Vidéo. Essaouira: quand 115 artistes gnaouis célèbrent ensemble l'inscription de leur musique au patrimoine de l'Unesco

Mhand Oubarka / Le360

Le 21/11/2021 à 16h30

VidéoCe sont 115 artistes, dont 73 Maâlems, qui sont venus de tout le Royaume pour vibrer Essaouira au rythme des sons Gnaoua. Cette musique confrérique soufie, inscrite le 12 décembre 2019 au patrimoine immatériel de l'Unesco, fait partie des multiples facettes de l’identité culturelle marocaine.

Essaouira, capitale du tourisme culturel et berceau de la musique Gnaoua, a accueilli hier, samedi 20 novembre 2021, une soirée grandiose, qui sera prochainement diffusée sur Al Aoula, pour célébrer l’inscription des Gnaoua sur la liste du patrimoine culturel et immatériel de l’Unesco (Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture).

Une immersion totale dans cet univers fascinant a été garantie grâce à quelque 120 minutes de rythmes, de chants et de partage. Tous les acteurs d’une vraie Lila (veillée) traditionnelle ont été présents pour refléter toutes les dimensions de la culture gnaouie.

Interrogé par Le360, le Maâlem Abdeslam Alikane, directeur artistique du Festival Gnaoua et musiques du monde et président de l'association Yerma Gnaoua, a souligné que "cette soirée se veut une véritable célébration de l’art Gnaoua le plus pur, celui-là même qui a été reconnu patrimoine culturel et immatériel de l’Unesco".

Il a aussi indiqué que cette inscription des Gnaoua sur la liste du patrimoine culturel et immatériel de l’Unesco est venue couronner les efforts déployés depuis plusieurs années pour faire inscrire cet art séculaire sur la liste de cette organisation onusienne chargée de la sauvegarde des patrimoines culturels, précisant que des 115 artistes gnaouis sont venus de Tanger, de Tétouan, d’Asilah, de Fès, de Meknès, de Casablanca, de Rabat, de Marrakech, d’Essaouira, de Taroudant, d’Agadir et de Safi pour animer cette soirée de célébration.

Pour ce spécialiste du style "Marsaoui", également l’un des grands messagers de l’art Gnaoua à travers le monde, il est aujourd'hui important de passer à la vitesse supérieure et ce, en créant un Musée et une école pour l’apprentissage de cet art ancestral.

Rencontrés sur place, les artistes ont exprimé leur joie d'être à Essaouira pour participer à cette soirée artistique haute en couleurs. Ils ont également décrit le rituel des Lilas (veillées), des nuits de musique d'exception animés par les Maâlems, des musiciens danseurs, et de la Mqadma (la gardienne du sanctuaire). Ces Lilas se caractérisent par des phases musicales, sensorielles et sociales inscrites dans une temporalité spécifique. 

Cette cérémonie se passe ainsi en quatre phases, expliquent ces artistes gnaouis. Le début de la Lila (veillée), appelé Al Adda, se caractérise donc par des chants invoquant Allah et le Prophète Mohammed. Tous les acteurs prennent place ainsi que chaque accessoire: cierges allumés, braseros, tissus de couleur, plateaux...

Vient ensuite la première série d’incantations, appelée Oulad Bambara. Les musiciens dansent devant le Maâlem, avançant et reculant en frappant des mains. Puis en cercle. Sont évoqués Allah, le Prophète Mohammed, les maîtres anciens Gnaoua et certains esprits. C’est une sorte d’incantation d’ouverture de la veillée.

Lors de la troisième étape, connue sous le nom de Nougcha, les crotales font leur entrée sur un rythme lent et lancinant qui ira crescendo. Les paroles sont une invocation de Dieu, des proches et de la mémoire des anciens Maâlems sous l’égide desquels le chanteur place son travail et demande qu’il soit accepté.

Toujours selon ces artistes, à la fin de la cérémonie, étape appelée Leftouh, tout est en place pour passer à la partie musicothérapie de la cérémonie. Cette phase nécessite l’installation des accessoires: plateau, foulards de couleurs, encens... Le maître musicien déroule alors le répertoire d’incantation des mlouks, divisés en huit grands groupes, avec chacun sa couleur.

L’inscription des Gnaoua sur la liste du patrimoine culturel et immatériel de l’Unesco a été le fruit d’efforts soutenus et d’un partenariat exemplaire entre les autorités publiques, les acteurs de la société civile et les communautés des Gnaoua dans toutes les régions du pays.

Cette inscription est aujourd’hui décisive pour permettre notre pays de bénéficier des mécanismes nécessaires à même de préserver ce patrimoine, permettre sa transmission entre les différentes générations et le reconnaître enfin comme une expression culturelle majeure de notre identité, riche et plurielle.

Par Hajar Kharroubi et Mhand Oubarka
Le 21/11/2021 à 16h30