Autorité de régulation de l'électricité: la polémique enfle, les membres désignés à son conseil sont-ils compétents?

Au perchoir dans l'hémicycle, Hakim Benchamach (à gauche), président de la Chambre des conseillers, et Habib El Malki, président de la Chambre des représentants. 

Au perchoir dans l'hémicycle, Hakim Benchamach (à gauche), président de la Chambre des conseillers, et Habib El Malki, président de la Chambre des représentants.  . DR

La polémique enfle sur la désignation, "mauvaise" ou "juste", des membres de l'Autorité nationale de régulation de l'électricité (ANRE). Les critiques vont-elles virer au scandale? Eléments de réponses.

Le 14/08/2020 à 12h47

Ces mêmes voix critiques pointent aussi les indemnités conséquentes, à partir de 62.618 dirhams par mois, que doit percevoir chacun des membres constituant l'ANRE.

Au lendemain de l'annonce, vendredi dernier, 7 août 2020, de la composition des membres de cette instance, les vives critiques d’abord formulées ont viré vers une dénonciation de "népotisme" dans les six nominations effectuées par les présidents des deux Chambres du Parlement.

Ces voix critiques veulent savoir si les membres choisis répondent en tous points à l'un des principaux critères de leur sélection, à savoir "le professionnalisme et la compétence".

En clair, les six membres de ce conseil, réputés proches de Habib El Malki et de Hakim Benchamach, répondent-ils au profil de sélection, tel que le mentionne la loi 48.15, portant création, en 2016, de l'ANRE, et figurant dans un décret du gouvernement, portant le numéro 2/20/564?

Ces deux textes de loi mentionnent en effet que le choix de chacun des membres de cette autorité doit se faire sur une base essentielle, celle "des compétences et des qualités professionnelles".

Pour être sélectionnés et nommés à cette instance, les candidats doivent ainsi pouvoir se targuer d’une riche expérience en "matière juridique, financière, énergétique et économique".

Or, plusieurs leaders de partis politiques de l'opposition, tels le Parti Authenticité et Modernité (PAM) et le Parti du Progrès et du Socialisme (PPS), ont émis des "doutes" sur les compétences des membres de ce conseil, désignés par les présidents des deux Chambres.

Lors d’un Conseil des ministres, tenu en août 2018, le roi Mohammed VI avait nommé Abdellatif Bardach en tant que président de l'Autorité nationale de régulation de l'électricité.

Un choix judicieux, logique, et approprié, puisque Abdellatif Bardach est un éminent ingénieur qui a, dans l’accomplissement de son travail, déjà fourni les preuves de ses compétences, et ce, durant plus de 20 ans, à l'Office national de l'eau et de l’électricité.

Or, ces voix critiques estiment que le choix des neuf membres de l'Autorité nationale de régulation de l'électricité, notamment ceux de l'Union Socialiste des Forces Populaires (USFP, majorité), du PAM et du Parti de la Justice et du Développement (PJD, majorité), a bien plus obéi à des considérations partisanes, qu’à d'autres critères, plus objectifs. 

Le président de la Chambre des représentants, Habib El Malki, l’un des piliers de l'USFP, a nommé Mehdi Mezouari en tant que membre de ce conseil pour un mandat de six ans.

Cet ancien député doit siéger à ce conseil, au même titre que Mustapha Ajab et Seghir Baali.

Quant au président de la Chambre des conseillers, Hakim Benchamach, il a, du haut de son perchoir, propulsé trois membres du PAM à ce conseil: Ahmed Touhami, lui aussi ancien député, ainsi que Mohamed Badir et Khalid Hannioui.

Les autres membres de ce conseil sont Driss Chater (avocat de profession), Mohamed Mahrouk et Mohamed Bernanou, conseiller PJD du ministre de l'Energie, Aziz Rebbah.

Rappelons que Nabil Benabdellah, secrétaire général du PPS et Abdellatif Ouahbi, secrétaire général du PAM, ont tous deux dénoncé "le copinage", et le "clientélisme" qui ont présidé au choix des six membres susmentionnés, tous leaders des partis de l’USFP, du PAM et du PJD.

Il est ainsi reproché à Habib El Malki et à Hakim Benchamach de n'avoir pas consulté l’ensemble des partis politiques pour trouver des "candidats de consensus".

Quant aux indemnités, jugées à la fois "faramineuses" et "étonnantes" (à partir de 62.618 dirhams par mois), que les membres de ce conseil vont percevoir, la polémique et les débats seront vifs, dès septembre prochain, lors de l'assemblée générale que doit tenir cette instance. Les membres de l’ANRE doivent en effet élire ceux qui seront amenés à siéger lors d’un premier conseil d'administration.

Par Mohamed Chakir Alaoui
Le 14/08/2020 à 12h47