Le Maroc parmi les leaders africains des chaînes de valeur vertes, mais…

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Revue de presseSelon le Greenplexity Index, publié par le think tank The Growth Lab de l’Université de Harvard, la Tunisie et le Maroc se classent en tête du continent africain pour leur compétitivité dans les chaînes de valeur vertes. Si le Royaume affiche un fort potentiel énergétique et industriel, son voisin tunisien le devance grâce à une gouvernance plus claire et une mise en œuvre plus cohérente des réformes liées à la transition énergétique. Cet article est une revue de presse tirée de Challenge.

Le 11/11/2025 à 19h23

Selon une étude publiée par The Growth Lab, rattaché à la Harvard Kennedy School, la Tunisie et le Maroc se distinguent comme les pays africains les plus compétitifs dans les chaînes de valeur vertes. Ce classement, baptisé «Greenplexity Index, évalue la capacité de 145 pays à participer aux secteurs liés à la transition énergétique mondiale», indique le magazine Challenge.

L’indice repose sur une analyse fine de la diversité et de la sophistication des exportations associées aux technologies vertes, aux minerais critiques et aux intrants nécessaires à la décarbonation. Il s’inspire de la méthodologie de l’indice de complexité économique de Harvard, qui mesure la capacité d’un pays à produire et exporter des biens à forte valeur ajoutée. Dans ce cadre, le Maroc se classe 58ᵉ au niveau mondial, juste derrière la Tunisie, et occupe la deuxième place sur le continent africain, devant l’Égypte, Maurice, l’Afrique du Sud, Eswatini, le Togo, le Bénin, le Burkina Faso et le Tchad. À l’échelle planétaire, le Japon arrive en tête, suivi de l’Allemagne, de la République tchèque, de la France et de la Chine.

Pour Ricardo Hausmann, directeur du Growth Lab, «les pays qui affichent une présence complexe et diversifiée dans les chaînes de valeur vertes ont la capacité de croître dans un monde en voie de décarbonation». L’enjeu n’est donc pas seulement de produire de l’énergie propre, mais de maîtriser l’ensemble des activités économiques qui soutiennent cette transition: conception de technologies, fabrication d’équipements, traitement des minerais stratégiques, ou encore innovation dans les matériaux et les procédés.

La position de la Tunisie devant le Maroc interroge, surtout quand on sait que le Royaume produit près de 24% de son électricité à partir de sources renouvelables, contre à peine 3% pour son voisin, relève Challenge. L’expert marocain en énergie Saïd Guemara apporte un éclairage à ce paradoxe. «Le Greenplexity Index, comme d’autres classements internationaux, ne mesure pas la quantité d’énergie verte produite, mais la capacité d’un pays à réussir sa transition énergétique. Et sur ce plan, la Tunisie se distingue par la cohérence de son cadre réglementaire et la clarté de sa gouvernance», explique-t-il.

Selon lui, la Tunisie bénéficie d’un arsenal juridique opérationnel: ses lois sur l’autoproduction sont appliquées, ses décrets publiés, ses appels d’offres transparents et ses tarifs de rachat bien définis. Son programme national d’efficacité énergétique produit des résultats concrets depuis plus d’une décennie, et le pays déploie progressivement un réseau électrique intelligent grâce à cinq millions de compteurs connectés. Autant de mesures qui traduisent une vision pragmatique et une continuité dans l’action publique.

Le Maroc, en revanche, bien qu’il dispose d’un potentiel solaire et éolien considérable, souffrirait d’une gouvernance morcelée et d’une complexité administrative freinant la mise en œuvre effective des réformes. Les textes de loi tardent à être accompagnés de décrets d’application, et les compétences se chevauchent entre différents organismes (ONEE, MASEN, ANRE et distributeurs régionaux). Une fragmentation qui limite la lisibilité du cadre réglementaire et ralentit l’émergence d’un écosystème industriel vert pleinement intégré.

Le World Economic Forum, dans son «Energy Transition Index 2025», confirme cette lecture. La Tunisie y occupe la 64ᵉ place, tandis que le Maroc recule à la 70ᵉ. Le WEF met en avant la clarté réglementaire, la cohérence institutionnelle et l’efficacité des politiques publiques, davantage que les seuls indicateurs de production.

Par La Rédaction
Le 11/11/2025 à 19h23