Le candidat à la présidentielle mauritanienne du 22 juin prochain, Mohamed Ould Ghazouani, a choisi son passage en pleine campagne électorale devant un électorat à majorité négro-africain à Kaédi (région du fleuve Sénégal), pour dénoncer la facilité avec laquelle certains Sahraouis ont pu acquérir des documents d’état civil mauritaniens.
«C’est un crime contre nous-mêmes, et contre les originaires du Sahara occidental, qu’ils viennent surtout de Tindouf ou d’un Etat [le royaume du Maroc, Las Palmas, Touaregs du Mali, Ndlr], qui ont pu acquérir indûment des papiers mauritaniens, ce qui est anormal».
Cette réaction du candidat du pouvoir, et très probablement le futur président mauritanien, n’intervient pas seulement en réponse aux nombreuses critiques de Mauritaniens sur les réseaux sociaux, qui refusent le «bourrage» des listes électorales, mais elle a également d’autres portées.
D’une part, il s’agit de rassurer les négro-Africains mauritaniens, qui font face à des mesures draconiennes pour se procurer eux-mêmes des documents de leur propre pays, et qui ne peuvent qu’être outrés devant la facilité avec laquelle l’actuel président Mohamed Ould Abdelaziz a délivré à tour de bras des dizaines de milliers de cartes nationales mauritaniennes à des Sahraouis de Tindouf, installés dans le nord du pays (Zouerate, Bir Moghrein, Nouadhibou) et à des Touaregs venus du nord du Mali.
Si ce vivier électoral a permis à Ould Abdelaziz de gagner toutes les élections et référendums qu’il a initiés, parfois avec des scores à la nord-coréenne, les Négro-africains mauritaniens y ont vu, à juste titre, une façon de créer un déséquilibre ethnique en faveur de la communauté maure et de les marginaliser davantage.
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L’autre raison qui explique cette réaction de Ould Ghazouani, c’est que l’un de ses principaux challengers n’est autre que Mohamed Ould Maouloud, président de l’Union des forces de progrès (UFP). Or ce parti est celui des anciens gauchistes maoïstes mauritaniens, appelés localement les «Kadihhines», et dont certains leaders ont participé à la création du Polisario, en 1973, dans la ville mauritanienne de Zouerate.
D’ailleurs, les comptes sur les réseaux sociaux du Polisario auraient déjà appelé à voter pour ce candidat, qu’ils considèrent comme leur étant très favorable.
Ce n’est d'ailleurs pas un hasard, là non plus, que Mohamed Ould Maouloud, un professeur universitaire lauréat de la Sorbonne, ait justement choisi de lancer sa campagne dans le nord de la Mauritanie, où il a organisé, dimanche dernier, un meeting précisément à... Zouerate.