Coronavirus: la nicotine protègerait-elle du virus? Les scientifiques s’interrogent

DR

Invité ce mercredi matin sur les ondes de la Radio France Info, Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique Covid-19 en France, a fait quelques révélations pour le moins étonnantes, s'agissant de la nicotine.

Le 08/04/2020 à 12h42

Institué à la demande d’Emmanuel Macron, président de la République française, le Conseil scientifique présidé par Jean-François Delfraissy, et composé de dix autres autres experts, chacun intervenant dans des champs disciplinaires complémentaires, a pour rôle d’éclairer la décision publique dans la gestion de la situation sanitaire liée au coronavirus.

Interviewé par la radio France Info au sujet de la durée du confinement en France mais aussi sur le port du masque, Jean-François Delfraissy s’est ensuite exprimé sur les interrogations qui planent encore autour de ce virus.

La nicotine, une protection?«Je suis très humble vis-à-vis de ce virus. On ne le connaissait pas il y a de ça 3 mois et demi. Ce virus suscite encore beaucoup d’interrogations: "Pourquoi touche-t-il davantage telle région plutôt que telle autre?", "Pourquoi cette répartition?"», énumère-t-il.

«Il y a beaucoup d’interrogations en suspens».

Par exemple, «l’immense majorité des formes graves n’est pas composée de fumeurs. Comme si le tabac protégeait de ce virus via la nicotine! On n’aurait jamais imaginé avoir ce type d’interrogations il y a quelques semaines», annonce aussi Jean-François Delfraissy.

La nicotine pourrait ainsi constituer, selon le président du comité scientifique, «une forme de protection».

«Ne vous mettez pas au tabac pour autant!» prévient-il, car cette interrogation qui entoure la nicotine met juste en lumière «des faits surprenants au niveau épidémiologique».

Autrement dit, si cela s’avérait juste, le tabac protégerait de la contamination, mais une fois le virus contracté, dans le cas d’un fumeur, le risque de développer une forme grave du Covid-19 serait plus élevé, «parce qu’il y aurait sûrement une polypathologie respiratoire», précise toutefois Jean-François Delfraissy.

Et ce professeur de médecine, spécialisé dans l'immunologie, de conclure qu’il «y a un flot de connaissances qui va finir par aboutir, avec des éléments qui vont permettre de prendre en charge les personnes infectées». 

Le cas des fumeurs, un sujet qui fait débatLes fumeurs sont-ils plus facilement atteints par le coronavirus? La cigarette aggrave-t-elle les formes de la maladie? C’est une question qui revient souvent dans le débat qui agite la communauté scientifique depuis le début de la pandémie.

Du côté de l’Alliance contre le tabac en France, on publie des chiffres alarmants, qui tendent à prouver que la cigarette serait en effet responsable d’une aggravation de la maladie.

C’est en s'appuyant sur les résultats d'une étude, parue dans The New England Journal of Medicine, basée sur près de 1.100 patients atteints du Covid-19 en Chine, que l’association expose des données montrant un lien entre le statut tabagique et le risque de présenter une forme sévère du coronavirus.

Ainsi, 14% des non-fumeurs atteints du Covid-19 développent une «forme sévère» de la maladie, contre 21% du côté des fumeurs.

Dans le cas des formes très sévères, qui impliquent un passage en réanimation des patients, seuls 5% des non-fumeurs développent cette forme extrême, contre 12% des fumeurs. Une augmentation considérable, de l’ordre de 133% qui s’explique par les bronchites chroniques, et les maladies respiratoires dues au tabagisme, lesquelles peuvent devenir des facteurs de comorbidité.

Toutefois, les scientifiques se montrent prudents en l’absence d’étude qui tendrait à prouver un lien entre contraction du virus et tabac.

Ainsi, comme le souligne dans la presse Sandrine Belouzard, virologue et chercheuse au Centre d'infection et d'immunité de Lille (CNRS), «plus de 85% des personnes qui ont contracté le coronavirus n'avaient jamais fumé, et entre 12 et 13% avait déjà fumé (…) A priori, il n'y a donc pas de lien entre le fait de fumer et d'être infecté».

Par Zineb Ibnouzahir
Le 08/04/2020 à 12h42