C'est aujourd'hui, mardi 29 septembre, à 14h30, que la Commission des secteurs productifs au Parlement doit se réunir pour discuter et entériner un projet de décret-loi, qui est passé quasiment inaperçu. Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie et du commerce est censé y présenter le projet 2-20-690 traitant des amendes fiscales à payer pour le rétablissement de la possibilité d’émettre des chèques, suite à un incident de paiement.
© Copyright : DRAdopté en Conseil de gouvernement le 24 septembre, ce projet devrait bientôt entrer en vigueur puisqu’il prend le raccourci du circuit législatif, dans le contexte de l’état d’urgence sanitaire, avec sa mouture de «décret-loi». Il prévoit une baisse d’au moins 90% des pénalités à payer suite à l’émission de chèques sans provision. Des amendes jusqu'ici réglementées par l’article 313 du Code du commerce qui seront abrogées temporairement.
Jusqu’au 31 mars 2021, l’amende fiscale dans le cas d’une première injonction pour incident de paiement est ramenée à 0,5% de la valeur du (ou des) chèque(s), au lieu de 5%. Pour la deuxième injonction, cette pénalité est fixée à 1% au lieu de 10%, tandis que pour la troisième injonction et plus, il suffira de s’acquitter de 1,5% du montant du chèque litigieux, au lieu des 20% initialement prévus.
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Une baisse d’une telle ampleur est assimilable à une sorte d’amnistie fiscale sur les chèques sans provision. Elle peut-être interprétée par une volonté du gouvernement de recouvrir un maximum de recettes, en rendant accessible la régularisation des incidents de paiement.
Et pour cause: les incidents de paiement via des chèques restent un véritable fléau au Maroc. Selon les statistiques de Bank Al-Maghrib (BAM), pour 2019, ils ont augmenté de 2,2% en nombre (470.515), représentant 13,8 milliards de dirhams. Et les opérations de régularisation ne suivent pas: 111.375 chèques assainis pour un montant de 1,7 milliard de dirhams. En conséquence, logiquement, le nombre d’interdits d’émission de chèques s’est établi à 689.045 personnes, dont 87,2% de personnes physiques.
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Ces nouvelles dispositions devraient ainsi favoriser la régularisation de milliers de cas de personnes physiques ou morales interdites de chéquiers. Car pour certains, la régularisation de la situation pénale (avec le paiement du montant du chèque au bénéficiaire) n’est pas forcément suivie par une action de levée de l’interdiction, étant donné l’importance de l’amende. Mais ces nouvelles dispositions pourraient avoir aussi l’inconvénient d’encourager des personnes de mauvaise foi de continuer à émettre des chèques en bois.
Accessoirement, cette disposition permettra aussi de contribuer à l’atténuation de la pression sur la circulation du cash au Maroc, observée depuis le confinement et souvent relevée par Bank Al-Maghrib. Mais ce sera aux députés de peser les pour et les contre de cette «amnistie», qui semble ne pas dire pas son nom.