Tribune. Gaza, Tebboune et la mouche du coche

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune.

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune.

TribuneEn somme, tous ces gens-là (Trump, Netanyahou, les dirigeants de Hamas, Al-Sissi, Erdogan, MBS, le roi de Jordanie, le président indonésien…) n’ont fait que mettre en œuvre les directives qu’Alger leur avait obligeamment mandées.

Le 12/10/2025 à 15h14

Si le ridicule tuait, Tebboune et les caporaux qui l’agitent dans tous les sens comme une marionnette bedonnante seraient depuis longtemps au Ciel des nuisibles. On savait que ces gens-là ne connaissent ni honte ni vergogne, mais le dernier communiqué du ministère des Étranges Affaires d’Alger dépasse toutes les limites du grotesque. D’abord, ce titre qui barre la Une d’une feuille aux ordres… «Gaza: l’Algérie fixe ses conditions.» On se frotte les yeux. On croit rêver. Mais non, on a bien lu.

L’Algérie fixe ses conditions!

Rappelons que l’accord de cessez-le-feu entre Israël et Hamas a été obtenu après une intense pression exercée par Trump lui-même sur Netanyahou, d’un côté, et de l’autre par l’Égypte, Qatar et la Turquie sur Hamas. D’autres pays (la Jordanie, l’Arabie saoudite et même la lointaine Indonésie) ont pris part aux tractations.

Où était l’Algérie dans ce casting? Nulle part. Inexistante. Oualou. Le néant. Personne ne l’a sonnée. On ne lui a rien demandé. On n’a même pas pensé à elle.

Et pourtant, dès l’accord signé, l’Étrange Ministère des Affaires d’Alger y allait de son communiqué, avec le style pompeux, boursouflé, endimanché de celui qui tient à prouver qu’il sait écrire le français – pathétique retour du refoulé de celui qui, au fond, n’a toujours pas avalé de ne plus être ‘deuxième francesse’ depuis 1962…

Lisons, éberlués. Le communiqué exprime l’accueil favorable d’Alger au cessez-le-feu et à l’introduction urgente des aides humanitaires et de secours (pourquoi cette répétition?) destinées au secteur (?) de Gaza. Le ministère souligne que ces deux points constituent des «revendications que l’Algérie (…) a longtemps portées» pour mettre fin aux souffrances de la population palestinienne. Ce satisfecit partiel conforte la légitimité des appels précédents d’Alger sur la scène internationale en faveur d’un allègement (?) humanitaire.

En somme, tous ces gens-là, tous ces nains (Trump, Netanyahou, les dirigeants de Hamas, Al-Sissi, Erdogan, MBS, le roi de Jordanie, le président indonésien…) n’ont fait que mettre en œuvre les directives qu’Alger leur avait obligeamment mandées.

Et ça continue. «Les conditions posées par Alger pour un tel règlement sont claires et conformes à sa doctrine historique.»

Les conditions posées par Alger!

Tout cela ne vous rappelle rien? Mais oui: la fable de La Fontaine intitulée Le Coche et la Mouche.

L’attelage suait, soufflait, était rendu./ Une mouche survient, et des chevaux s’approche;/ Prétend les animer par son bourdonnement;/ Pique l’un, pique l’autre, et pense à tout moment/ Qu’elle fait aller la machine.

Ainsi Tebboune, qui avait jadis proclamé «La Palestine, je m’en occupe!» et n’avait rien fait ensuite, a pris exemple sur la mouche du coche. Aussitôt que le char chemine,/ Et qu’elle voit les gens marcher,/ Elle s’en attribue uniquement la gloire.

Vous verrez. Quand l’affaire du Sahara marocain sera réglée, on verra Tebboune brailler, de son palais présidentiel ou d’une cellule de prison: Respirons maintenant/ J’ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.

Et en attendant qu’un maton vienne lui servir son dîner à 6 heures, avant l’extinction des feux, il retournera s’adonner à son passe-temps favori: attraper les mouches, ses semblables, ses sœurs.

Par Sanaa Berrada
Le 12/10/2025 à 15h14