Trump, un «débile», un «cowboy», «sa place est à l’asile»: quand la diplomatie algérienne sombre dans la bouffonnerie

Le président américain Donald Trump et l'Algérien Abdelmadjid Tebboune.

Le président américain Donald Trump et l'Algérien Abdelmadjid Tebboune.

En diplomatie, il y a les mots qui apaisent, ceux qui construisent… et puis il y a les insultes d’un ambassadeur algérien en roue libre. À Beyrouth, Kamel Bouchama a transformé une conférence culturelle en stand-up diplomatique, où l’histoire s’invente et où Donald Trump devient la cible d’un torrent d’injures. Résultat: une Algérie ridiculisée, un Liban embarrassé et une diplomatie voisine qui touche le fond.

Le 30/09/2025 à 09h09

On ne saura probablement jamais ce qui est passé par la tête de Kamel Bouchama, ambassadeur d’Algérie au Liban. Mais ses propos injurieux à l’égard du président américain Donald Trump ont franchi toutes les limites, y compris celles séparant la raison du délire. L’attaque est brutale, gratuite, et d’autant plus choquante qu’elle émane d’un diplomate censé représenter son pays avec dignité et retenue. Au lieu de cela, l’Algérie s’expose au ridicule international et hypothèque ses fragiles relations avec Washington.

Kamel Bouchama, ambassadeur d'Algérie au Liban.

Nous sommes le 23 septembre 2025 à Beyrouth. Dans un discours interminable, truffé de références dithyrambiques à la «grande Algérie éternelle», Kamel Bouchama, ambassadeur d’Algérie accrédité au Liban, revisite l’histoire à sa manière, allant jusqu’à annoncer que le nombre de «martyrs» de la guerre d’indépendance s’élèverait désormais à… 20 millions. Mais le pire restait à venir. Parlant de la situation à Gaza, le diplomate s’en prend directement à Donald Trump, cité nommément le «grand zaïm» qu’il qualifie de «débile», de «fou à lier» et de «cowboy dont la place est dans un asile psychiatrique, mais qui se retrouve à la tête de la première puissance mondiale». Voilà mot pour mot l’«analyse» lumineuse servie par un représentant officiel de l’Algérie.

Le lieu comme la circonstance rendaient une telle diatribe totalement inappropriée. Ce dérapage s’est produit lors d’une conférence culturelle intitulée «Liban et Algérie: histoire rayonnante et présent lumineux», censée célébrer les liens historiques et culturels entre les deux pays. Mais comment parler de «présent lumineux» quand l’événement se transforme en tribune d’insultes? C’est compter sans le style «Tebboune», où l’improvisation maladroite et le populisme outrancier tiennent désormais lieu de ligne diplomatique.

Faut-il être surpris? Pas vraiment. Kamel Bouchama, né en 1943, ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, diplomate chevronné, auteur prolifique, connaît les usages et sait le poids des mots. Mais l’exemple vient d’en haut dans un système où la posture remplace la pensée, l’excès devient méthode et l’injure, un mode de communication. L’Algérie ne se contente plus d’une diplomatie approximative: elle l’assume dans l’insulte et l’inconséquence.

Ce dérapage n’est pas seulement une honte pour Bouchama, mais une erreur stratégique pour Alger. D’abord vis-à-vis du Liban, pays hôte, sommé de tolérer un tel comportement sur son sol. Ensuite vis-à-vis des États-Unis, dont la stratégie en Afrique du Nord repose sur un pragmatisme bien éloigné des vociférations algériennes: coopération sécuritaire, énergie, lutte antiterroriste. L’Algérie, qui se réjouissait encore récemment de l’intérêt américain pour son gaz et ses ressources minières, vient de réduire à néant ses efforts de communication.

La responsabilité de l’Algérie est engagée. «Un diplomate est représentant officiel de son État. Ses actes officiels, y compris ses interventions publiques, engagent donc l’État qu’il représente. Si un diplomate profère des insultes ou des propos offensants envers un autre pays, ses institutions et ses dirigeants, cela peut être interprété comme une manifestation officielle de la position de son État, même si l’État n’a pas explicitement autorisé ces propos», explique cet expert en diplomatie.

Mieux, «un État a également une responsabilité par omission s’il ne contrôle pas ou ne sanctionne pas les agissements de ses diplomates. Par exemple, si un diplomate profère des insultes et que son État ne prend aucune mesure corrective (ex. rappel du diplomate, excuses officielles), cela peut être perçu comme une tolérance de ses propos, ce qui accentue la responsabilité diplomatique de l’État», apprend-on. Pour l’heure, c’est silence radio à Alger.

La vraie question est donc simple: Washington va-t-il laisser passer un tel affront? Le Liban va-t-il expulser un diplomate qui insulte un chef d’Etat à partir de son sol? L’Algérie, qui tente par tous les moyens de dissimuler l’incident, mise sans doute sur l’oubli. Mais à ce niveau d’irresponsabilité, rien n’est moins sûr.

Car ce qui est sûr, en revanche, c’est que la diplomatie algérienne vient d’atteindre un sommet de bassesse. Quand les chancelleries du monde s’efforcent d’agir avec prudence et finesse, Alger s’illustre dans l’insulte de caniveau. Une diplomatie qui confond tribune internationale et café du commerce, qui préfère l’anathème à l’argument, et qui croit exister en hurlant plus fort que les autres. Bref, une diplomatie au ras du sol, bruyante, vulgaire et pathétiquement insignifiante. Nul doute que là encore, il faudra que l’ambassadeur d’Alger à Washington, Sabri Boukadoum, «achète» un entretien avec un support médiatique américain «ami» et ouvre le chéquier national pour racheter une virginité perdue à la diplomatie de son pays. C’est somme toute la méthode algérienne: montrer sur ses plus grands chevaux avant d’en descendre sur quatre pattes.

Par Tarik Qattab
Le 30/09/2025 à 09h09