Le projet de loi relatif à l’exercice de la médecine vient de passer son premier examen de passage. Le texte a été approuvé par la Chambre des députés à une majorité de 117 voix, dont 90 du PJD, contre 51 voix, représentant surtout l’opposition. Al Akhbar, qui rapporte l’information sur sa Une, dans son édition du 5 décembre, indique qu’en vertu de cette loi, le capital des cliniques privées pourra être détenu par des investisseurs privés qui n'ont pas forcément adhéré au serment d’Hippocrate.
Levée de boucliersCe projet de loi suscite depuis plusieurs mois la polémique. Les médecins ont multiplié les signes de protestation contre ce projet qui, malgré tout, a réussi à passer la première phase du processus d’adoption au Parlement. Pourtant, le texte n’est pas limpide. Al Khabar met en effet en exergue une contradiction au niveau de la rédaction. L’article 2 stipule que la médecine est un métier qui ne peut en aucun cas, et d'aucune manière, être exercé comme une activité commerciale. Pourtant, un peu plus loin dans le projet, l’article 60 donne le droit à des sociétés commerciales de détenir des cliniques privées et autorise les médecins à se constituer en sociétés commerciales conformément aux dispositions du Code du commerce. Il y a là comme qui dirait un défaut dans l’énoncé. Les médecins et les cliniciens n’ont pas attendu le vote du projet pour se dresser contre lui. Depuis plusieurs mois, le lobbying est intense. En réaction à cette adoption par les députés dudit projet, le Syndicat national des cliniques privées et le Syndicat national des médecins du secteur libéral (SNMSL) ont exprimé leur refus catégorique de l’ouverture des cliniques au capital privé.
Quid de la santé des citoyens ?Les syndicats en question mettent ainsi en avant le fait que ces procédés risquent «d’organiser les cliniques comme des sociétés commerciales» et d’ouvrir «la porte à l’investissement commercial dans la santé», ce qui assujettira «la santé des citoyens à la logique du marché». Selon les deux organisations, cette logique s’inscrit en porte-à-faux avec «les règles et la déontologie au fondement de l’exercice de la médecine» et du «droit des citoyens à accéder aux soins de manière égale et équitable socialement». La défense des professionnels sonne pourtant comme une charge pour conserver le monopole sur les cliniques privées. Car pour les défenseurs du texte de loi, l'ouverture du capital aux investisseurs va se traduire positiviement par l'introduction d'équipements de pointe et pourra répondre aux exigences de nombre de citoyens qui ne font pas confiance aux cliniques locales et partent en Europe pour se soigner.L’adoption de ce texte par la première chambre a irrité au plus haut point les professionnels. Ces derniers menacent de durcir leur mouvement de protestation devant l’entêtement du gouvernement qui veut faire passer cette loi. A titre de rappel, ce projet ne date pas d’hier. Il remonte à l’époque où Yasmina Baddou présidait aux destinées du département de la Santé. Le risque encouru est que ce texte ne puisse pas permettre à des sociétés privées d’acheter de nombreuses cliniques, de monopoliser le marché et de fausser le libre-jeu de la concurrence. Certains opérateurs économiques ont d’ailleurs déjà anticipé ce texte en achetant des cliniques. Le texte passera-t-il le cap de la Chambre des conseillers? Les prochains jours apporteront certainement la réponse.