Épinglé, son recteur s’agite: Grande Mosquée de Paris, la «Mecque» des haineux de la diaspora activés par le régime d’Alger en France

Le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Chems-eddine Hafiz, et le président algérien Abdelmadjid Tebboune.

Le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Chems-eddine Hafiz, et le président algérien Abdelmadjid Tebboune.

Épinglé pour son rôle dans l’embrigadement d’«influenceurs» installés en France et appelant au meurtre des opposants algériens de l’étranger et à des attentats en France, Chems-eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris et véritable porte-voix du régime d’Alger dans l’Hexagone, s’est littéralement lâché contre certaines figures de cette même opposition qui ont osé le dénoncer. Comble de la mauvaise foi, cet avocat d’affaires n’hésite pas à utiliser la religion contre ses détracteurs et à se confondre avec l’ensemble de la communauté musulmane de France.

Le 06/01/2025 à 19h35

Il est de ces postures qui laissent pantois. Celle du très algérien Chems-eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris, une institution de droit français censée représenter l’ensemble de la communauté musulmane de France, en fait bel et bien partie. Épinglé pour son rôle actif dans l’embrigadement de membres de la communauté algérienne de France afin de tresser les louanges du régime d’Alger et, surtout, appeler à la haine, au meurtre et aux attentats sur le sol français contre toutes les voix ayant l’outrecuidance de le critiquer, l’ancien avocat d’affaires, converti en représentant de l’islam de France, n’a pas trouvé mieux… que de s’attaquer à ces mêmes voix.

Dans un communiqué en réaction aux dernières arrestations en France parmi les influenceurs de la haine, incités à semer la terreur dans l’Hexagone par un régime fragilisé par l’appui irrévocable apporté par Paris à la souveraineté du Maroc sur son Sahara et par les soubresauts du criminel embastillement de l’écrivain Boualem Sansal à Alger, Chems-eddine Hafiz a livré une véritable diatribe contre certaines figures de cette opposition. À commencer par le lanceur d’alertes algérien Chawki Benzehra, qualifié d’«obscur blogueur».

Son tort? Avoir justement alerté sur le caractère méthodique et orchestré depuis Alger des appels précités. Pour lui, il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’une campagne téléguidée distillée à travers bien des relais médiatiques et portée par des «milliers» de soi-disant influenceurs. Objectif: terroriser. «Il faut aussi s’intéresser à la Grande Mosquée de Paris qui accueille ces influenceurs et qui les finance. Il ne se passe d’ailleurs pas un mois sans que le recteur de la Grande Mosquée de Paris ne se rendre en Algérie pour rencontrer le président Tebboune. Nous sommes face à un véritable agenda ourdi en Algérie et qui se déroule en France par l’entremise de la Grande Mosquée de Paris, devenue un outil au service d’une campagne de déstabilisation de la France», a déclaré Chawki Benzehra. C’était hier dimanche 5 janvier sur la chaîne CNews. Assez pour que le recteur émette une véritable fatwa contre le concerné, en y rajoutant «quelques personnalités de bas niveau».

Les médias algériens n’ont pas tardé à amplifier les propos, élargissant la liste noire des voix qu’Alger ne peut entendre. Porte-étendard de l’appareil militaire au pouvoir, Algérie54 intègre également le journaliste et écrivain Mohamed Sifaoui, coupable de s’être attaqué sur LCI «aux représentations algériennes en France, comme la Grande Mosquée de Paris», les accusant de «mener une guerre contre la France au profit de l’Algérie». Comme pour Sansal, Sifaoui est là aussi traité de «voleur». Décidément! Au passage, le régime d’Alger se trahit méchamment quand il considère la Grande Mosquée de Paris comme «une représentation algérienne», alors qu’il s’agit d’une association de droit français, représentative de TOUS les musulmans de France. «La machine de la propagande néocoloniale française menée par le régime français en pleine décadence, ne chôme pas et se verse dans l’escalade en matière de diabolisation de l’Algérie, ses institutions, ses dirigeants et aussi ses symboles», lit-on, entre autres pépites.

Le recteur Hafiz, lui, ne manque pas de s’en prendre à l’ancien ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, «connu pour son hostilité aveugle contre le pays où il fut en fonction» et qui a tenu «un discours similaire» sur CNews. Alors que c’est sa personne et ses accointances avec le régime d’Alger et le président Tebboune qui sont dénoncées, Chems-eddine Hafiz opère une magistrale fuite en avant en se cachant derrière l’ensemble de la communauté musulmane. Rien de moins. «Ces propos diffamants s’inscrivent dans la stratégie globale de CNews visant à discriminer l’ensemble des musulmans de France, à leur nier le simple droit d’exister dans notre pays, et à diffuser le poison de l’extrême droite dans notre société», écrit-il. Et voilà. Comme pour ne pas fâcher ses sponsors, le recteur souligne néanmoins les «liens forts et historiques avec l’Algérie».

Par «historiques», Chems-eddine Hafiz entend certainement depuis sa prise de fonction à la tête de l’institution française, soit le 11 janvier 2020. Institution qu’il a transformée depuis en officine algérienne. Au point qu’il est devenu le véritable ambassadeur d’Algérie à Paris. Journaliste et youtubeur algérien exilé en France, Abdou Semmar a dénombré au moins 8 audiences officielles accordées par le chef présumé de l’État algérien à son principal appui dans l’Hexagone. «Ceci, sans compter les échanges téléphoniques et le nombre incalculable de réunions avec Boualem Boualem, le très influent directeur de cabinet du président. Des ministres de premier plan n’ont pas droit à de tels honneurs», remarque-t-il dans une vidéo dédiée.

Officiellement, l’Algérie n’a plus d’ambassadeur en France depuis fin juillet 2024 et les relations diplomatiques entre Paris et Alger sont gelées depuis l’appui solennel de la France à la souveraineté marocaine sur le Sahara. Mais officieusement, c’est le recteur de la Grande Mosquée de Paris qui fait office d’ambassadeur effectif de Tebboune & Co. Au point de s’ériger en interlocuteur des autorités françaises pour le compte du pouvoir, s’entretenant avec les plus proches conseillers du président Macron ou encore ses ministres de l’Intérieur. Ceci, alors qu’il n’a ni la qualité ni la légitimité pour le faire.

Un tel «engagement» a une contrepartie: les largesses sonnantes et trébuchantes du pouvoir algérien. Aux subventions annuelles accordées par l’État voisin à la Grande Mosquée de Paris, allant de 1,2 à 2 millions d’euros, s’ajoutent de juteux contrats. Vous avez bien lu, surtout quand on sait que la Grande Mosquée de Paris a depuis juillet 2023 l’exclusivité de la certification halal de toutes les viandes rouges importées par l’Algérie depuis l’Union européenne. Pendant ce temps, «aucun bilan financier n’est publié, aucun registre des dépenses n’est connu et aucune forme de transparence n’est observée dans la gestion financière de la Grande Mosquée de Paris. Le tout, au vu et au su des autorités françaises qui préfèrent regarder ailleurs», dénonce Abdou Semmar. De la même manière qu’elles ont assisté, passives, à la transformation de la Grande Mosquée de Paris en plaque tournante de la dernière compagne électorale de Tebboune en France pour la fausse présidentielle de septembre 2024.

Qu’elle se transforme une fois de plus en «Mecque» des haineux de tous bords pour menacer de mort et d’attentats, sur le territoire français, les opposants algériens, ce n’est finalement qu’une suite logique. En procédant actuellement à une série d’arrestations parmi les promoteurs du crime sur la Toile, les autorités françaises apportent la preuve qu’elles prennent très au sérieux ces menaces ainsi que leurs différentes ramifications. Toutes pointent vers une direction: Alger. Le changement radical de ton du président Macron, ce lundi 6 janvier, à l’adresse du régime voisin sur l’affaire de l’écrivain Boualem Sansal, âgé, malade et emprisonné par la junte, pour nulle autre considération que ses idées, ne fait que renforcer cette idée. Devant les ambassadeurs français réunis à l’Élysée, le chef de l’État français a asséné: l’Algérie se «déshonore» en ne libérant pas l’écrivain franco-algérien. D’une rare intensité, la phrase et le discours qui a suivi résument toute la considération dont jouit désormais l’Algérie dans le concert des nations: une voyoucratie même pas digne d’une mafia. Elle, au moins, a un code d’honneur.

Par Tarik Qattab
Le 06/01/2025 à 19h35