L’investissement public est au cœur de la reprise économique. Sur ce plan, le gouvernement ne lésine pas sur les moyens, malgré des recettes en berne réduisant de facto ses marges de manœuvre budgétaires. Ainsi, le volume de l’investissement public programmé pour 2021 devrait atteindre 230 milliards de dirhams. La note de présentation du projet de loi de finances 2021 montre la ventilation suivante de «cet effort inégalé», comme l’a souligné Mohamed Benchaâboun, devant les parlementaires.
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Le Fonds Mohammed VI pour l’investissement est une nouveauté dans le package de l’investissement public. Selon les instructions royales, il sera la pierre angulaire du plan de relance de l’économie nationale. Il devrait s’appuyer sur des fonds sectoriels spécialisés qui lui sont rattachés pour intervenir dans des secteurs prioritaires, tels que la restructuration industrielle, l’innovation et les activités à fort potentiel, les petites et moyennes entreprises, les infrastructures, l’innovation et le tourisme.
Mais quand le ministre des Finances parle de 45 milliards de dirhams, il ne s’agit là que d’un montant ciblé. Le rapport sur les établissements publics évoque une dotation de 15 milliards de dirhams provenant du budget de l’Etat. Pour l’heure, il n’y a donc qu’un tiers de ce montant qui est disponible. Et encore faudra-t-il mobiliser ces 15 milliards disponibles, en une seule année, avant d’espérer mobiliser les 30 milliards restants auprès des partenaires internationaux et d’institutionnels locaux.
Et pour cause, quand il s’agit de réalisation des investissements, l’administration accumule les retards. Au niveau des dépenses d’investissement, on accuse chaque année des reports. Autrement dit, les différents ministères ont du mal à lancer ou à finaliser tous les projets programmés. Le budget 2021 prévoit d’ailleurs «des crédits de reports correspondant aux crédits engagés dans le cadre de la loi de finances rectificative pour l’année 2020, mais non ordonnancés au 31 décembre 2020, pour un montant estimé à 10 milliards de dirhams», comme on peut le lire dans la note de présentation. Ce crédit s’ajoute au montant des crédits de paiement prévus au titre des dépenses d’investissement dans le budget d’Etat. Ces dépenses d’investissements devraient s’élever à 77 milliards de dirhams et ce montant connaît une baisse sensible par rapport à l’année précédente.
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Une autre composante importante de l’investissement public provient des entreprises et établissements étatiques (EEP). Pour cette rubrique, l’argentier du Royaume prévoit une enveloppe de près de 82 milliards de dirhams. Mais là encore, les niveaux de réalisation n’atteignent jamais les 100%. «Pour l’exercice 2020, les prévisions actualisées des EEP au titre de l’investissement sont de 70.172 MDH, en recul de 31% par rapport aux prévisions initiales de 101.195 MDH. Ce réajustement s’explique en partie, comme à l’accoutumée, par l’impact des décisions issues des discussions budgétaires des travaux des organes délibérants de EEP», peut-on lire dans le rapport sur les EEP accompagnant le projet de budget. En d’autres termes, les conseils d’administration des entreprises publiques finissent par réduire la voilure et n’engagent pas l’ensemble du montant budgétisé. En 2019 d’ailleurs, le taux de réalisation des investissements par les EEP s’est limité à 72% seulement.
La dernière grande composante des investissements publics correspond aux montants à mobiliser par les collectivités territoriales. 18 milliards de dirhams sont prévus, à ce titre, dans le budget 2021. Sur ce plan, les élus locaux qui ont la main sur cette manne risquent d’avoir du mal à lancer des projets structurants, alors que les rivalités politiques devraient monter d’un cran à l’approche des élections. Pour preuve, plusieurs conseils communaux ont du mal à adopter leurs budgets pour 2021.
En définitive, entre grandes annonces chiffrées et réalisations effectives sur le terrain, l’investissement public est généralement soulagé de plusieurs dizaines de milliards de dirhams. L’année 2021 ne devrait pas déroger à la règle…