L’armée israélienne a poursuivi ses bombardements sur Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, et sur Rafah, ville où se réfugient près d’un million et demi de Palestiniens, soit plus de la moitié de la population du territoire palestinien. Selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, 104 personnes ont été tuées, en majorité des femmes et des enfants, au cours de la nuit dans les attaques israéliennes.
Les frappes ont eu notamment lieu autour du complexe hospitalier Al-Nasser, à Rafah, l’un des derniers structures de santé encore en fonction dans la bande de Gaza. Deux journalistes d’Al Jazeera y ont été grièvement blessés, et sont toujours dans un état critique selon la chaîne qatarie.
Les tractations continuent autour d’une trêve, incluant une nouvelle libération d’otages israéliens et de prisonniers palestiniens, malgré la menace d’une offensive israélienne de grande envergure sur Rafah. En Égypte, les discussions entre le directeur de la CIA américaine, William Burns, le chef du Mossad israélien, David Barnea, le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani, et des responsables égyptiens, ont été «positives», a annoncé la télévision égyptienne AlQahera News. Elles se poursuivront durant «les trois prochains jours», a indiqué la même source.
Un responsable du bureau politique du Hamas, Khalil al-Hayya, va conduire une délégation au Caire pour y rencontrer les chefs des services de renseignements égyptien et qatari, probablement ce mercredi, a indiqué une source au sein du mouvement palestinien.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan, un des dirigeants les plus critiques de l’opération israélienne, sera également reçu mercredi au Caire par son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi, sa première visite en Égypte après une décennie de brouille. M. Erdogan a expliqué ce déplacement dans ce pays, ainsi le précédent aux Émirats arabes unis, par la nécessité d’«arrêter le bain de sang» à Gaza.
«Nous travaillons intensément avec l’Égypte et le Qatar à une proposition pour la libération des otages», a indiqué mardi soir à Washington le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, de retour d’une tournée infructueuse au Moyen-Orient.
Déplacés du nord au sud
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a récemment ordonné à l’armée israélienne de préparer une offensive sur Rafah, où sont acculés environ 1,4 million de Palestiniens, la plupart ayant fui les bombardements israéliens et la guerre qui fait rage depuis quatre mois dans le territoire assiégé.
«S’ils me demandent de retourner dans la ville de Gaza, je ne le ferai que si c’est sûr», a témoigné à Rafah une mère de famille, Ahlam Abou Assi, déplacée avec les siens toujours plus vers le sud du territoire palestinien. «Sinon, je préférerai mourir ici. Ils meurent déjà de faim là-bas», a-t-elle ajouté en pleurant.
«Les opérations militaires à Rafah pourraient conduire à un massacre à Gaza», a averti mardi le chef des Affaires humanitaires de l’ONU, Martin Griffiths, appelant Israël à ne pas «continuer à ignorer» les appels de la communauté internationale.
L’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles israéliennes.
En représailles, Israël pilonne sans relâche le petit territoire palestinien, qu’il maintient sous blocus depuis 17 ans et sous un siège total depuis le début de la guerre. Les bombardements et les opération terrestres de l’armée israélienne ont tué près de 28.473 Palestiniens, en grande majorité des femmes, des enfants et des adolescents, et fait plus de 70.000 blessés, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.
En Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967 et où le Hamas n’est pas représenté, plus de 400 Palestiniens ont été tués par les soldats et les colons israéliens depuis le 7 octobre, et des centaines de personnes ont été «arrêtées» par les forces israéliennes.
Mises en garde internationales
Malgré les nombreuses mises en garde internationales, Benjamin Netanyahu s’est dit déterminé à poursuivre «la pression militaire» sur le Hamas. Il a néanmoins assuré dimanche qu’Israël ouvrirait à la population «un passage sécurisé» pour quitter Rafah, sans préciser vers quelle destination.
Les Etats-Unis, principal allié d’Israël, s’opposent à une offensive sans garanties pour la sécurité des civils. Le président Joe Biden a réclamé à Israël un plan «crédible» pour épargner la population, et un haut responsable de l’administration américaine avait indiqué que «dans les conditions actuelles», Washington «ne pourrait pas soutenir une opération militaire à Rafah en raison de la densité de la population»,soulignant que la population civile n’a «nulle part où aller».
Environ 1,7 million de personnes, d’après l’ONU, sur un total de 2,4 millions d’habitants, ont fui leurs foyers depuis le 7 octobre dans le territoire palestinien dévasté, assiégé par Israël et plongé dans une crise humanitaire majeure, sans approvisionnement en eau, en nourriture, en médicaments, en électricité et en carburant. Une majorité d’entre eux ont été déplacées plusieurs fois, fuyant toujours plus vers le sud à mesure que les opérations militaires israéliennes s’étendaient.
Rafah, devenue un gigantesque campement, est le principal point d’entrée de l’aide humanitaire à Gaza, insuffisante pour répondre aux besoins de la population qui vit dans des «conditions proches de la famine», selon le Programme alimentaire mondial (PAM).