L’armée israélienne a bombardé plusieurs secteurs de la bande de Gaza, notamment la ville de Rafah, où elle se prépare à une vaste opération terrestre, malgré les mises en garde de la communauté internationale.
Des combats ont eu lieu au nord du camp de réfugiés de Nousseirat, dans le centre de la bande de Gaza, selon des témoins. Des correspondants de l’AFP et des témoins ont fait état par ailleurs de tirs d’artillerie et de frappes aériennes sur le quartier de Zeïtoun, dans le sud de la ville de Gaza. Le ministère de la Santé du Hamas a dénombré 43 morts en 24 heures.
De nombreuses capitales et organisations humanitaires redoutent, en cas d’offensive, un bain de sang dans cette ville du sud de la bande de Gaza frontalière avec l’Égypte, refuge pour près d’un million et demi de Palestiniens, en grande majorité des déplacés.
Le porte-parole du gouvernement israélien, David Mencer, a annoncé jeudi que le cabinet de guerre s’était réuni pour discuter de cette offensive. Plusieurs médias israéliens, citant des responsables sans donner leur nom, ont rapporté que le cabinet avait également évoqué un nouveau projet de trêve associée à une libération d’otages, avant une visite prévue vendredi d’une délégation égyptienne.
Un responsable politique du Hamas, Ghazi Hamad, a de son côté assuré jeudi à l’AFP depuis le Qatar qu’un assaut sur Rafah ne permettrait pas à Israël d’obtenir «ce qu’il veut», «éliminer le Hamas ou récupérer» les otages. Le Hamas a averti «l’Égypte et le Qatar», deux des pays médiateurs dans le conflit avec les États-Unis, ainsi que «d’autres pays» du «danger que représente une invasion de Rafah», a-t-il souligné.
Dans cette ville au sud de la bande de Gaza, des rescapés tentaient jeudi de récupérer des objets dans les décombres. «Assez de destruction, assez de guerre. Assez de sang versé d’enfants, de femmes, de personnes âgées et de civils non armés (...) c’est allé trop loin (...) Laissez les gens vivre», a lancé l’un d’eux, Samir Daban, au milieu des gravats.
Selon des responsables égyptiens, cités par le Wall Street Journal, Israël se prépare à déplacer les civils de Rafah vers la ville proche de Khan Younès, notamment, où il prévoit d’installer des abris et des centres de distribution de nourriture. Cette évacuation durerait deux à trois semaines et serait menée notamment en coordination avec les États-Unis, l’Égypte et d’autres pays arabes, selon ces responsables.
Joel Flynn has more on how Israel plans to carry out massive evacuation of civilians from Rafah ahead of its planned ground invasion pic.twitter.com/OndQvgFS97
— TRT World Now (@TRTWorldNow) April 25, 2024
La Défense civile de Gaza a affirmé avoir exhumé depuis samedi plus de 392 corps de personnes tuées et enterrées par les forces israéliennes dans des charniers à l’intérieur de l’hôpital Nasser, à Khan Younès. Parmi eux se trouveraient des cadavres de femmes et de jeunes enfants aux mains liées derrière le dos, laissant penser à des exécutions sommaires lors de l’assaut sur ce complexe hospitalier.
L’ONU a réclamé une enquête internationale sur ces fosses communes découvertes dans les deux principaux hôpitaux al-Chifa à Gaza et Nasser à Khan Younès, demande à laquelle l’Union européenne a apporté son soutien.
L’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien a entraîné la mort de plus de 1.170 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes.
En représailles, Israël pilonne sans relâche depuis près de 7 mois la bande de Gaza, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opérations terrestres de l’armée israélienne ont fait 34.305 morts palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, et près de 77.000 blessés, selon le dernier bilan publié par le ministère de la Santé du Hamas.
L’armée israélienne conduit également des opérations militaires en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 et où le Hamas n’est pas représenté. Depuis le 7 octobre 2023, au moins 486 Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes ou des colons en Cisjordanie, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.
Jeudi, des proches d’otages ont une nouvelle fois manifesté à Tel-Aviv, pour faire pression sur le gouvernement afin qu’il obtienne leur libération. Certains avaient les mains liées et teintées de rouge, la bouche couverte d’un sparadrap marqué du chiffre «202», le nombre de jours écoulés depuis le 7 octobre, ou portaient une pancarte avec les mots «Un accord sur les otages maintenant».
Les dirigeants de 18 pays, dont les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et le Brésil, ont appelé jeudi le Hamas à «la libération immédiate de tous les otages». «L’accord sur la table pour libérer les otages permettrait un cessez-le-feu immédiat et prolongé à Gaza», affirme le texte.
Un port en construction
Alors que les 2,4 millions d’habitants du territoire palestinien assiégé sont confrontés à un désastre humanitaire, les États-Unis ont commencé à construire un port temporaire et une jetée face au littoral de Gaza, qui permettra à des navires militaires ou civils de déposer leurs cargaisons d’aide.
Le président américain Joe Biden avait annoncé début mars la construction d’un port artificiel face aux difficultés d’acheminement de l’aide internationale par voie terrestre depuis l’Égypte, en raison des opérations militaires israéliennes, mais aussi à cause des contrôles très restrictifs imposés par Israël, plusieurs camions d’aide étant bloqués depuis plusieurs semaines à l’entrée du passage de Rafah, côté égyptien.
«À seulement 50 kilomètres de la bande de Gaza, de l’aide et des équipements vitaux, y compris du matériel de dessalinisation de l’eau, des kits de première urgence, des bonbonnes d’oxygène et des toilettes mobiles (...) restent en souffrance dans des entrepôts, interdits d’entrée à Gaza sous prétexte qu’ils peuvent être utilisés par des combattants», a affirmé jeudi Francesca Albanese, rapporteur spéciale de l’ONU pour les Territoires palestiniens.