On dit de Napoléon beaucoup de choses. Tour à tour raciste, homophobe, mégalomane, pillard, islamophile, anglophobe, restaurateur de l’esclavage, génie de la com’, écrivain raté, prédateur, misogyne …
Deux cents ans après sa mort, «Napoléon sur le divan», de Dimitri Casali, passe au crible toutes les facettes du sujet en nous livrant une sorte de psychanalyse de cette figure de l’Histoire.
© Copyright : DR
Dans un chapitre en particulier, l’auteur revient sur la fascination méconnue de Napoléon Bonaparte pour l’Islam au point que celui-ci aurait déclaré un soir au baron Gourgaud: «J'aime mieux la religion de Mahomet, elle est moins ridicule que la nôtre.»
Bien que Bonaparte ait été élevé dans la foi catholique par une mère très pieuse, on apprend dans cet ouvrage qu’il se plongea dans la lecture du Coran dès l’adolescence et qu’à 20 ans, il écrivit même une nouvelle inspirée du prophète Mohammed, «le Masque du prophète», dans laquelle il relate le destin d’un homme pieux qui parviendra à faire se soulever des peuples.
Plus tard, en 1798, alors qu’il occupe le poste de général dans l’armée, il part pour la conquête de l’Egypte. A peine arrivé, il sensibilise d’emblée ses hommes à l’importance de faire preuve d’ouverture et de tolérance en leur déclarant: «les peuples avec lesquels nous allons vivre sont musulmans (…) Ayez des égards pour leurs imams comme vous en avez eu pour les rabbins et les évêques… »
Aux populations qu’il rencontre à Alexandrie, dans le souci d’apaiser les esprits, il promet qu’il se convertira à l’islam, preuve de sa bonne foi: «On dira que je viens détruire votre religion, ne les croyez pas (…) Répondez que je viens vous restituer vos droits, punir les usurpateurs, et que je respecte (…) Dieu, son prophète et le Coran ».
Puis, il adopte l’habit local comme l’explique Dimitri Casali dans son livre. Bonaparte est à ce point intégré à la société égyptienne que le peuple le nomme désormais “le sultan El-Kébir” et que le conseil du diwan le renomme Ali-Bonaparte. Quant à lui, il va encore plus loin dans son envie d’intégrer la foi musulmane en se faisant appeler “digne enfant du Prophète” et “favori d'Allah”…
Puis en 1799, Bonaparte prononce la Shahada devant la foule, profession de foi qui fait de lui ce jour-là un musulman. Toutefois, l’auteur de «Napoléon sur le Divan» émet quelques réserves quant à la sincérité de sa démarche spirituelle, rappelant que Napoléon, «prince des caméléons», «génie de la com» avait besoin de s’assurer le soutien des locaux face aux forces ottomanes qui attaquaient l’Egypte.
Et une fois de retour en France, l’auteur rappelle qu’il montrera le même intérêt pour le catholicisme dans le souci de rallier à sa cause les catholiques en signant, en 1801, le concordat avec le pape Pie VII qui le sacrera plus tard à Notre-Dame.
Pour Bonaparte, «une société sans religion est comme un vaisseau sans boussole». Il affirmait ainsi, « c'est en me faisant catholique que j'ai fini la guerre de Vendée, en me faisant musulman que je me suis établi en Égypte, en me faisant ultramontain que j'ai gagné les esprits en Italie. Si je gouvernais le peuple juif, je rétablirais le temple de Salomon… »
C’est donc afin d’asseoir sa politique qu’il use de la religion, en tournant le dos toutefois au fanatisme qu’il abhorre.