Un visa contre une OQTF: Sarkozy pour l’intransigeance envers Alger et la fin des accords de 1968

L'ancien président français Nicolas Sarkozy et le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

L'ancien président français Nicolas Sarkozy et le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.. AFP or licensors

Face à un régime algérien figé dans l’arrogance et la provocation, l’ancien président de la République française Nicolas Sarkozy réclame la fin des privilèges accordés à Alger et des accords de 1968. Il appelle Paris à un sursaut de fermeté, notamment moyennant «un visa délivré pour un OQTF repris». Et à la condition préalable que l’écrivain Boualem Sansal et le journaliste Christophe Gleizes soient libérés.

Le 04/09/2025 à 13h32

La crise entre la France et l’Algérie continue de s’enliser. Plus d’une année de tensions ininterrompues a suffi à démontrer que le régime algérien, prisonnier de ses contradictions, persiste dans une politique de défi permanent vis-à-vis de Paris. Dans ce climat empoisonné, la voix de Nicolas Sarkozy, ancien président de la République française, résonne avec une vigueur particulière. En déclarant que la situation n’est plus tenable et en appelant à davantage de fermeté face à Alger, Sarkozy met le doigt sur une anomalie historique: la complaisance française face à un régime autoritaire qui n’offre ni stabilité intérieure, ni respect du droit international, ni coopération sincère avec son partenaire historique.

Depuis l’été 2024, Alger multiplie les provocations: refus de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière, blocage sur les expulsions d’individus condamnés ou fichés dangereux, harcèlement d’opposants algériens réfugiés en France, détention de citoyens français ou franco-algériens, dont les plus illustres sont l’écrivain Boualem Sansal et le journaliste Christophe Gleizes… Les écarts, et c’est peu dire, ne manquent pas.

Face à cette attitude, Nicolas Sarkozy refuse les demi-mesures. Dans un entretien au quotidien Le Figaro du mercredi 3 septembre 2025, il souligne l’incohérence du président Emmanuel Macron, dont la gestion du dossier est jugée «incompréhensible». «J’ai le regret de dire que la position de la France est difficilement compréhensible. Je croyais que les affaires étrangères appartenaient au domaine réservé du président de la République, or ce domaine réservé a été délégué à un premier ministre en sursis, via une lettre comminatoire réclamant plus de fermeté vis-à-vis de l’Algérie! Et pour quel résultat? Aucun», a-t-il affirmé. L’ancien président français en veut pour preuve que Boualem Sansal et Christophe Gleizes sont toujours en prison. «Ce n’est plus acceptable», a-t-il dit.

Sarkozy n’y va pas de main morte: un autre langage s’impose vis-à-vis d’Alger. Les accords de 1968, qui offrent aux Algériens des avantages migratoires uniques, doivent être dénoncés. Pourquoi maintenir un régime d’exception alors que l’Algérie refuse toute réciprocité? «Il est temps de mettre un terme à une anomalie: les accords de 1968 n’ont plus lieu d’être. Il n’y a aucune raison de maltraiter l’Algérie davantage que les autres pays, mais il n’y a plus aucune raison de l’avantager non plus», a-t-il expliqué, sobrement. Ce discours, qui n’est ni celui de l’extrême droite ni celui d’une politique anti-algérienne, marque une rupture. Sarkozy refuse la complaisance et réclame la normalisation. Ni traitement de faveur, ni traitement discriminatoire, simplement la fin d’un privilège indu.

Le cœur du débat se joue autour des accords de 1968. Hérités de l’histoire coloniale, ils sont perçus par le régime comme un «acquis historique». Mais dans les faits, ils ne sont qu’un vestige dépassé, inadapté aux réalités migratoires et politiques actuelles. Sarkozy le comprend. En s’attaquant à ce symbole, il touche le régime au vif. Finalement non pas pour humilier l’Algérie, mais pour contraindre ses dirigeants à sortir de leur posture rentière.

Pour ramener le régime d’Alger à de meilleurs «sentiments», ce ne sont pas les leviers qui manquent, préconise Sarkozy. Chaque année, plus de 250.000 visas sont accordés aux Algériens, alors même que le régime refuse de reprendre ses propres ressortissants en situation irrégulière, souvent condamnés pour des délits graves en France. «À ma connaissance, depuis janvier dernier, l’Algérie n’a repris aucun de ses ressortissants en situation irrégulière. Il faut donc se montrer infiniment plus ferme et drastique sur la délivrance des visas», lit-on dans l’entretien du Figaro.

«Imposer, enfin, une réciprocité»

La proposition de Sarkozy est claire et implacable: instaurer un principe de donnant-donnant. Un visa délivré en échange d’un geste de bonne volonté. À défaut, fermer le robinet des visas. La méthode peut être très simple. «Par exemple, en posant cette règle simple: un visa délivré pour une OQTF reprise. Ou même 5 ou 10 visas par OQTF. Pour imposer, enfin, une réciprocité. Et à la condition préalable, bien sûr, que nos deux compatriotes soient libérés», propose l’ancien chef d’Etat.

Si Sarkozy frappe juste, c’est parce que le régime algérien s’est enfermé dans une contradiction mortifère. À l’intérieur, il s’accroche à un pouvoir discrédité, verrouille toute opposition, réprime la société civile et continue de s’appuyer sur la rente énergétique pour acheter une paix sociale fragile. À l’extérieur, il multiplie les postures hostiles (vis-à-vis du Maroc, de la France, de l’Union européenne, entre autres) et les discours victimaires. L’affaire des OQTF illustre ce déni de réalité. Alors que l’Algérie déplace brutalement, sans formalité ni humanité, des migrants subsahariens dans le désert, elle refuse à la France le rapatriement de ses propres ressortissants délinquants. Cette duplicité alimente le constat de Sarkozy. Alger n’entend que le langage du rapport de force.

La critique de Sarkozy vise également Emmanuel Macron. En confiant le dossier algérien à un Premier ministre fragilisé, en multipliant les gestes symboliques sans effet concret, le président envenime la crise sans la résoudre. Résultat: une France perçue comme faible et une Algérie enhardie dans son arrogance. «J’entends qu’il faudrait faire confiance à la bienveillance et à l’humanité du président algérien, mais elles se font pour le moins attendre... La situation n’est plus tenable. Soyons aussi fermes avec l’Algérie qu’elle se permet de l’être avec une France qui donne le sentiment désagréable de ne plus savoir faire respecter le droit international et les droits de l’homme», explique encore Nicolas Sarkozy.

Cette position pourrait bien préfigurer ce que sera, demain, la ligne française face à un régime algérien dont l’irresponsabilité et l’humanité deviennent insoutenables. La libération des détenus franco-algériens, la reprise des OQTF et la révision des accords de 1968 sont autant de tests de vérité. Le cas échéant, le régime d’Alger doit choisir: la pleine coopération ou l’impasse. Mais une chose est d’ores et déjà sûre, le temps des illusions est révolu.

Par Tarik Qattab
Le 04/09/2025 à 13h32