Dans les mois à venir, les hôtels classés du Royaume seront passés au crible par une vaste opération d’«inspections surprises». Baptisée «visites mystères», cette campagne d’envergure, inédite par son ampleur, devrait s’étaler sur deux ans, indique le quotidien L’Économiste dans son édition du lundi 28 juillet.
Elle marque un tournant dans la réforme du système de classement hôtelier, encadrée par la loi 80-14 et ses textes d’application. À la manœuvre: le ministère du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Économie sociale et solidaire, en tandem avec la Société marocaine d’ingénierie touristique (SMIT). Le but est d’évaluer, sans complaisance, la qualité réelle des prestations des établissements et d’aligner l’offre nationale sur les standards internationaux. Concrètement, ces contrôleurs joueront les clients lambda. Sous couverture, ils réserveront une chambre, testeront l’accueil, passeront à table, vérifieront l’hygiène, jaugeront la literie, la propreté, l’état des piscines et même la qualité de l’infirmerie pour certains complexes.
Aucun détail ne sera laissé au hasard. La grille d’évaluation, revisitée pour l’occasion, se veut exhaustive et adaptée aux spécificités de chaque catégorie d’établissement, du riad de charme aux hôtels-clubs haut de gamme. «Il s’agit d’apprécier de façon objective la qualité de service et de vérifier qu’elle correspond réellement au classement affiché », résume un responsable du ministère cité par L’Économiste. Et l’enjeu est de taille. Un service défaillant pourra coûter une ou plusieurs étoiles aux établissements pris en flagrant délit de surclassement abusif.
Derrière l’exercice, se cache une réalité que beaucoup d’opérateurs préfèrent taire. De nombreux hôtels marocains, notamment dans le haut de gamme, affichent un standing qui ne correspond plus à leur classement officiel. «Il existe des hôtels pseudo 5 étoiles qui ne méritent pas plus de 4, voire 3 étoiles. Cette opération va remettre de l’ordre», confie un professionnel du secteur, également cité par L’Économiste.
Pour Chérif Alami, président du Conseil régional du tourisme (CRT) de Casablanca-Settat, la démarche est salutaire. «La France a appliqué le même dispositif pendant cinq ans. C’est un chantier qui devrait structurer durablement l’industrie hôtelière et rehausser nos standards», souligne le quotidien. Pour piloter l’opération, le ministère a lancé quatre appels d’offres afin de recruter des évaluateurs chevronnés, tenus de mener leur mission avec neutralité, discrétion et respect des règles éthiques propres à l’audit surprise. Au-delà du simple reclassement, c’est toute la logique économique du secteur qui est en jeu. Car pour de nombreux professionnels, l’offre hôtelière marocaine souffre d’un double décalage: un niveau de service inégal et une tarification souvent déconnectée des ratios de rentabilité. «Si l’on veut rester compétitifs, il faut arrêter de vendre du rêve et proposer une offre qui tienne réellement ses promesses», estime un opérateur.
Les établissements ciblés sont principalement les hôtels 3, 4 et 5 étoiles, mais aussi les résidences touristiques et riads premium. Au bout du compte, seuls les hôtels qui satisferont aux critères stricts conserveront leur classement, tandis que les autres devront revoir leur copie, lit-on encore. Avec cette opération, le Maroc entend conforter sa position de leader africain du tourisme, une place qu’il occupe déjà toutes activités confondues, et viser la première place dans l’hôtellerie de luxe, aujourd’hui dominée par l’Égypte.








