Symbole de la solidité financière du Royaume, les réserves de change marocaines ont atteint un niveau historique à fin octobre 2025, s’élevant à 431,24 milliards de dirhams (MMDH), en hausse remarquable de 19,6% sur un an, selon les données de Bank Al-Maghrib. Ce niveau équivaut à près de 47 milliards de dollars et confirme un net renforcement de la position extérieure du Maroc.
Cette progression est principalement alimentée par la forte dynamique des recettes touristiques et par la reprise marquée des investissements directs étrangers (IDE). Les recettes voyages ont augmenté de 16,7% pour s’établir à 113,26 MMDH, tandis que les recettes IDE ont bondi de 28,2% pour atteindre 45,4 MMDH à fin octobre dernier.
Les exportations ont également contribué à l’amélioration des avoirs extérieurs, bien que de manière plus modérée. Elles ont progressé de seulement 2,6%, à 385,20 MMDH. En revanche, la contribution des transferts de fonds des Marocains résidant à l’étranger (MRE) est restée limitée, avec une hausse de 1,5%, soit +1,52 milliard de dirhams, pour un total de 102,93 MMDH.
Au-delà de la dynamique conjoncturelle, la trajectoire des réserves témoigne d’un renforcement structurel de la capacité du pays à faire face à ses engagements extérieurs et à absorber d’éventuels chocs économiques, dans un contexte international pourtant marqué par de fortes incertitudes.
+140% en une décennie
Sur dix ans, les réserves de change ont progressé de près de 140%, puisqu’ils étaient à 180 MMDH à fin octobre 2014. Cette évolution traduit un changement d’échelle dans la gestion des équilibres extérieurs du Maroc et le renforcement progressif de ses amortisseurs financiers.
La période 2016–2018 a été marquée par un léger recul des réserves, avec un plus bas atteint en octobre 2018 à 227,53 MMDH. Cette phase a reflété des pressions sur la balance des paiements et des ajustements liés à la politique de change.

Une reprise modérée s’est amorcée dès 2019, avec une progression de 5,03%, avant un rebond spectaculaire en 2020. Malgré la crise sanitaire mondiale, les réserves ont bondi de 22,49%, grâce notamment à la baisse des importations, aux transferts des MRE et aux emprunts internationaux.
La période 2021–2024 a ensuite été caractérisée par une phase de consolidation progressive. La croissance des réserves, bien que positive, a ralenti, passant de +9,58% en 2021 à seulement +1,56% en 2024.
Une dynamique tirée par le tourisme et les IDE
L’année 2025 marque un nouveau tournant, portant le niveau des réserves à un record historique. Cette performance est étroitement liée à l’essor spectaculaire du secteur touristique et des IDE.
À fin octobre 2025, les recettes de voyages avaient déjà dépassé le total des recettes enregistrées sur l’ensemble de l’année 2024. Cette évolution s’explique par une hausse de 14% des arrivées touristiques.
Le Maroc a par ailleurs accueilli 18 millions de visiteurs à fin novembre 2025, un niveau historique qui dépasse déjà le total de l’ensemble de l’année 2024, avec plus de 600.000 touristes supplémentaires, selon les données du ministère du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Économie sociale et solidaire.
Cette dynamique traduit une progression de 13,5% par rapport à la même période de l’année précédente et confirme le retour en force de la destination Maroc sur la scène internationale, après les années de perturbations liées à la pandémie.
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La montée en puissance des investissements directs étrangers constitue également l’un des faits marquants de 2025. Après un niveau de 20,12 MMDH en 2021, les flux avaient progressé à 27,43 milliards en 2022, avant de reculer en 2023 à 22,73 MMDH.
La reprise amorcée en 2024 (+24,7% à plus de 43 MMDH) s’est nettement renforcée en 2025, avec un niveau record de 45,4 MMDH à fin octobre. Cette performance traduit un regain de confiance des investisseurs internationaux dans l’économie marocaine, porté par la diversification des secteurs attractifs et le renforcement des partenariats stratégiques.
Sur la période 2015–2025, les IDE ont connu une évolution fluctuante mais globalement positive. Après 39,9 MMDH en 2015, ils ont reculé durant deux ans avant de rebondir et d’atteindre un pic inédit de 46 MMDH en 2018. Après un repli, une reprise s’est dessinée en 2022 avec 40,3 MMDH, puis un nouveau sommet en 2024 à 43,8 MMDH.
Avec des recettes d’IDE attendues autour de 3,3% du PIB en 2025 et 3,5% en 2026, le Maroc consolide sa place parmi les économies attractives de la région.
Le trend haussier se poursuivra
Selon les projections de Bank Al-Maghrib, les réserves de change devraient rester bien orientées. Les avoirs officiels de réserve pourraient atteindre 434,5 MMDH à fin 2026, soit un niveau équivalent à cinq mois et demi d’importations de biens et services.
Dans ce scénario, le déficit du compte courant resterait contenu autour de 2,3% du PIB en 2025 et de 2% en 2026, après 1,2% en 2024, ce qui témoigne d’un équilibre extérieur globalement maîtrisé.
Les perspectives à court et moyen terme reposent en grande partie sur la reprise des exportations industrielles. Selon les projections de la Banque centrale, les exportations de biens devraient augmenter de 6,2% en 2025, portées essentiellement par la relance attendue de l’industrie automobile.
Les ventes du secteur automobile, après un léger recul en 2025, devraient rebondir de 20% en 2026 pour atteindre 187,6 MMDH, renforçant ainsi la capacité du pays à générer des devises à travers ses activités industrielles.
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Les recettes de voyages devraient, de leur côté, maintenir une bonne dynamique, avec une progression attendue de 11,3% en 2025 et de 4,8% en 2026, pour atteindre 131,2 MMDH.
Concernant les transferts des MRE, une quasi-stabilité est anticipée en 2025, suivie d’une hausse de 4,8% en 2026, à 125,5 MMDH, ce qui contribuerait à consolider les entrées structurelles de devises.
Avec plus de 431 MMDH de réserves, le Maroc dispose désormais d’un matelas de sécurité confortable, capable de couvrir plusieurs mois d’importations. Ce niveau renforce la crédibilité du dirham et offre à Bank Al-Maghrib une marge de manœuvre appréciable en cas de tensions sur les marchés internationaux.
Dans un environnement mondial incertain, la solidité retrouvée des réserves de change apparaît ainsi comme l’un des principaux piliers de la stabilité macroéconomique du Maroc.








