Isabelle Huppert est désormais une habituée du Festival international du film de Marrakech. Elle y viendra à plusieurs occasions. En 2012, elle commence par recevoir un hommage. Deux ans plus tard, en 2014, c’est à la tête du jury qu’elle revient au FIFM. En 2016, elle monte sur la scène à l’occasion de l’hommage rendu au réalisateur néerlandais Paul Verhoeven avec lequel elle a collaboré pour son film Elle, et lui remet son trophée. En 2022, cette comédienne française de renom, à la carrière éclectique, est de retour dans le long-métrage La syndicaliste de Jean Paul Salomé. Le360 l'a rencontrée.
Vous êtes venue plusieurs fois au Festival international du film de Marrakech. Comment percevez-vous son évolution?Oui, j’étais présidente du jury, j’ai reçu un hommage, j’ai présenté des films… Et je suis surtout contente que le festival redémarre cette année. J’ai senti une grande ferveur dans la salle où j’ai vu un film et où j’en ai présenté un autre, le mien, hier soir. Cela fait plaisir de voir les spectateurs revenir en nombre.
Votre rôle dans «La Syndicaliste», c’est vraiment vous?Je crois que la meilleure des choses lorsqu’on interprète un rôle, lorsque l’on est actrice, c’est de faire croire que c’est soi. Même si bien évidemment, tout le monde sait que c’est totalement faux. Bien sûr, ce n’est pas moi. Mais la force du cinéma, c’est le pouvoir d’incarnation et de faire croire à la vérité.
Etes-vous satisfaite de votre interprétation dans ce film «La Syndicaliste»?Ce serait complètement présomptueux de ma part de dire que je suis satisfaite de mon interprétation. Ce n’est pas à moi de le dire. Mais je suis satisfaite de ce que mon rôle m’a permis de faire. C’est basé sur une histoire vraie. Mais, au fond, lorsqu’on a dit ça, on n'a rien dit.
L’intérêt d’une histoire vraie, c’est de s’en emparer et de laisser son imaginaire voguer sur cette histoire vraie, pour mieux l’explorer. Si on colle trop à ce que l’on imagine être la réalité de cette histoire vraie, on se donne moins de liberté. Je crois que ce qui est important dans une histoire telle que celle-là, c’est d’en faire un matériel de fiction le plus large possible et qui pose le plus de questions possibles.
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Cette histoire est édifiante à plus d’un titre. C’est un contexte économique et politique particulier et cela raconte beaucoup de choses de ce qu’a vécu cette femme, en tant que femme, dans un monde d’hommes particulièrement hostile, particulièrement suspicieux, et qui l’emmène là où elle a été emmenée.
Vous avez démarré votre carrière avec deux géants du cinéma français que sont Bertrand Tavernier et Claude Chabrol. Quel regard portez-vous sur ce pan de votre carrière?Je n’ai pas le sentiment d’un temps révolu. Je continue à travailler avec des grands metteurs en scène dignes de ce nom. J’ai eu des rencontres particulièrement riches et fructueuses que ce soit Claude Chabrol, Michael Haneke. J’en ai d’autres et j’en aurai d’autres.
Dans l’une de vos déclarations, vous avez dit, «l’ambition implique aussi les autres». Vous voulez montrer l’importance de l’interdépendance?L’interdépendance est une réalité objective. Nous ne sommes pas seuls au monde. On est forcément fait de ce qu’on est et d’occasions que l’on saisit, de rencontres, de hasard, et d’obstination. C’est ce qui décrit une vie. Moi, j’ai beaucoup de chances, car il y a des vies où tout cela ne sert à rien.
Moi, j’ai la chance de faire ce qui m’anime, me plaît, mais tout le monde ne peut pas en dire autant malheureusement.