«Un champ gazier géant en Afrique du Nord sur lequel l'Europe compte pour combler son déficit d'importations russes risque de compliquer les objectifs climatiques de l’UE», écrit l’agence Bloomberg qui avertit de la pollution que recèle l'exploitation du gaz algérien.
En se référant aux résultats d’une analyse financée par Greenpeace, s’appuyant sur des données satellitaires initialement rassemblées par des scientifiques de l'Université polytechnique de Valence en Espagne, l’article de Bloomberg relate que les champs gaziers algériens laissent échapper du méthane, un puissant gaz à effet de serre et ce, depuis près de quatre décennies.
L’étude met ainsi en évidence l'impact sur le réchauffement climatique de ce pays, qui fournit environ 8% des importations de gaz de l'Europe et qui est le plus grand fournisseur du continent après la Russie et la Norvège.
Les émissions les plus puissantes et persistantes se situent au niveau d’une station de compression à Hassi R'Mel, qui aide à transporter le gaz vers l'Europe et ailleurs. «L'Algérie a la troisième intensité de production de méthane la plus élevée parmi certains fournisseurs mondiaux de pétrole et de gaz», poursuit la même source, citant l'Agence internationale de l'énergie, ajoutant que le bassin de Hassi R'Mel est reconnu comme un hotspot mondial de méthane par les scientifiques qui étudient les données satellitaires.
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«Le danger est maintenant que l'Algérie détient plus de cartes» de possibilités d'exportation de son gaz, commente Antoine Vagneur-Jones, analyste chez Bloomberg NEF, car les efforts de l'UE pour réduire sa dépendance aux combustibles fossiles russes la rendent plus dépendante des autres fournisseurs. «Le presser d'agir, enchaîne-t-il, serait beaucoup plus difficile qu'avant».
Sachant que l'impact d'une unité de masse de méthane sur le climat est équivalent à 84 fois celui du CO2, Bloomberg n'omet pas de signaler que l'Algérie ne figure pas sur la liste des pays signataires lors de la COP26 à Glasgow d’un engagement visant à réduire les émissions de 30% d'ici 2030.
«Nous avons réduit les émissions de gaz torché de 9 milliards à 3 milliards de mètres cubes par an», a tenté d'expliquer Toufik Hakkar, directeur général de la Sonatrach, la compagnie énergétique nationale du pays, sans pour autant rassurer Bloomberg, qui rappelle que l'estimation de la quantité totale d'émissions provenant des bassins de combustibles fossiles est délicate car la fréquence des observations par satellite sur une zone géographique donnée peut être de 24 heures ou plus. «Les chercheurs de l'Université polytechnique de Valence ont évalué que les taux d'émission [pouvaient atteindre] jusqu'à 4,5 tonnes métriques de méthane par heure à partir de la station de compression à Hassi R’mel», précise l'agence américaine.
Le gisement de Hassi R’mel a rejeté environ 939.000 tonnes de méthane en 2021, en hausse de 67% par rapport à 2020, selon les estimations de la société de géoanalyse Kayrros SAS, qui a utilisé un modèle d'inversion pour mesurer les émissions totales de toutes les sources du bassin. «Cette quantité de méthane a, à peu près, le même impact climatique à court terme que les émissions annuelles d'environ 17 millions de voitures américaines», avertit l'article de Bloomberg.








