Dans une tribune parue dans les colonnes du quotidien arabophone Al Ahdath Al Maghribia du 9 février, l’écrivain-journaliste et politologue Talaâ Saoud Al-Atlassi revient sur les dessous de la visite effectuée le 31 janvier dernier à Pretoria par Sraffan de Mistura, envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU, Antonio Gutteres, au Sahara. Quelle mouche a donc piqué de Mistura? Parachuté en Afrique du Sud, il y a soumis des propositions sur le Sahara marocain à la cheffe de la diplomatie locale. Cette dernière, ravie d’être consultée sur un dossier qui ne la concerne en rien, a promis d’étudier les propositions de Staffan de Mistura et d’y répondre très rapidement.
Pourquoi l’émissaire onusien s’est-il rendu à Pretoria pour discuter du dossier du Sahara sans en informer le Maroc, qui, ayant appris ce projet de visite, a demandé à De Mistura d’y surseoir? En vain, comme l’a expliqué Omar Hilale, ambassadeur du Maroc à l’ONU. Ce qui laisse supposer un entêtement inapproprié de la part du facilitateur onusien, censé prendre en considération les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU qui ont clairement identifié quatre parties concernées par le dossier du Sahara: Maroc, Algérie, Mauritanie et Polisario. L’Afrique du sud n’est donc concernée ni de près ni de loin par le dossier du Sahara, dont elle est éloignée tant géographiquement qu’historiquement.
Sur le dossier du Sahara, Pretoria est en retard d’une guerre. En effet, elle est bernée par un régime algérien qui lui fait fredonner des slogans propagandistes que même le Conseil de sécurité de l’ONU a supprimé de son jargon diplomatique. Mieux, la Russie, supposée être un allié d’Alger, n’a jamais usé de son droit de veto pour bloquer les résolutions sur le Sahara marocain, rédigées par la plume américaine. Ce qui signifie, écrit Al-Atlassi, que ce que Mistura entendra en Afrique du Sud est dépassé.
Reste à savoir ce qu’est venu dire l’émissaire onusien aux autorités sud-africaines. Stéphane Dujardic, porte-parole du SG de l’ONU, qui a défendu la visite de Mistura à Pretoria, affirme qu’elle relève de la diplomatie secrète. Ceci ajoute du mystère aux visées réelles de cette surprenante visite. De surcroit, l’Algérie et le Polisario ont été informés par leur alliés sud-africains du contenu des discussions avec De Mistura. En revanche, le Maroc, dont le plan de règlement du conflit du Sahara a été soutenu par l’écrasante majorité des membres de l’ONU, n’en a pas été informé.
De Mistura devrait faire montre de bonne foi plutôt que de s’emmurer dans une prétendue «diplomatie secrète» en vue de justifier l’erreur monumentale qu’il vient de commettre. Le dossier du Sahara constitue un conflit de très basse intensité, car quasiment réglé. Il ne mérite pas cette lointaine virée, tandis que les regards du monde sont concentrés sur les véritables zones de tensions que sont actuellement l’Ukraine, le Moyen-Orient, le Yémen, le Sahel, le Soudan ou la Corée du nord.
Pour qui roule donc Staffan de Mistura? A moins qu’il ne se soit rendu en Afrique du sud pour l’inciter à convaincre l’Algérie de siéger aux tables-rondes préconisées par le Conseil de sécurité et sans lesquelles De Mistura n’a aucune chance d’avancer dans sa mission.