C’est parti pour l’examen du pourvoi en appel formé par le Conseil de l’UE contre le verdict du 10 décembre 2015 annulant partiellement l’Accord agricole Maroc-UE. La Cour de justice européenne a en effet consacré une première audience à la demande européenne d’annuler ce verdict controversé, hier mardi 19 juillet. Et le moins que l’on puisse dire de cette audience, c’est qu’elle a confondu la partie adverse constituée du coordinateur du Polisario auprès de la Minurso, M’Hammed Khaddad.
En effet, les avocats du Conseil de l’UE, Me H.Legal, et de la Commission de l’UE, Me. F. Castillo de la Torre, ont détricoté, l’un après l’autre, les arguments en trompe-l’œil avancés par le Polisario pour contester l’Accord agricole signé en 2012 par le Maroc et l’Union européenne.
Dans sa plaidoirie, Me.H Legal est allé droit à l’essentiel en contestant la légitimité même de la partie plaignante, en l’occurrence le polisario. «Nous avons été échaudés de voir une formation de trois juges reconnaître la représentativité d’une entité comme le Polisario et compromettre les relations économiques et politiques entre l’Union européenne, ses Etats membres et un pays majeur, comme le royaume du Maroc», a indiqué Me. Legal.
Et d’enfoncer ce clou : «Tout laisse à penser que la huitième chambre du tribunal (qui a rendu l’arrêt) s’est laissée instrumentaliser» par une partie qui ne saurait en aucun cas se présenter comme le représentant de la population sahraouie. «L’Union européenne ne reconnaît pas le Polisario comme le représentant des populations du Sahara», a encore martelé la défense du Conseil de l’UE. Et d’ajouter : «L’entité requérante, en l’occurrence le Polisario, ne parvenant pas à obtenir de l’UE une reconnaissance politique, a cherché à la faire établir par la voie judiciaire», a-t-elle démasqué.
Et ce n’est pas tout. «Le Polisario n’est pas un sujet de droit international, n’a pas été reconnu comme mouvement de libération par les organisations internationales et ne s’est vu reconnaître de capacité légale que pour la participation à une procédure de règlement de différend», précise la défense du Conseil de l’UE.
Mais ce n’est pas de cet œil que l’ont vu les magistrats de la Cour européenne, à l’origine du verdict en question. «En accueillant le verdict, le tribunal s’est de fait posé en autorité à même d’établir pour l’Union la représentativité des mouvements de libération nationale», a déploré la défense, en demandant l’annulation purement et simplement de ce verdict qui risquerait d’impacter négativement les relations l’Union européenne et le royaume du Maroc.
«Le rôle conféré par les Nations unies au Polisario n’en fait pas le représentant exclusif, ni même le représentant» des populations du Sahara (…) il est seulement une des parties à un différend et au processus destiné à le résoudre (…) ses intérêts et les intérêts du territoire sont distincts», a affirmé la défense du Conseil de l’UE.
«Mesurons-en les conséquences, n’importe quelle officine ou groupuscule opposant au gouvernement d’un Etat tiers s’en prendrait par ce biais aux accords avec l’Union, dissuadant les Etats concernés de contracter avec nous pour ne pas offrir une tribune contentieuse à leurs adversaires», a-t-elle mis en garde.
Vous avez dit «exploitation des richesses du Sahara» ?Rétorquant à une allégation séparatiste selon laquelle les populations du Sahara ne jouiraient pas des richesses de la région, Me. Legal a précisé que le Conseil de l’UE «ne disposait d’aucune indication à la date de la décision annulée, pas plus qu’il n’en dispose aujourd’hui, lui permettant de conclure que l’accord pouvait s’avérer néfaste pour la population du Sahara et de ses habitants».
Pour sa part, Me. de la Torre, a infirmé l'argument brandi par le Polisario, qui justifiait la recevabilité de sa requête par des accords passés, notamment avec la Mauritanie. «Ces accords, a-t-il fait remarquer, portent uniquement sur l'arrêt des hostilités, mais n'impliquent nullement une quelconque capacité juridique pour conclure d'autres types d'accords, encore moins pour faire des recours devant des juridictions de pays tiers, comme c'est le cas avec l'UE».
«Aidons le Conseil à continuer à se consacrer à l’exercice de ses fonctions politiques, notamment en ce qui concerne la politique commerciale commune sans être paralysé par une obligation d’entendre les récriminations de toutes les oppositions politiques de la planète qui tueraient cette politique », a exhorté Me Legal, qui a demandé à la fin de l’audience l’annulation du verdict de la Cour européenne.
Les délibérations consécutives à cette audience prennent effet dès ce mercredi 20 juillet, à charge pour la Cour européenne de rendre ses conclusions le 13 septembre prochain. Pour le verdict, il sera rendu en novembre.