«Je ne cherche qu’une chose et c’est de vous convaincre que Tariq Ramadan est innocent», a lancé son avocate Yaël Hayat devant le Tribunal correctionnel de Genève, qualifiant l’histoire de «folle». Âgé de 60 ans, M. Ramadan, figure charismatique et contestée de l’islam européen, nie toute relation sexuelle et se dit victime d’un «piège».
L’avocat de la plaignante, qui accuse l’islamologue suisse de l’avoir violée en 2008 à Genève, a de son côté dénoncé un acte de «torture et barbarie» pour convaincre les juges de condamner le prédicateur. Le jugement est attendu le 24 mai.
Lors de ses déclarations finales devant le tribunal genevois, Tariq Ramadan a demandé aux magistrats de ne pas le juger sur son «idéologie réelle ou supposée» et de ne pas se laisser «influencer par le bruit médiatique et politique qui vient de France», pays où il est menacé d’un procès en France pour des faits similaires. «Oubliez que je suis Tariq Ramadan», leur a-t-il lancé.
«Ramadanphobie» et #MeToo
«Brigitte» avait une quarantaine d’années au moment des faits. Elle a porté plainte seulement dix ans après les faits, encouragée alors, a-t-elle expliqué mardi, par les plaintes déposées en France. Durant sa plaidoirie, à laquelle la plaignante n’a pas assisté, Me Hayat a accusé ces femmes d’avoir tissé des liens pour faire tomber Tariq Ramadan, parlant d’une véritable «Ramadanphobie».
Dénonçant les dérives du mouvement #MeToo qui, selon elle, «nourrit une sorte d’activisme victimaire», la pénaliste a mis en garde les juges contre le risque d’«erreur judiciaire». Autre avocat de la défense, Me Guerric Canonica a lui énoncé les «invraisemblances» dans le récit de la plaignante qui doivent «amener en elles-même à écarter toute condamnation». «Appliquer la loi, c’est acquitter Tariq Ramadan», a-t-il dit en concluant sa plaidoirie.
Selon Me François Zimeray, avocat de la plaignante et spécialiste des droits humains, cette affaire va tout simplement «au-delà du viol». «Il y a des violeurs dont la satisfaction des instincts passe par la souffrance de leur victime. C’est le cas de Tariq Ramadan», a-t-il assuré, le qualifiant de «violeur manipulateur». Il a également indiqué que sa cliente n’a pas voulu faire de ce procès «le combat d’un genre contre un autre» mais «le procès d’une nuit».
«Viol à trois reprises»
Les deux parties s’accordent à dire que M. Ramadan et la plaignante ont passé la nuit ensemble dans la chambre d’hôtel, qu’elle a quitté tôt le matin. M. Ramadan assure que c’est la plaignante qui s’est invitée dans sa chambre, puis s’être laissé embrasser, avant de mettre fin à l’échange rapidement.
Selon l’acte d’accusation cependant, il s’est rendu coupable de «viol à trois reprises» dans la même nuit et de «contrainte sexuelle». «Elle a bien dit la vérité», a assuré l’avocat principal de la plaignante, Robert Assaël, ajoutant: «Est-ce que l’on peut inventer pareille histoire avec autant de détails?»