Survenu lundi soir dans un lieu très touristique, cet attentat qui a fait selon le dernier bilan douze morts et a été revendiqué par l'EI, a conduit les populistes de droite à renouveler leur offensive contre la chancelière Angela Merkel, l'accusant, à moins d'un an des législatives, d'avoir mis le pays en danger avec sa politique migratoire.
Avant toute revendication, l'attaque avait été qualifiée de "terroriste" par Mme Merkel. De son côté, le parquet anti-terroriste avait relevé que la cible et le mode opératoire semblaient signer un acte jihadiste : les circonstances rappellent en effet l'attaque, signée de l'EI, au camion-bélier le 14 juillet à Nice en France (86 morts).
Les enquêteurs ont dû se résoudre à libérer mardi soir leur seul suspect, un demandeur d'asile pakistanais, faute d'éléments. L'auteur des faits semble donc bien en fuite plus de 24 heures après le drame et la police n'a évoqué publiquement aucune nouvelle piste.
Le Pakistanais de 23 ans, arrivé en Allemagne en 2015 et connu de la police pour des faits de délinquance, avait été interpellé rapidement après l'attaque. Les autorités avaient jugé alors que, "manifestement", elles tenaient leur homme.
Mais police et parquet antiterroriste avaient dès mardi après-midi reconnu que le véritable assaillant était sans doute en fuite: "nous avons probablement un dangereux criminel dans la nature et bien sûr cela inquiète la population", avait déclaré le chef de la police berlinoise, Klaus Kandt.
La remise en liberté du suspect signifie aussi "qu'une ou plusieurs personnes" responsables de l'attentat "sont en fuite (...) avec une arme", sans doute celle qui a servi à tuer le chauffeur-routier polonais retrouvé mort dans le camion qui lui avait été dérobé, a-t-il ajouté dans la soirée sur la chaine publique ARD.
Mercredi, la confusion et les craintes des Berlinois restaient donc grandes et les mesures de sécurité ont été renforcées à Berlin.
Parallèlement, la pression politique s'est encore accrue sur Angela Merkel, qui concentre depuis des mois les critiques pour sa politique migratoire jugée trop généreuse. "Ce sont les morts de Merkel !" a tonné Marcus Pretzell, l'un des responsables du parti de droite populiste Alternative pour l'Allemagne (AfD), tenant d'une ligne dure sur la question migratoire.
Pour Frauke Petry, patronne de l'AfD, "l'Allemagne n'est plus sûre" face "au terrorisme de l'islamisme radical" depuis que la chancelière a ouvert le pays à l'été 2015 à 900.000 migrants fuyant guerre et misère. Environ 300.000 supplémentaires sont arrivés en 2016. Des accusations que le ministre de l'Intérieur Thomas de Maizière a jugé "odieuses" sur le site de Bild mardi soir.
Le carnage s'est déroulé au pied de l'église du Souvenir, l'un des symboles de la capitale allemande.
Six morts sont allemands, selon la police. Les identifications des autres victimes se poursuivent. Sur les 48 blessés, 14 étaient mardi soir entre la vie et la mort, selon le ministère de l'Intérieur.
Partout dans le pays, les drapeaux des bâtiments publics ont été mis en berne et une minute de silence sera observée mercredi dans tous les stades de Bundesliga, le championnat de football, comme cela a été le cas déjà mardi.
Mme Merkel, qui s'était recueillie mardi après-midi sur les lieux de l'attaque, a assisté dans la soirée à une cérémonie oecuménique en l'église du Souvenir.
Le drame de Berlin rappelle celui de Nice en juillet : un Tunisien avait foncé avec son poids lourd sur la Promenade des Anglais, tuant 86 personnes, avant d'être abattu. L'utilisation de véhicules, notamment de camions, pour foncer dans des foules de "mécréants" est préconisée par des jihadistes.
L'Allemagne avait été jusqu'ici épargnée par les attaques d'ampleur, mais plusieurs attentats ont été commis par des personnes isolées. L'EI a revendiqué en juillet deux attentats séparés qui ont fait plusieurs blessés, commis par un Syrien de 27 ans et un demandeur d'asile de 17 ans, probablement afghan.