«Une émission d'une obligation indexée sur l'inflation par le Trésor marocain marquerait une étape importante dans le développement du marché financier marocain. Elle arriverait notamment à point nommé pour combler un vide en termes d'instruments financiers avec une protection contre l'inflation qui pourrait se faire sentir de plus en plus par les investisseurs et les épargnants dans le contexte actuel», expliquent les auteurs de cette publication intitulée «Obligations indexées sur l'inflation: opportunité pour le marché financier marocain».
De plus, poursuivent-ils, elle constituerait un benchmark pour des émissions similaires de la part des établissements publics et des entreprises privées, posant ainsi les prémisses pour l'émergence d'une nouvelle classe d'actifs dans le paysage financier marocain.
Au-delà des bénéfices pour les investisseurs et pour le marché des capitaux, le Trésor bénéficierait d'un nouvel outil de financement lui donnant un degré de liberté additionnel pour la gestion de la dette, soulignent les auteurs, ajoutant que les évolutions de cette nouvelle classe d'actifs seront une source d'information précieuse pour les autorités financières pour renseigner davantage les politiques budgétaires et monétaires.
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Parallèlement, ils indiquent que l'idée des obligations indexées sur l'inflation n'est pas nouvelle, car les avantages de disposer d'un tel instrument pourraient être multiples tant pour les investisseurs que pour le Trésor ou encore certains établissements publics en tant qu'émetteurs.
Selon les auteurs, il s'agit là de surligner la pertinence d'un tel outil dans un contexte où l'inflation érode la valeur réelle de l'épargne, les craintes d'une inflation prolongée s'agrandissent chez les investisseurs et le Trésor fait face à un risque de hausse de la courbe d'emprunt moyen à long terme.
«La configuration au Maroc est très différente de celle qui se présente aux Etats-Unis ou en Europe. Nous n'observons ni une inflation liée à la demande ni un fort accroissement des crédits accordés aux ménages, mais il demeure que nous connaissons depuis la fin de l'année 2021 une envolée surprenante de l'inflation, alimentée par la composante importée, le renchérissement des prix des matières premières et énergétiques, ainsi qu'un choc d'offre sur les prix des produits alimentaires frais en résultat du mauvais déroulement de la campagne agricole 2021-2022», ajoute la même source.
Et de soutenir que, certes, celle-ci pourrait s'atténuer dans les mois à venir, mais elle pourrait aussi se diffuser plus largement dans le tissu économique si la hausse des prix continue de s'installer durablement au niveau international.
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D'après la même source, l'inflation importée est en train d'éroder les marges des entreprises non financières et l'épargne des ménages par le double effet de la hausse des prix de l'énergie, des matières premières et des produits de consommation importés, d'une part, et de l'érosion de la valeur réelle de l'épargne constituée, d'autre part.
Le contexte inflationniste global résulte certes d'effets réputés jusqu'à récemment comme étant transitoires, relèvent les auteurs de la publication, précisant qu'il est en effet communément imputé à la perturbation des chaînes logistiques suite à la pandémie, aux stimuli monétaires des banques centrales dans la majorité des pays industrialisés, et à la guerre en Ukraine. «L'argumentaire courant semble en effet avancer que le resserrement de ces politiques monétaires expansionnistes ainsi que la normalisation des chaînes logistiques devraient permettre de maîtriser cette inflation galopante assez rapidement», ajoutent-ils.
Il n'en reste pas moins que la forte reprise des marchés de l'emploi, notamment aux Etats-Unis où le taux de chômage a baissé à 3,6% à fin mars 2022, ainsi que dans la zone Euro avec un niveau de chômage historiquement bas de 6,8% à fin mars 2022, indique une remontée des salaires qui serait elle-même en passe d'exacerber l'inflation des prix. Ce qui accroîtrait le risque d'un dérapage durable de l'inflation sur le moyen et le long terme.