L’économie marocaine face aux défis de la dépendance à l’Europe

L'industrie automobile n'a pas échappé à la baisse de la production et des ventes en juillet 2016, selon BAM.

Le secteur automobile, moteur d’emplois et d’exportations, subit un recul face à la contraction du marché européen. . DR

Revue de presseMalgré une performance globale solide, certains piliers de l’économie marocaine montrent des signes de fragilité. Le secteur automobile, moteur d’emplois et d’exportations, subit un recul face à la contraction du marché européen, tandis que l’outsourcing est fragilisé par une nouvelle réglementation française. Cet article est une revue de presse tirée de Jeune Afrique.

Le 22/09/2025 à 19h37

Alors que l’économie nationale affiche une croissance soutenue, certains secteurs clés sont confrontés à des défis structurels majeurs. «L’automobile et l’outsourcing, piliers de l’emploi et des exportations, montrent les limites d’une dépendance trop forte à l’Europe, tandis que le Royaume cherche à diversifier ses marchés et à accélérer sa transition vers l’économie verte et numérique», écrit le magazine Jeune Afrique.

En 2024, les exportations industrielles du Maroc ont atteint près de 400 milliards de dirhams, représentant environ 88% du total des ventes à l’international, se félicite le ministère de l’Industrie et du Commerce auprès de Jeune Afrique. Dans l’ensemble, l’industrie semble sur de bons rails, mais tous les secteurs ne tirent pas leur épingle du jeu. Le segment automobile, pilier de l’industrie nationale, connaît un recul préoccupant.

À fin juillet, les exportations de la construction automobile ont perdu 5,1 milliards de dirhams (480 millions d’euros), soit une baisse de 12,7%. Cette tendance s’inscrit dans la continuité d’une contraction observée dès fin mars (-3,6%), une première depuis la crise liée à la pandémie de Covid-19. Le ministère nuance toutefois cette lecture: fin juillet, le recul n’était plus que de 1,83% par rapport à la même période en 2024, traduisant une résorption progressive de la baisse, qui avait culminé à -10,9% fin janvier.

Le secteur automobile marocain est un symbole de réussite industrielle, avec près de 15 milliards d’euros d’exportations en 2024 et 200 000 emplois. Des modèles comme la Dacia Sandero, entièrement fabriquée au Maroc par Renault, illustrent cette réussite. Le Royaume a franchi la barre d’un million de véhicules produits par an, contre 700 000 en 2022.

Mais ce succès se heurte à des contraintes externes. «Pour des raisons liées à la baisse de la demande et à l’évolution de la réglementation européenne, le marché de prédilection du Maroc se contracte», explique Larabi Jaïdi, économiste au Policy Center for the New South, cité par Jeune Afrique. L’Union européenne prévoit en effet l’interdiction de la vente de voitures thermiques neuves dès 2035.

Le ministère de l’Industrie relativise cependant ces inquiétudes: ce contexte serait «un catalyseur de transformation pour le secteur», permettant au Maroc d’accélérer sa transition vers la mobilité électrique et de se positionner sur la chaîne de valeur des batteries. Des mesures sont mises en place pour soutenir la compétitivité et favoriser la montée en gamme afin de mieux répondre aux exigences du marché mondial.

Pour limiter sa dépendance à l’Europe, le Maroc cherche désormais à diversifier ses marchés. Selon Larabi Jaïdi, le continent africain représente un potentiel considérable, particulièrement dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). Le Conseil de la concurrence estime que l’industrie automobile pourrait croître de 40% d’ici 2027, avec un marché interafricain de plus de 42 milliards de dollars. Le Royaume mise également sur ses accords de libre-échange avec plus de 100 pays, ciblant des régions à fort potentiel comme l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Amérique du Nord.

L’automobile n’est pas le seul secteur dépendant de l’Europe. L’outsourcing, qui emploie 90 000 personnes et génère 1,7 milliard d’euros de chiffre d’affaires au Maroc, est lui aussi fragilisé par une nouvelle loi française interdisant, à partir d’août 2026, tout démarchage téléphonique sans consentement explicite. «Cette mesure pourrait entraîner la suppression de 10 000 emplois et une perte de 100 millions d’euros de revenus pour le secteur, qui repose majoritairement sur le démarchage téléphonique», alerte Jeune Afrique.

Selon Youssef Chraibi, président de la Fédération marocaine de l’externalisation des services, «cette évolution devrait surtout provoquer une stagnation, alors que le téléphone perd depuis plusieurs années du terrain au profit des activités BPO et du back-office».

Face à cette double dépendance à l’Europe, plusieurs économistes insistent sur la nécessité de renforcer la souveraineté industrielle. «Les pays du Sud ne doivent pas rester tributaires d’acteurs étrangers. Il faut consolider ces secteurs sur notre territoire en favorisant les acteurs locaux», conclut Larabi Jaïdi. Pour l’industrie marocaine, la capacité à diversifier ses marchés et à développer ses filières locales pourrait déterminer sa résilience face aux chocs internationaux.

Par La Rédaction
Le 22/09/2025 à 19h37