Amina Bouayach: 80% des modes de protestation ne respectent pas les procédures légales

Le360

Revue de presseKiosque360. D’après la présidente du CNDH, l’écrasante majorité des manifestations à caractère social est illégale, leurs instigateurs ne respectant les procédures en vigueur.

Le 05/01/2020 à 18h38

Au Maroc, 80% des modes de protestation ne respectent pas les procédures légales. Les débats naissent d'abord sur les réseaux sociaux avant de s'exprimer, sous forme de manifestions, dans la rue et loin des traditionnelles institutions d’intermédiation. Leurs instigateurs se font généralement l'écho de revendications «collectives et individuelles» et interpellent directement les politiques publiques, sans respecter les normes et les procédures en vigueur. C’est le constat que vient de faire la présidente du CNDH, Amina Bouayach, citée par le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans sa livraison du lundi 6 janvier.

Ces «nouvelles expressions sociales», affirme la présidente du Conseil national des droits de l’Homme, doivent être prises en considération par différents acteurs institutionnels exerçant dans les domaines législatif et politique ou dans celui des droits de l’Homme. D’après Amina Bouayach qui intervenait, samedi, dans le cadre d'une conférence-débat organisée à Salé par la Fondation Fkih Tétouani, le CNDH est préoccupé par ces nouvelles expressions sociales qu’il suit de très près et qu’il essaie d’approcher, non seulement via l’arsenal juridique en vigueur, mais également à travers d’autres outils extralégaux, notamment idéologiques, sociologies, culturels ou encore historiques. L’objectif étant de trouver des solutions équitables et responsables à ces manifestations.

C’est que, relève la présidente du CNDH citée par le quotidien, l’environnement des droits de l’Homme a évolué au niveau international. L’opinion publique internationale est aujourd’hui, poursuit-elle, préoccupée par les problématiques liées au terrorisme, à l’extrémisme et à la haine sociale, mais aussi par les questions de l’asile, de l’émigration et de la mondialisation, ainsi que par les expressions à caractère social qui prennent de plus en plus de l’ampleur. Après avoir passé en revue la politique et l’action du CNDH depuis qu’elle en est la présidente, Amina Bouayach a affirmé que son équipe suivait de près les revendications touchant aux droits de l’Homme au Maroc.

Amina Bouayach a évoqué, à ce propos, les événements d’Al Hoceima, l'affaire de la journaliste Hajar Raissouni condamnée pour avortement illégal et relations extraconjugales avant d’être graciée, ainsi que l’affaire Bouachrine. Dans tous ces cas, affirme-t-elle, le CNDH n’est pas resté dans une position d’observateur. Il a visité des détenus et organisé des séances d’écoute au profit des victimes. Cependant, insiste-t-elle, même si le Conseil suit l’affaire d’Al Hoceima, il ne s’est, à aucun moment, proposé pour jouer le rôle d’intermédiaire. Cela dit, ajoute la présidente, on ne peut parler, dans ce cas, de «détention politique» puisque les manifestations sont sorties de leur cadre pacifique et qu’il y a eu atteinte au droit à la vie et à l’intégrité physique des citoyens. Dans pareille situation, même le droit international cesse de parler de «détention politique».

Dans le cas de Bouachrine, poursuit-elle, l'affaire est surtout liée à l’existence de victimes. «Nous parlons ici du principe de l’application d’une règle de droit, abstraction faite du rang social, de la qualité ou du pouvoir de l’auteur du crime ou des crimes». Le CNDH a néanmoins visité le détenu dans sa prison et planche actuellement sur un rapport le concernant, affirme Amina Bouayach. Pour ce qui est du cas de Hajar Raissouni, le Conseil a réagi immédiatement après son arrestation. Il a même appelé à la révision du code pénal et s’est exprimé ouvertement sur la question de la pénalisation de l’avortement.

Par Amyne Asmlal
Le 05/01/2020 à 18h38