Algérie: l’absence inexpliquée du général Saïd Chengriha laisse l’armée sans tête

Le chef de l'armée algérienne, Saïd Chengriha. . DR

Bien qu’habitué à faire régulièrement et secrètement des voyages à l’étranger pour se soigner, cette fois-ci, la longue éclipse du chef d’état-major de l’armée algérienne, dont la dernière apparition publique remonte au 18 janvier, alimente les spéculations. L’absence de son chef, naguère omniprésent, fragilise l’armée algérienne.

Le 15/02/2022 à 10h29

Saïd Chengriha, l’omniprésent chef de la junte algérienne, a disparu des radars depuis près d’un mois. Sa dernière apparition publique remonte au 18 janvier 2022. Il serait actuellement hospitalisé quelque part en Europe, car il est de notoriété publique que ce général, âgé de 77 ans, souffre de plusieurs maladies chroniques, dont de l'incontinence urinaire.

L’éclipse totale de Saïd Chengriha ne pouvait pas passer inaperçue: le chef de la junte aimait apparaître aux premières loges et ne ratait pas une occasion pour faire l’ouverture des JT dans les chaînes publiques de télévision. Il était de toutes les activités officielles, même celles qui n’ont rien à voir avec son domaine de compétence.

Certaines sources, citées par le journaliste et ancien officier dans l’armée algérienne, Hichem Aboud exilé en France, ont laissé entendre que le chef de l’armée algérienne serait atteint du Covid-19, et que sa contamination aurait entraîné des complications compte tenu des nombreuses maladies dont souffre l’intéressé.

Il est utile de rappeler à cet égard que la dernière fois que Chengriha a fait une apparition publique remonte au 18 janvier dernier, soit huit jours seulement après la diffusion de la première vidéo de Guermit Bounouira, ancien secrétaire particulier de l’ex-chef d’état-major, le défunt Ahmed Gaid Salah.

Dans cette vidéo entièrement consacrée à Saïd Chengriha, ce dernier est présenté par la «boîte noire» de Gaïd Salah comme un trafiquant notoire de drogue et d’armes, mais aussi comme un régionaliste qui a placé au cours des trois dernières années des généraux de sa région (l’Algérie orientale) aux postes les plus stratégiques au sein de la hiérarchie militaire.Selon certaines informations, un avion présidentiel aurait décollé, il y a plusieurs jours, de l’aéroport de Boufarik, près d’Alger, à destination… du Portugal. Une fuite-diversion qui vise à cacher le lieu exact où se soignerait Chengriha, de crainte bien évidemment que l’une des nombreuses ONGs algériennes et internationales qui le traquent ne dépose une plainte contre lui pour assassinats, tortures et autres crimes et violations des droits humains dont il s’est rendu coupable depuis les années 90 à ce jour.

L’implication par la justice suisse du général Khaled Nezzar dans des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité a tétanisé les hauts gradés de l’armée, qui ont commis des actes graves, lors de la décennie noire.

Ce qui corrobore l’hypothèse de la très probable gravité de la maladie de Chengriha, c’est qu’il a raté d’importants rendez-vous, comme le congrès militaire qui a réuni à Rome, du 1er au 4 février derniers, les chefs d'état-major des pays africains autour du général Stephen Townsend, chef du Commandement militaire américain en Afrique (Africom). C’est finalement le chef de la marine algérienne, le général Mahfoud Benmedah, qui a représenté son pays à cette réunion.

Chengriha n’a pas non plus été vu dans les funérailles de la mère du général Mohamed Médiène, dit Toufiq, alors que les cadors de la junte ne manquent jamais d’afficher leur solidarité lors de l’enterrement d’un proche des leurs.

L’absence du général Chengriha, sur laquelle rien n’a filtré, ni officiellement, ni dans le moindre média local, laisse l'armée algérienne orpheline de son chef et peut entraîner de graves dysfonctionnements dans la chaîne de commandement.

Il reste encore à scruter le Haut conseil de sécurité algérien, dont une réunion est logiquement attendue à la veille du 3ème anniversaire du Hirak, au cas, bien sûr, où ce rendez-vous venait à voir le jour, en l’absence de Saïd Chengriha.

Par Mohammed Ould Boah
Le 15/02/2022 à 10h29