L'ultimatum intimé à Doha pour remplir les 13 exigences, jugées exorbitantes, du front anti-Qatar, chapeauté par l'Arabie saoudite, arrivent à échéance le 3 juillet prochain. A l'approche du jour "J", le front, qui comprend aussi deux autres pays du Golfe (les Emirats arabes unis et le Bahreïn, en plus de l'Egypte), se prépare à annoncer, dans les heures qui viennent, une batterie de quatre nouvelles mesures tout aussi drastiques que les treize précédentes qui, si elles étaient remplies, ne permettraient ni plus ni moins que la disparition du Qatar en tant qu'Etat souverain.
Les 4 nouvelles mesures qui viennent d'être dévoilées par le site égyptien d'information "Al Ahram Al Arabi" concernent quatre domaines vitaux pour l'émirat avec lequel le front présidé par Ryad a rompu les relations diplomatiques le 5 juin dernier. Il s'agit en premier lieu du "gel de l'adhésion du Qatar au Conseil de coopération du Golfe (CCG)". Il est question ensuite de "gel des avoirs du Qatar dans les pays du boycott". Ensuite, "le boycott économique tout azimut (aérien, terrestre et maritime)". La quatrième mesure -et c'est le point le plus dangereux- revêt un caractère militaire. Ryad, Dubai, Manama et le Caire procèderont à "la construction d'une base militaire au Bahreïn".
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Si ces quatre nouvelles mesures venaient à être appliquées, cela impliquerait une escalade dangereuse dans la région et porterait à envisager une confrontation militaire entre le bloc conduit par l'Arabie saoudite et le Qatar et ses deux soutiens : la Turquie et l'Iran.
L’Arabie saoudite, les E.A.U, Bahreïn et l’Egypte, qui ont mis en place un embargo contre le Qatar depuis le 5 juin, avaient transmis une liste de treize conditions que Doha devra remplir pour mettre fin à la crise. Le document, qui a été remis à l’émir du Koweït chargé d’une médiation, demande l’arrêt de tout contact avec les «organisations terroristes»– les Frères musulmans, l’organisation Etat islamique (Daech), Al-Qaida et le Hezbollah sont cités, mais pas le Hamas palestinien –, mais aussi avec les partis d’opposition aux EAU, à l’Arabie saoudite, à l’Egypte et à Bahreïn, l’expulsion de tous les opposants hébergés au Qatar et considérés comme «terroristes» par ces quatre pays. Par ailleurs, il est également exigé du Qatar la fermeture de sa chaîne d’informations Al-Jazira et d’autres médias financés par lui.
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Et ce n'est pas tout ! Sur le plan diplomatique, Doha est contraint de réduire ses relations politiques et commerciales avec l’Iran et de cesser toute coopération militaire avec la Turquie. Enfin, l’émirat devra payer des «réparations» financières à ses voisins et se soumettre à un mécanisme de contrôle pendant les dix prochaines années.
Pour Doha, cette liste d'exigences «n'est pas destinée à combattre le terrorisme mais à empiéter sur la souveraineté du Qatar et à s’ingérer dans sa politique étrangère». En effet, l'Egypte d'Abdelfettah el-Sissi, ennemi juré du Qatar, est pointé du doigt pour avoir poussé vers cette escalade. Le timing choisi par le président égyptien pour céder les îles de Tiran et Sanafir à l'Arabie saoudite n'est pas en effet le fruit du hasard. Le 24 juin, à quelques heures de l'Aïd Al-Fitr, le chef de l'Etat égyptien a ratifié le transfert à l’Arabie saoudite de ces deux petites îles de la mer Rouge, situées à l’entrée du golfe d’Aqaba, prenant à rebours son propre peuple qui y a vu "une atteinte à la souveraineté nationale".
Est-ce aussi fortuit si les nouvelles mesures de rétorsion "fuitées" par le front anti-Qatar ont été annoncées sitôt après la ratification du transfert des deux îles égyptiennes à l'Arabie saoudite?
Une chose est sûre: la région a été rarement sujette à une tension pareille. Et les quatre nouvelles mesures portent avec elles la menace d'un conflit armé qu'aucune médiation ne pourra éteindre. Ni celle du Koweit, ni celle du Maroc qui a choisi "la neutralité postive" dans cette crise.