«La Russie veut l’arrêt total et définitif du conflit, la condition pour cela est (...) le retrait total de tous les soldats ukrainiens des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk et des régions de Zaporijjia et de Kherson», a dit le président russe devant la presse à l’issue de sa rencontre avec le Premier ministre hongrois Viktor Orban, qui occupe actuellement la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne, réitérant ses exigences déjà balayées mi-juin par Kiev et les Occidentaux.
«Il reste de nombreuses étapes à franchir» pour «mettre fin à la guerre» et «instaurer la paix», a pour sa part déclaré le dirigeant hongrois, aux côtés de Vladimir Poutine. «Il y a de moins en moins de personnes qui peuvent parler à tous les belligérants, et la Hongrie» est en mesure de le faire, a-t-il assuré.
Le président russe a profité de la visite non annoncée de M. Orban, son principal allié dans l’Union européenne, pour mettre Bruxelles dans l’embarras: au début de cette rencontre, il a assuré que le Premier ministre hongrois était arrivé à Moscou «non seulement en tant que partenaire de longue date mais aussi en tant que président du Conseil» de l’Union.
L’ambiguïté de la double casquette de M. Orban a hérissé les partenaires européens de Budapest, qui affichent un soutien sans faille à Kiev depuis le début de la guerre en Ukraine en février 20252. Pour le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, M. Orban «ne représente donc pas l’UE, en aucune manière».
«La présidence tournante de l’UE n’a pas de mandat pour engager le dialogue avec la Russie au nom de l’UE», avait écrit sur X dès jeudi soir -à l’annonce officieuse de ce déplacement à Moscou de M. Orban- Charles Michel, le président du Conseil européen, qui rassemble les dirigeants des Vingt-Sept.
Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dimitri Peskov, a ironisé en disant qu’il n’appartenait pas à Moscou de comprendre la «subtilité des pouvoirs» à Bruxelles.
Alors que se profile le prochain sommet de l’Otan, son secrétaire général, Jens Soltenberg, a insisté sur le fait que «Viktor Orban ne représente pas l’Otan à ces rencontres, il représente son propre pays», indiquant que l’Alliance avait été simplement «informée» de ce déplacement.
Kiev, qui entretient des relations compliquées avec Budapest, a fustigé ce déplacement à Moscou qui a été décidé «sans aucun accord ou coordination avec l’Ukraine». «Nous rappelons que, pour notre pays, le principe “pas d’accord sur l’Ukraine sans l’Ukraine” reste inviolable», a martelé la diplomatie ukrainienne.
La Maison Blanche s’est quant à elle dite «préoccupée par le choix qu’a fait le Premier ministre Orban de faire ce voyage à Moscou», par la voix de sa porte-parole Karine Jean- Pierre. Elle a jugé que cela «ne fera pas avancer la cause de la paix» et que cet déplacement était même «contre-productif pour le soutien à la souveraineté, à l’intégrité territoriale et à l’indépendance de l’Ukraine».
Seul, au sein de l’UE, le Premier ministre populiste slovaque Robert Fico a exprimé son «admiration» pour la démarche de son homologue hongrois, arguant qu’il n’y avait «jamais assez de discussions ou d’initiatives sur la paix» et assurant qu’il aurait «beaucoup aimé se joindre à lui».
Lors d’un récent déplacement à Kiev, M. Orban avait jugé que l’Ukraine devait accepter un cessez-le-feu, un préalable rejeté par les Occidentaux et par l’Ukraine qui réclame une «paix juste» passant par le retrait des troupes russes et le respect de son intégrité territoriale.
La présidence tournante au sein de l’UE, qu’assure la Hongrie jusqu’à la fin de l’année, permet au pays qui la détient de contrôler l’ordre du jour des réunions des 27, à l’exception de celles des ministres des Affaires étrangères. Budapest avait promis d’assurer une présidence «normale», malgré les nombreux différends, en particulier sur la Russie, qui l’opposent à ses partenaires.