Relance post-Covid: au Maroc, le marché de l’emploi est encore moins accueillant pour les femmes

DR

Au Maroc, sous l’effet conjugué de la propagation du Covid-19, de l’état d’urgence sanitaire et des confinements, les femmes ont été touchées de manière disproportionnée par les suppressions d’emplois et la perte de leurs revenus, qui ont découlé de la crise économique liée au contexte pandémique.

Le 27/07/2021 à 09h59

La situation du marché du travail continue encore de subir les effets du choc de la crise pandémique en 2020, essentiellement marqué par la hausse du taux de chômage et de l’inactivité, particulièrement chez les femmes.

Selon l’Enquête nationale sur l’emploi du Haut-Commissariat au Plan (HCP), réalisée au terme du premier trimestre de année 2021, l’économie nationale a enregistré une perte de 202.000 postes d’emploi au niveau national, alors qu’une année auparavant, entre les premiers trimestres de 2019 et de 2020, pas moins de 77 .00 postes avaient été créés. 

© Copyright : HCP

Le nombre de chômeurs a ainsi augmenté de 19%, passant numérairement de 1.292.000 à 1.534.000 chômeurs recensés par le HCP, entre le premier trimestre de l’année 2020 et celui de 2021. Au cours de cette période, le taux de chômage est, quant à lui, passé de 10,5 % à 12,5%, enregistrant une forte hausse. Pour les femmes, la hausse est encore plus importante, ce taux étant passé de 14,3% à 17.5%.

Selon Mehdi El Fakir, économiste et analyste économique joint par Le360, environ «23% des femmes au Maroc sont actives, le reste [sont des femmes] inactives, car il y a plusieurs critères qui entrent en jeu, notamment les qualifications à avoir pour pourvoir certains postes».

Il explique également que «les raisons de la hausse du taux de chômage des femmes est tributaire de la nature de l’activité exercée. Ce n’est pas une question discriminatoire. Par exemple les activités à caractère social marchaient très bien avant le Covid-19, ce qui n'est pas le cas actuellement».

Selon l'expert, ce constat s’applique également prioritairement aux secteurs des loisirs et des services, comme pour les métiers de «Tanegaft» (l'apprêtement et la location de tenues et d'accessoires aux mariées), et plus généralement au secteur tertiaire et dans le circuit informel, ainsi que l'artisanat, dans le secteur secondaire, et l'agriculture, dans le secteur primaire.

Dans le contexte actuel, le taux de pertes d'emplois des femmes au Maroc est énorme, «mais elles ont fait preuve d'une grande capacité d'adaptation en se convertissant dans d'autres secteurs. Par exemple, certaines femmes qui travaillaient dans les hammams, ou dans les centres d'appels, ont travaillé en tant que femmes de ménage pour arrondir leurs fins de mois au cours de cette période post-Covid», nuance l’analyste.

Des propos qui sont soutenus par l’Organisation Internationale du Travail (OIT), dans sa dernière note de synthèse intitulée Bâtir un avenir plus équitable: les droits des femmes au travail et en milieu de travail au cœur de la reprise post-Covid. Selon l'organisation onusienne, cela «s’explique en grande partie par l’impact des périodes de confinement sur les secteurs les plus touchés, notamment secondaire et tertiaire, où les femmes sont sur-représentées et occupent souvent des emplois informels».

L’étude de l'OIT souligne aussi que la pandémie du Covid-19 a mis en lumière les profondes disparités de genre en ce qui concerne la qualité de l’emploi, notamment pour les nombreuses femmes travaillant dans les secteurs et professions à prédominance féminine, ainsi que dans l’économie informelle.

Cela étant, l'OIT recommande aux gouvernements d’investir dans l’économie des soins et des services à la personne, car les secteurs de la santé, de l’action sociale et de l’enseignement constituent un important réservoir d’emplois, tout particulièrement pour les femmes.

Au Maroc, il est vrai que plusieurs mesures ont été mises en place pour atténuer l’ampleur de la crise chez les femmes, notamment par la distribution d'aides directes, mais, pour Mehdi El Fakir, «ces mesures ne sont jamais suffisantes. Il faut faire plus, en regardant et analysant la situation des femmes de près, afin de stimuler et relancer l'économie marocaine, notamment auprès des catégories les plus vulnérables».

Par Yousra Adli
Le 27/07/2021 à 09h59