Il s'agit des suspects qui n'ont pas été retenus dans le dossier judiciaire français, qui doit donner lieu à un procès à Paris, à compter du 8 septembre 2021 pour environ six mois. Le procès prévu dans la capitale belge après cette étape procédurale pourrait également se tenir à la fin de l'année.
Mardi, la chambre du conseil de Bruxelles, siégeant à huis clos, devait apprécier quels sont parmi les vingt inculpés ceux qui devront comparaître devant le tribunal correctionnel pour "participation aux activités d'un groupe terroriste". D'après une source proche du dossier, ils pourraient n'être in fine qu'"une douzaine" car le parquet fédéral a demandé plusieurs non-lieu et qu'au moins deux suspects fassent l'objet d'un procès distinct pour des infractions jugés secondaires (possession d'armes, faux en écritures).
Les attentats du 13 novembre, revendiqués par l'organisation Etat islamique (EI) et qui ont fait 130 morts à Paris et dans la localité voisine de Saint-Denis, ont été en grande partie préparés depuis la Belgique. Le dossier d'instruction belge, baptisé "Paris Bis" par le parquet fédéral, porte sur l'aide matérielle apportée aux jihadistes passés par Bruxelles, y compris à Salah Abdeslam, seul membre encore en vie des commandos du 13 novembre, dont la cavale a duré quatre mois jusqu'à son arrestation dans la capitale belge, le 18 mars 2016.
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Pour la plupart, les suspects gravitaient dans l'entourage d'Abdeslam, de son ami Mohamed Abrini ("l'homme au chapeau" qui a renoncé à se faire exploser lors des attentats de Bruxelles), ou celui des frères Ibrahim et Khalid El Bakraoui, deux des kamikazes morts dans cette double attaque perpétrée par la même cellule jihadiste (32 morts le 22 mars 2016).
Il reste à déterminer si des contacts téléphoniques réguliers, un transport en voiture ou la fréquentation d'un appartement utilisé comme planque par les jihadistes font nécessairement d'eux des complices conscients des objectifs de la cellule.
"L'élément moral est essentiel", a expliqué en arrivant à l'audience Me Michel Bouchat, qui défend Youssef El Ajmi, ami d'enfance d'Ibrahim El Bakraoui dans un quartier populaire de Bruxelles. "Ils ont été en maternelle ensemble. Est-ce qu'en fréquentant son ami devenu un terroriste mon client a pour autant connaissance de ses intentions et son idéologie?", a interrogé l'avocat devant les journalistes. Il a rappelé qu'El Ajmi avait bénéficié d'un non-lieu dans le dossier "22 mars". Or, selon Me Bouchat, "on se basait là exactement sur les mêmes faits" que dans l'enquête "Paris Bis".
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Me Edouard Huysmans, avocat d'un frère Abrini dont le parquet demande le renvoi au tribunal, a fait part de son intention de plaider "l'irrecevabilité de la procédure". "Le réquisitoire n'est pas suffisamment précis", a déclaré ce pénaliste en disant douter de la "loyauté" de l'accusation.
L'audience devant la chambre du conseil, ouverte peu après 09H00 locales (08H00 GMT), est prévue toute la journée à l'ancien siège de l'Otan, reconverti en bâtiment de justice utra-sécurisé. La décision ne devrait pas être connue avant plusieurs semaines. Parmi les suspects susceptibles d'être jugés, le parquet fédéral recense encore les jihadistes belges Sammy Djedou et Youssef Bazarouj, faute de preuve formelle de leur décès en Syrie.
La mort du premier, un Belge né de père ivoirien, avait été annoncée en décembre 2016 par le département américain de la Défense. Il avait été tué par une frappe de la coalition internationale avec deux autres cadres de l'EI dont le Français Walid Hamman. Quant à Bazarouj, proche d'Abdeslam, il a fait partie des premiers combattants belges partis rejoindre les rangs de l'EI en Syrie dès 2014.
Récemment jugé par défaut dans un autre dossier terroriste à Bruxelles, il reste introuvable depuis la chute du califat en 2019.