«Les précipitations sont toujours les bienvenues, quelles que soient les régions, quel que soit le moment», résume d’emblée l’ingénieur-agronome Abdelmoumen Guennouni.
Les premiers bilans, toutefois, font déjà état d’une situation contrastée: si certaines zones vont profiter pleinement de cet apport en eau pour consolider des cultures déjà bien avancées, d’autres ne peuvent espérer qu’un faible impact. Le retour des pluies, aussi bienvenu soit-il, ne saurait donc compenser à lui seul un retard accumulé depuis l’automne.
Abdelmoumen Guennouni l’explique clairement: «En ce qui concerne les grandes cultures, comme les céréales et les légumineuses, on peut distinguer deux cas de figure. Dans certaines régions, où les précipitations sont déjà tombées, les cultures ont atteint un certain stade de développement et vont naturellement tirer profit de ces nouvelles pluies pour terminer leur cycle et parvenir à une production optimale.»
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On comprend alors que les zones les plus avantagées sont celles qui ont reçu des pluies automnales importantes, permettant l’implantation rapide des semis dès le début du cycle végétatif. «C’est plutôt les régions nord, c’est-à-dire le Gharb, le Loukkos, Fès, Saïss», précise-t-il. Grâce à ces réserves d’eau déjà accumulées et à un enracinement précoce des jeunes plants, ces régions pourraient enregistrer de bons rendements cette année.
En revanche, pour la Chaouia, Doukkala, Abda et d’autres régions du centre-sud du pays, la donne est bien différente: l’absence de pluie au démarrage a empêché la levée des cultures. «Ici, les cultures automnales ne vont pas tirer profit de cette pluie parce que le cycle des céréales, qui commence normalement en novembre et se termine en mai, ne peut pas se dérouler en deux, trois mois, c’est impossible», regrette notre interlocuteur.
Un soulagement en demi-teinte
Dans les régions ayant déjà reçu de l’eau dès l’automne, l’arrivée de nouvelles pluies constitue un atout précieux. Les céréales en phase de tallage ou de montaison pourront consolider leurs tiges et amorcer la formation des grains dans de meilleures conditions. Les légumineuses – particulièrement sensibles au stress hydrique – profiteront également de cette manne, renforçant à la fois leur croissance végétative et leur production de gousses.
À l’inverse, là où la sécheresse a sévi trop longtemps, un démarrage tardif ou inexistant des semis limite fortement l’impact de ces précipitations printanières. «Même si les gens ont travaillé le champ et ont semé, il n’y a pas eu de levée de culture, donc il n’y aura pas d’impact», note Abdelmoumen Guennouni.
Quid du pâturage?
Les éleveurs, eux aussi, espéraient beaucoup de cette arrivée de la pluie pour voir reverdir pâturages et prairies. Mais, selon l’ingénieur, «on n’aura pas d’impact parce que les plantes qui poussent dans le pâturage sont aussi des plantes qui dépendent d’un cycle annuel». Habituellement, l’automne déclenche la germination des espèces herbacées utilisées pour le pâturage. Sans précipitations suffisantes à cette période, ces végétaux n’ont pas pu se développer. Même des pluies abondantes au printemps ne parviendront pas à rattraper un retard de plusieurs mois.
Sans surprise, les cultures irriguées vont bénéficier des dernières pluies
Les cultures irriguées vont tirer profit de l’eau de pluie, moins salée que l’eau de pompage, qui améliore la qualité hydrique globale des sols. Elle réduit également le recours à l’irrigation artificielle, ce qui va permettre aux agriculteurs de faire des économies sur l’énergie et l’eau pompée, tout en ménageant davantage les nappes souterraines, poursuit notre interlocuteur.
L’arboriculture: des bénéfices à plus long terme
Les arbres fruitiers se montrent plus résilients face à des épisodes ponctuels de sécheresse, car leurs racines puisent l’eau plus en profondeur. Toutefois, les pluies qui surviennent au printemps peuvent améliorer l’état des réserves hydriques et, dans certains cas, favoriser la floraison et la nouaison.
Néanmoins, l’effet réel se fera sentir plutôt l’année prochaine. «Les pluies ne bénéficient pas automatiquement l’année en cours. Les résultats se verront l’année prochaine sur les cultures qui vont venir l’année prochaine si les conditions se déroulent normalement», nuance l’expert. Ainsi, l’eau accumulée dans les sols et dans les nappes souterraines contribuera à la vigueur des arbres à plus long terme.
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