Cette initiative patriotique était nécessaire. Le journaliste et enseignant universitaire en communication politique, Belkacem Amenzou, fait œuvre utile pour les générations à venir. Un tel travail de mémoire doit être mis à jour régulièrement. Tous ces moments forts des discours compilés de Sa Majesté le roi Mohammed VI prononcés à l’occasion des fêtes nationales notamment, rendent compte d’une constance rigoureuse de demande «d’agir» et de pragmatisme de la part du Roi. S’en dégage, au fil des pages, une vision qui préfigure le Royaume du Maroc de nos enfants, et évoque l’État futur tel qu’il doit prendre corps dans notre société. Nous sommes tous dépositaires, d’après Belkacem Amenzou, de la parole royale, chacun à son échelle. Mais à l’arrivée, nos enfants gagneront le jackpot ensemble, quel que soit leur point de départ. C’est ce message principal du Maroc palpitant dans notre inconscient collectif qui est décortiqué ici à travers les discours royaux.
Le Roi du Maroc prononce depuis 2023 (et la suppression du discours «Révolution du Roi et du peuple» du 20 août) deux discours officiels à la Nation, à l’occasion de la fête du Trône le 30 juillet et la Marche verte le 6 novembre. En plus de ces deux discours, le roi Mohammed VI prononce un troisième allocution pour l’ouverture de l’année législative du Parlement, le deuxième vendredi du mois d’octobre de chaque année.
«Distingué par son style savant et moderne, SM le Roi cadre généralement ses discours pour répondre au même format avec une durée maximale de 15 à 20 minutes. Il pense, analyse et livre ses prédictions sur l’avenir» (p.25), dit l’universitaire. Mais, prévient Belkacem Amenzou, malgré cette spécificité formaliste, chaque moment dipolaire des discours est chargé en valeur absolue égale, ce qu’il nomme «la révolution permanente» (p.44). Le Roi dédie traditionnellement le discours du Trône au «bilan des réalisations de l’État et esquisse les perspectives de son action à venir» (p.18). Tandis que la cause nationale du Sahara marocain constitue l’axe fondamental de tous les discours de la Marche verte «essentiellement dédiés aux développements de la cause (…), les chantiers lancés dans la région et d’une manière générale la politique du Royaume consacrée à cette question de l’intégrité territoriale du pays» (p.20).
Or l’intérêt de ce livre bien composé est d’être accompagné de notes sur le style des discours officiels, d’une analyse fine de la rhétorique utilisée pour parler à la Nation par Sa Majesté. Au fil des 152 pages se déclinent les principaux concepts forgés par la vision royale depuis des années et dont on estime plus justement la rigueur, et la pertinence, aujourd’hui.
Ces paroles deviennent des actions politiques royales, «une parole politique en pratique, en action» (p.36). On revisite avec intérêt les schèmes du Roi dans les discours: l’Afrique, les concepts «autonomie des régions», «institutions impartiales», «rationalisation des débats parlementaires», en passant par les concepts royaux d’«autorité», de «sérieux», «réconciliation sociale» ou «proximité», etc. Toutes les notions fondamentales introduites par Sa Majesté depuis son accession au glorieux trône sont mises en exergue par l’universitaire, replacées dans leur contexte discursif d’origine, analysées sur les plans stylistique et politique. Ce sont les briques, les socles de la Nation. C’est cela que l’auteur appelle «La rhétorique de l’agir».
Dans l’agir, le Maroc en entier se confond avec la parole du Roi dans une symbiose étonnante et rare chez les peuples du monde, et explique le succès retentissant de la marche diplomatique, sociale et économique de notre pays sous le flambeau de Mohammed VI. Cela est dû, précise Belkacem Amenzou, à la sincérité ressentie par le corps social dans les actions et les paroles du Monarque, toujours cohérentes et menées d’un même souffle humain. Cette confiance franche et loyale des protagonistes de l’agir, Roi et société, autorise l’action politique et les réformes. D’autant plus, souligne Belkacem Amenzou, que cette crédibilité s’est imposée loin de tout «marketing politique, de communication politique ou de propagande» (p.35) des formes discursives démagogiques et viciées. Elle se cristallise aussi dans un feed-back dans la société par «les ambiances de fête et des liesses populaires que réservent spontanément et massivement les populations au Souverain partout dans le Royaume. En vingt-quatre ans, le souverain aura parcouru tout le territoire de son pays et visité toutes les contrées» (p.38).
«Communication royale. La rhétorique de l’agir» est bien plus qu’un recueil méticuleux des principaux discours royaux. Il est pratique et pédagogique, utile aux citoyens lambda de tout âge et aux chercheurs. Une invitation à entrer dans le monde fascinant de la communication du Roi.
Belkacem Amenzou, natif de Taza, est enseignant en politique et opinion publique à l’université, et dispense des cours de communication politique et de rhétorique dans des instituts marocains. Il a aussi à son actif une carrière riche de plus de vingt ans dans la presse, dont il fut un ancien rédacteur en chef à Al Bayane. Il a publié en 2022 son premier ouvrage intitulé «Le mot, la plume et la plaie» opuscule qui rassemble des articles publiés par l’auteur dans différents journaux nationaux.
«Communication royale. La rhétorique de l’agir», de Belkacem Amenzou, 152 pages. Éditions Rayan Printing, 2024. Prix public: 250 DH.