La nouvelle dynamique du capital-investissement au Maroc

Porté par des performances robustes et une volonté publique clairement affirmée, le capital-investissement marocain atteint un tournant décisif de son développement.

Revue de presseSoutenu par des performances solides et une volonté publique affirmée, le capital-investissement marocain franchit un cap historique. Avec le déploiement massif du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, le secteur amorce une nouvelle phase de maturité, dopant la croissance des entreprises et remodelant le paysage financier national. Cet article est une revue de presse tirée de Finances News.

Le 04/08/2025 à 20h32

Longtemps cantonné à un rôle marginal dans l’économie marocaine, le capital-investissement s’impose aujourd’hui comme un levier stratégique de financement et de transformation du tissu productif. En 2024, le secteur a pulvérisé ses précédents records: plus de 15,7 milliards de dirhams ont été injectés dans près de 320 entreprises, contre des niveaux bien plus modestes les années précédentes, indique le magazine Finances News Hebdo.

Derrière ces chiffres, se cache une dynamique bien réelle. Les entreprises accompagnées affichent une croissance annuelle moyenne de 18,9% de leur chiffre d’affaires, voient leurs effectifs progresser de 15% et leur rentabilité s’envoler avec un Ebitda multiplié par 2,5 entre l’entrée et la sortie du fonds. Signe fort de l’impact du private equity, ces sociétés ont crû en 2024 à un rythme de 20,5%, bien au-dessus de la croissance de l’économie nationale (+3,8%). Leur contribution fiscale a, elle aussi, pris de l’ampleur, dépassant les 3 milliards de dirhams.

Cité par le magazine, Hassan Laaziri, président de l’Association marocaine des investisseurs en capital (AMIC), précise que l’année 2024 constitue «une année record», marquée par des progrès sur tous les fronts: levée de fonds, investissement et désinvestissement. Le marché boursier, redevenu attractif, facilite désormais les sorties par IPO. Une option de plus en plus populaire chez les entrepreneurs marocains, qui commencent à percevoir la cotation comme une suite logique de leur trajectoire de croissance.

Depuis la pandémie, les introductions en Bourse se multiplient et plusieurs opérations majeures sont attendues d’ici fin 2025. Ce changement de mentalité contribue à ancrer le capital-investissement dans le cycle de vie des entreprises marocaines. «Si cette dynamique est bien engagée, elle vient surtout de bénéficier d’un puissant coup d’accélérateur avec l’entrée en scène du Fonds Mohammed VI pour l’investissement (FM6I)», souligne Finances News.

Conçu pour accompagner la relance post-Covid et anticiper les besoins du pays dans la perspective du Mondial 2030, le FM6I a franchi une étape décisive le 10 juillet 2025: 14 sociétés de gestion, marocaines et internationales, ont été sélectionnées pour piloter des fonds thématiques couvrant l’industrie, le tourisme, l’agriculture ou encore la logistique.

À court terme, 4,5 milliards de dirhams de capitaux publics seront engagés, générant 14,5 milliards de dirhams supplémentaires grâce aux partenaires privés. Résultat: 19 milliards de dirhams seront injectés dans l’économie marocaine à brève échéance. L’effet de levier est remarquable: chaque dirham investi par le Fonds Mohammed VI pour l’investissement attire quatre dirhams privés. À plus long terme, ces véhicules pourraient mobiliser entre 50 et 60 milliards de dirhams, soit trois fois la taille historique du secteur.

«En quinze ans, le capital-investissement marocain a levé 15 milliards de dirhams. Ce montant sera doublé en deux ans grâce au Fonds Mohammed VI pour l’investissement», résume Hassan Laaziri. Plus qu’une question de volumes, c’est tout l’écosystème qui se muscle: l’arrivée de sociétés de gestion internationales, l’attraction de talents spécialisés et la professionnalisation des acteurs locaux positionnent le Royaume comme un hub régional du private equity.

Malgré cet essor, quelques maillons manquent encore pour parachever la chaîne de valeur. L’un des principaux obstacles reste l’absence d’un cadre juridique pour le traitement préventif des difficultés des entreprises. Aujourd’hui, de nombreuses sociétés n’accèdent à la justice commerciale qu’au stade critique, quand les marges de manœuvre se réduisent. L’introduction de mécanismes comme le mandat ad hoc ou la conciliation, déjà en vigueur en France, permettrait une gestion plus souple, plus confidentielle et plus rapide des tensions financières.

Ces outils offriraient plusieurs avantages: gel des sûretés, intervention de professionnels du restructuring et sécurisation des nouveaux financements. En parallèle, la création d’un comité interministériel dédié aux entreprises en difficulté (sur le modèle du CIRI français) pourrait renforcer la coordination public-privé pour préserver les acteurs stratégiques.

Après des années d’expérimentation, le capital-investissement marocain entre donc dans une phase d’accélération et de consolidation, avec une combinaison unique: des acteurs plus aguerris, des marchés de capitaux plus profonds, une volonté politique forte et un entrepreneuriat plus ouvert à la Bourse.

Pour confirmer cette trajectoire, le secteur devra encore gagner en souplesse réglementaire, élargir son vivier d’acteurs et s’outiller pour accompagner les entreprises fragilisées. À ce prix, le Maroc pourrait non seulement absorber davantage de capitaux, mais aussi imposer un modèle régional de croissance industrielle fondée sur l’investissement patient.

Par La Rédazction
Le 04/08/2025 à 20h32