Fortement impacté, le secteur du tourisme comptait sur le tourisme national pour se relancer. La région nord, connue pour être une des destinations favorites des Marocains pendant l’été, a connu une saison en demi-teinte et en dents de scie.
«Pour moi, cette saison a été mitigée, car nous ne dépendions pas de nos propres actions ou des opérations mises en place par les hôteliers et les restaurateurs. Nous étions régis par les mesures prises par les autorités pendant la saison. Tanger était fermée, Tétouan également, Tamuda s’en est plus ou moins bien sorti et Al Hoceïma aussi. Mais globalement, dans la région, on s’attendait à mieux que les résultats de cette année», indique Rkia Alaoui, présidente du Conseil régional du tourisme (CRT) de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceïma.
Lire aussi : Tourisme: la crise du Covid-19 plonge les comptes de Risma dans le rouge
Avant la crise, la région enregistrait de bonnes performances avec une évolution constante sur les 10 dernières années. Entre 2010 et 2019, le nombre de nuitées y a pratiquement doublé, passant de 1.088.688 à 1.954.320 dans les hôtels classés, avec une évolution de 9,37% entre 2018 et 2019. Avec cette saison estivale, les chiffres de l’année 2020 risquent d’enregistrer une forte baisse, car selon Rkia Alaoui, les taux d’occupation tourneront en moyenne autour de 25 et 30%, pour la région.
Du côté des restaurateurs, le constat est le même. A Marina Smir, Mourad Bouras, propriétaire d’un restaurant sur le port explique que son chiffre d’affaires a fortement baissé, mais se réjouit d’avoir pu faire travailler ses salariés: «Cette année est exceptionnelle, mais c’est le cas dans le monde entier. Cette saison a été particulièrement difficile. Nous avons constaté une baisse de 60 % par rapport aux années précédentes. Le plus important, c’est que nous ayons pu faire travailler un grand nombre de nos employés qui se sont retrouvés en arrêt d'activité pendant près de 5 mois. Ils ont accepté de travailler avec un salaire réduit et je les en remercie».
Un autre restaurateur sur la marina nous explique qu’il a réussi «à sauver les meubles» en gardant le même personnel que durant la basse saison.
Pour les saisonniers, le bilan est plus contrasté, car les situations diffèrent. Oussama Benkirane, directeur général d’une agence de location de bateaux à Marina Smir confie que son chiffre d’affaires n’a pas été impacté.
«Ma clientèle habituelle a pu venir et nous avons aussi profité du fait que certains Marocains qui ont l’habitude de passer leurs vacances en dehors du Maroc n’aient pas eu cette possibilité», déclare-t-il.
Lire aussi : Vidéo. Fnideq: fin de la contrebande et Covid-19… L'activité des commerçants de la ville à l’agonie
En revanche, pour Said Bila, loueur de pédalos sur la plage de Cabo Negro, la saison n’a pas été aussi bonne.
«Au début, l’été avait bien commencé, mais suite aux décisions prises par les autorités, en milieu de saison, de limiter les déplacements, l’activité s’est effondrée. Les gens ont continué à venir en provenance de Fès, de Tanger et de Casablanca, mais c’était très faible. Par rapport à l’année précédente, mon chiffre d’affaires a baissé de 80%, mais c’est comme ça, la crise touche tous les secteurs, pas uniquement la location de pédalos», confie ce jeune licencié dont l’activité saisonnière permettait de financer les frais liés à la rentrée universitaire et de subvenir à ses besoins jusqu'à décembre.
«L’activité, ici, sur la plage de Cabo Negro, dépend beaucoup des MRE, mais cette année ils n’étaient pas là», ajoute-t-il.
En effet, avec la fermeture des frontières, la diaspora marocaine n’a pas pu rentrer au pays cet été. Cette absence a été remarquée par l’ensemble des opérateurs et des saisonniers de la région. Avant la crise, ces professionnels n’avaient pas conscience de l’apport des MRE -souvent propriétaires d'une résidence secondaire sur place- dans l’activité économique de la région.
«Cette saison a permis de mesurer et de prendre conscience de l’impact des Marocains résidant à l’étranger dans l’activité économique de la région pendant la saison estivale. Sans eux, Marina Smir était vide toute la journée, cet été», indique Hicham Bouras.
Lire aussi : Tourisme: les professionnels de la région Souss-Massa dévoilent leur plan
«Je pense que cette saison, le taux de fréquentation de la plage était de 40%. Par rapport à l’été dernier, ça a fortement baissé. Avec l’absence des MRE et la fermeture des villes, ce n’était pas comme l’année dernière», témoigne Hicham, un maître-nageur sauveteur sur la plage de Cabo Negro.
Malgré un été en demi-teinte, les professionnels ont conscience du caractère exceptionnel de cette saison et ont su faire preuve de résilience, mais la relance de leur activité ne passera que par la réouverture des frontières et le retour des touristes en provenance de l’étranger, alerte Rkia Alaoui, présidente du Conseil régional du tourisme (CRT) de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceïma.
«Nous n’allons pas rester les bras croisés. En tant que région, nous continuons de travailler pour préparer la reprise. Nous sommes en contact avec nos principaux marchés émetteurs pour les rassurer et voir quel produit nous pourrions développer, mais nous avons beau envisager tous les scénarios possibles et imaginables, si les frontières restent fermées, rien ne pourra fonctionner», conclut-elle.