de fraîcheur à notre paysage politique, une participation plus importante des MDM en tant que candidats aux élections serait de nature à créer une rupture majeure au sein d’un jeu politique de plus en plus creux et insipide.
Encore faut-il qu’un gouvernement ose franchir le pas en allant au-delà de ses intérêts partisans, afin de mieux servir l’intérêt de la nation.





